Chapitre 39

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Jungkook

    En rentrant au domaine de Brugmansia, je rentre directement dans ma chambre déserte. La grande baie vitrée a été ouverte et le léger vent fait doucement danser le voilage blanc qui masque cette sortie. Mais mes attrapes-cauchemars tintinnabulants donnent une mélodie, que je n'aime pas beaucoup, à cette nuit.
    Je balance mon sac d'argent sur mon lit puis retire mon t-shirt recouvert de particules poussiéreuses. En toussotant à cause d'un coup pris de plein fouet dans l'abdomen, je m'installe sur le tabouret devant mon orgue et je joue quelques mélopées que j'avais cessé de jouer depuis quelques jours.
     Je ferme les yeux et me laisse embarquer par mes sentiments, sur ces mots sur lesquels je n'arrive pas à exprimer. Si cette mélodie avait une couleur, elle serait noire. Représentée en noir et blanc.
    Irisi mettait des couleurs là où il n'y avait rien que du noir. La sauvageonne mettait peut-être des sentiments plus joyeux là où l'asthénie a fait son coup d'état depuis bien longtemps, là où l'ataraxie n'a plus sa place depuis des années.
    Iris avait donné une âme à mon enveloppe charnelle qui n'avait rien de vivante.
    Mais j'ai la sensation que nous ne pouvons jamais être honnêtes l'un envers l'autre. Comme si le malheur planait toujours au-dessus de nous et que nous préférions l'éviter plutôt que de le subir par crainte de connaître notre définitive séparation.
    Malgré les notes austères qui se déploient dans le domaine endormi, j'entends le léger grincement de la porte de ma chambre.

« Retourne te coucher, Iris. » je lui dis.

    Je sens sa présence. Je pourrais même sentir son parfum.
    Mais la sauvageonne ne m'écoute jamais. J'entends ses pas s'approcher et elle pose sa main sur mon épaule dénudées.

« Nous devrions parler. Cela fait maintenant deux semaines que tu ères le soir. Même Rafflesia ne t'accompagne plus et s'inquiète pour toi. Nous ne parlons plus. Nous ne nous voyons presque plus. »

    Je dénote sa peine dans sa voix alors j'arrête de toucher les touches du clavier de l'instrument de musique puis je pivote sur mon tabouret pour faire face à la sauvageonne.

« Que veux-tu que je te dise ? »

    Immédiatement, ses yeux tombent sur la trace sanglante à la commissure de mes lèvres alors je passe ma langue dessus pour effacer la moindre trace sanglante.

« Mon Dieu ! Tu t'es battu ? Tu es blessé ? Tu veux que j'appelle Rafflesia ? Qui t'a fait ça ? »

    Elle me mitraille de questions à la seconde en posant ses mains frêles sur les joues pour qu'elle puisse correctement détailler mon visage mais je ne suis pas blessé. Je ne peux pas en dire autant de mes assaillants.

« Je vais bien. » je me retire de son emprise.

    Depuis la soirée de Lazulite, je n'ai pas trouvé de conversations assez intéressantes à maintenir avec la sauvageonne. Je n'ai rien su dire et je ne sais même pas quoi lui répondre à ses intrigues car je doute de tout mais surtout de nous. De sa loyauté envers moi.
     Iris s'agenouille devant moi en me tenant les mains et j'aperçois ses yeux brillants de larmes sous le reflet de la lune.

« Dis-moi ce que je dois faire pour que tu me pardonnes. »

    Iris est magnifique, même en pleine nuit je suis capable de reconnaître sa beauté. Ses boucles brunes cascadent librement autour de son visage tandis que son corps est recouvert d'une nuisette verte pâle. Ses pieds nus l'ont trahi lors de son entrée dans ma chambre et ses yeux argentées sont si différents de toutes les ocelles que je connaisse pour ne pas être identifiables.

« Je n'ai pas besoin de te pardonner. je lui avoue. Je ne veux pas d'excuses. Je veux pouvoir te faire confiance. »

    Même si nos altercations ont été proches de zéro, j'ai quand même remarqué que sa grossesse évoluait et que son corps commençait à porter la marque distincte de la vie. Son ventre arrondi commence à être apparent.

Brugmansia IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant