Chapitre 10

37 2 34
                                    

Je me réveille difficilement. J'ouvre lentement les yeux avec une sensation que je n'ai jamais ressenti avant. Comme si je revenais du monde des morts. J'essaie de bouger et mon corps engourdi hurle à chaque mouvement. Ma tête hurle elle aussi, je n'ai jamais eu autant mal au crâne. La bouche affreusement sèche, j'avale ma salive et la nausée d'hier soir revient. Lentement, très lentement je me retourne sur le dos. Je constate alors que je suis dans un lit et dans une pièce que je connais pas.

C'est une pièce de taille moyenne, dans les combles, assez vieillotte, les rideaux sont à moitié ouvert sur une fenêtre qui laisse entrer la lumière. Ce peu de lumière suffit à m'aveugler et à aggraver mon mal de crâne. Lorsque j'attrape le drap du lit, je reconnais une odeur familière : celle d'Emy. J'imagine son corps allongé près du mien, l'odeur de sa peau, de ses cheveux et sa chaleur. Je sursaute, ratant un battement de cœur, en position assise. Elle n'est pas là, mais c'est probablement sa chambre. Je suis chez elle. Comment je suis arrivé jusque-là ? Je n'ai aucun souvenir du moment où j'ai quitté de bar de Gary, qu'est-ce qui s'est passé réellement ? Je porte encore mon t-shirt et mon jean de la veille, j'ai seulement perdu ma veste et mes chaussures. Cette perte de mémoire me perturbe. Où est passée Emy ?

Lentement, je lève du lit. Je prends le temps d'observer la pièce autour de moi. Elle est assez sombre, les murs sont recouverts de posters d'artistes de musiques que je reconnais : The Police, GreenDay, Radiohead, Lana Del Rey, Placebo et d'autres que je connais pas. Ce ne sont que des posters noirs, peu souriants et peu chaleureux, qui reflète parfaitement la personnalité d'Emy. Elle possède une enceinte et un tourne-disque. Il y a également beaucoup de paquets de cigarettes, plein et vides, des bouteilles d'alcool vides ou à moitié entamées, sur une table qui devait lui servir de bureau et de cendrier en même temps : elle est aussi remplie de mégots et de cendre. Ses fringues sont étalées partout comme si elle avait vidé son armoire pour chercher la fringue parfaite. C'est le bordel pur. Regarder les bouteilles d'alcool me donne la nausée : comment pouvait-elle boire autant alors que moi-même je peux à peine supporter la moitié d'une bouteille ? En réalité, elle possède peu de choses. Par terre, je remarque le livre que je lui ai prêté pour l'éval de Kearns. En l'attrapant, je trouve aussi, éparpillé sur le sol, tous les cours du début d'année. Elle a sûrement dû énormément réviser. Juste avant la porte, il y a une autre table avec plein de bordel et un miroir posé dessus. Le miroir est sale avec de la poussière sur les coins. Elle ne devait pas beaucoup se regarder à travers. Sur la table, je constate parmi la pagaille du maquillage, certains ouverts, d'autres renversés, des bijoux dont les nombreux anneaux qu'elle avait le long de son oreille, d'autres piercing, des bagues. Je suis pas étonné de remarquer que son environnement colle exactement au bordel qu'elle est elle-même.

Je sors de la chambre : hormis un palier et un escalier, il y a rien d'autre. Cette pièce devait être un grenier réaménagé. En descendant, j'entends des voix, je me fait discret pour pouvoir entendre :

" J'te l'ai déjà dit, je pouvais pas le laisser rentrer chez ses parents dans cet état !

Je reconnais la voix râleuse d'Emy.

- Tu l'as dégoté où celui-là ? C'est pas ton genre.

C'est la voix d'un homme.

- Alors déjà, je l'ai pas dégoté, et c'est juste un... pote.

- Un pote... ça faisait longtemps... dit-il d'un air songeur.

- C'est même pas un pote, je le connais à peine, je lui ai juste rendu service, c'est tout. Il y aura rien d'autre. D'ailleurs, je n'aurais jamais dû le ramener ici. Il faut pas qu'il te voit.

- Oh, tu as honte de moi ? Rigole-t-il.

- Tu sais bien... marmonne-t-elle, je lui ai pas dit pour toi. Maintenant arrête d'être trop curieux sinon tu n'auras rien à manger !

La vie est belleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant