Chapitre 23

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Iris

    Dans le silence nous rentrons au domaine de Brugmansia où rapidement les mauvaises herbes de l'ange de la mort se précipitent pour prodiguer les soins nécessaires à leur leader tandis que Rafflesia aide l'enfant à sortir du van.
    Ses larmes ont arrêté de couler mais ses opiniâtres affres sont encore là. Dans ses ocelles noisettes et ses longs cils bruns, des traumatismes le guettent déjà.

« Où est-ce que vous l'emmenez ? » je demande lorsque la mauvaise herbe la plus loyale de l'ange de la mort entraîne l'enfant à l'intérieur de la maison.

    Ce dernier se retourne.

« Nous allons soigner sa blessure au poignet puis nous le ramènerons à ses parents. Quant à toi, tu devrais rejoindre ta chambre si tu n'es pas blessée. »

    Sans s'attarder sur mon cas, il disparaît entre ces couloirs sombres.
    Mes énergies volées durant cette terrible soirée, je referme la portière du van et triste, je regagne ma chambre. La lumière est éteinte et mon petit renardeau dort paisiblement en boule sur mon lit. Comprimée dans ma robe, je me tortille pour défaire le corset qui m'empêche de me sentir libre et lorsque enfin, les lacets se délassent, silencieusement, deux perles salées cristallines longent mes joues maquillées.
     Déboussolée, je les essuie mais malgré la noirceur de la pièce, une lueur en provenance de l'extérieur, traverse ma fenêtre et réfléchit sur mon grand miroir, me renvoyant alors mon reflet. Je retire mon vêtement confectionné entre les mains d'une déesse de la mode et de l'innovation.
    Cette robe était majestueuse. Des plumes de paons, de la soie sauvage en guise de lacets, du velours sur le corset pour le maintenir rigide... Le moindre détail était travaillé.
    Juste en culotte, je pose ma robe sur un cintre que je croche à la barre de ma penderie puis je regarde le reflet de mon ventre face au miroir, comme si je me confrontais à celui-ci.

« Dans combien de temps cela sera si visible que je ne pourrai plus le nier ? » je me demande.

    Je pose ma main sur l'endroit où grandit, au chaud, un enfant, sans savoir s'il vivra, et pour combien de temps dans ce monde de sauvages. Loin de la tranquillité de mon monde que Lazulite a fait sien.

« Nous serons seuls... »

    J'enfile un vêtement large et je m'assois dans mon lit, en quête d'énergie pour dénuder mon visage mais une personne toque à la porte puis entre doucement. Je reconnais ma grand mère.
    Son sourire se fait chaleureux mais inquiet alors elle referme la porte derrière elle et s'installe auprès de moi.
    Comme quand j'étais enfant, elle caresse mes longs cheveux bruns et bouclées que ma mère m'a offert en héritage.

« J'ai entendu les hommes de Brugmansia s'agiter à votre arrivée. Est-ce que tout va bien ?

— Rien ne va. je suis obligée de le reconnaître. Rien ne va et je vais devoir annoncer à l'ange de la mort que son chaos va s'étendre sur un enfant... Le notre. »

    Je prends une grande inspiration pour ne pas flancher une nouvelle fois et ma grand mère me révèle.

« Cela fait plusieurs nuits que je rêve. Je rêve de serpents morts. Cela signifie qu'un malheur va s'abattre sur nous. elle caresse mon bras. Mais les autres nuits, je rêve d'un feu de forêt que je réussis à maîtriser. Tu sais ce que cela veut dire dans l'oniromancie.

— C'est signe que nous aurons la capacité de contrôler nos émotions et les événements à venir. »

    Mon ancêtre dépose un tendre baiser sur ma tempe.

« Il n'y a pas d'arc-en-ciel sans pluie, IrisNatsunir. »

    Mon renardeau se réveille et vient se blottir entre ma grand mère et moi.
    Un long silence berce la pièce puis je me sens en confiance pour me confier.

Brugmansia IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant