L'ombre des souvenirs

Chapitre 6

Il fait très chaud à l'extérieur. Juliette se félicite d'avoir revêtu sa robe fleurie. Le tissu léger et doux ne lui colle pas à la peau et lui évite de se sentir inconfortable. Aux côtés de Maxence, elle se laisse guider au travers des rues.

« Tu connais la ville ?

— Pas du tout, mais j'ai repéré un peu les lieux avant d'arriver.

Juliette se souvient d'ailleurs d'un détail concernant la visite de Maxence.

— Mais au fait, comment es-tu venu ? Tu m'as dit que tu avais pris le train pour aller à Luxon.

— Tu sais qu'il existe des applications aujourd'hui qui te permettent d'aller de ville en ville sans voiture ?

Les deux amis rient en cœur. Elle doit l'avouer, elle n'avait pas pensé à ce détail.

— À quelle heure dois-tu repartir ce soir ?

— J'ai un peu moins de cinq heures de route et je ne voudrais pas arriver trop tard donc je dirais à 16 heures.

— Oh...

La déception se lit sur le visage de Maxence. Il ne fait aucun doute qu'il aurait préféré un départ plus tardif.

— Dans ce cas, ne perdons pas une minute, profitons-en ! Que veux-tu manger ? J'ai vu qu'il y avait un restaurant italien, un japonais et des brasseries qui donnent sur la fontaine du centre-ville.

— Une brasserie ce sera très bien. »

Une magnifique fontaine taillée dans la pierre des carrières voisines trône au milieu d'une jolie place pavée agrémentée de plusieurs arbres luxuriants. Quelques enfants jouent autour de l'eau en s'éclaboussant pendant que les adultes discutent sur les bancs ou partagent un café ou un repas aux terrasses des bars et brasseries. Le soleil est haut dans le ciel et la fraicheur apportée par les arbres est bienvenue. Maxence et Juliette jettent leur dévolu sur l'un des établissements à la devanture typique. Fort heureusement, il reste une table à l'extérieur, idéal pour profiter du beau temps. Un serveur les installe, leur tend le menu en leur proposant quelque chose à boire pour l'apéritif.

« Un verre de rosé s'il vous plait.

— Et pour moi, une pression blonde.

Le serveur retourne au bar et Juliette en profite pour s'éclipser.

— Excuse-moi une minute, je reviens. »

La femme contourne la table et se faufile à l'intérieur de la brasserie. Elle demande où se trouvent les toilettes avant de s'y rendre. Une chance pour elle, ils ont l'air bien entretenus et une agréable odeur de lavande s'en dégage. Après avoir terminé, elle se lave les mains en fixant son reflet dans le miroir. Durant une seconde, elle se revoit enfant, un jour où elle avait eu du mal à réaliser un exercice en cours de sport. Ce jour-là, l'institutrice l'avait surnommée « le petit sac à patates ». Toute la classe s'était moquée d'elle et le surnom était resté comme tant d'autres tels que « le gros popotin », « la binoclarde », « la garçonne », « la tête d'ampoule », etc. De biens plaisants souvenirs... Aujourd'hui, ceux qui la rencontre ne peuvent pas s'imaginer ce qu'elle a vécu plus jeune et ceux qui l'ont connue enfant ne croiraient pas ce qu'elle est devenue tant la différence est grande. Plongée dans une nostalgie négative, Juliette se secoue et se presse de rejoindre Maxence. Après tout, elle a un bon moment à partager, elle ne va pas laisser ses idées noires lui gâcher une si belle journée.

Lorsque Juliette revient à table, les verres sont servis. Elle se saisit du sien.