Act. 40

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Je pourrais à peine exprimer ce que je ressens actuellement. Jonah est là, allongé sur mon lit, dans ma chambre, là où j'ai ramené mes affaires. Sur ma coiffeuse trône le bouquet de cinquante roses qui n'a pas manqué de faire sourire Déborah.

J'ai passé une bonne partie de la journée avec Sacha dans une ambiance déconcertante, bien qu'il m'ait convaincue de ne pas fuir. Concernant mon père, je sais qu'il va loger chez Mike en attendant. Apparemment, nous avons échangé les rôles.

Je ne suis pas sûre et certaine de comprendre ce qui se passe ici et c'est précisément ce qui me fait complètement dissocier de la réalité, un peu comme quand Jonah a été foutu dehors. Mais maintenant, c'est lui qui est de retour. Ma mère lui a ouvert la porte de la chambre d'amis qui était autrefois la sienne, elle prépare maintenant à manger dans la cuisine comme si de rien n'était, mais je sens que l'ambiance est palpable un peu partout.

Quant à Déborah, elle est en train de prendre une douche, mais je n'ai pas encore eu l'occasion de discuter avec elle.

— Alors... vous êtes en couple ? me demande Jonah en désignant le bouquet.

— C'est Sacha, je ne sais pas ce qu'on est, mais on l'est.

— Mais tu voudrais être en couple avec lui ?

Je me couvre les yeux avec mon avant-bras en soupirant. Mes émotions sont en train de cramer mon cerveau.

— Jonah, je ne sais pas. Je le déteste presque autant que je l'aime. Je n'ai jamais su gérer ça. J'aime être avec lui, j'aime passer des moments où on ne se comporte pas comme des malades mentaux assoiffés de succès. Mais... même si on me laissait la place de l'aimer lui, je crois que je n'arrêterais jamais d'être folle des comédies musicales et de mon envie d'être la meilleure.

— Votre ambition est incompatible.

— Et qu'est-ce qu'on fait si notre ambition est incompatible mais que lui et moi, on est compatible ?

— Ce que vous avez toujours fait : vous saboter et finir par vous détruire.

— Pas vraiment une happy-end, ce que tu me décris là...

— Je ne suis pas là pour te dire ce que tu aimerais entendre, répond-il en soupirant. Mais ça va aller, d'accord ?

Sa phrase sonne comme une promesse. Je ne réponds pas pour autant et je me terre dans mes pensées intensives.

Quand ma mère nous appelle pour manger, nous nous levons en même temps. Déborah nous rejoint dans le couloir, l'air éteinte. Je ralentis le pas et je lui fais signe de s'arrêter.

— Qu'est-ce qui se passe ? Tu ne parles plus depuis que je suis arrivée.

Elle pousse un léger soupir avant de me dire :

— Ils ne sont pas d'accord... pour Kenneth. Tu as vu comment ils ont réagi ? Ils ont même cru que j'étais lesbienne, et ça m'énerve qu'ils ne comprennent rien.

— Déborah, tu en parleras avec eux plus calmement, à un autre moment, mais ils étaient juste surpris. Selon moi, ils n'ont aucun problème avec cette relation tant que tu es heureuse et que Kenneth te traite bien.

Elle hoche sans conviction la tête, puis elle me dépasse pour rejoindre le séjour. Je la rattrape au dernier moment, me rappelant la peine qu'elle m'a fait quand j'ai compris qu'elle cherchait à attirer l'attention sur elle après avoir été aussi longtemps plongé dans l'ombre de notre famille. Je la prends dans mes bras sans la prévenir. Au premier abord, elle ne semble pas vouloir me rendre mon étreinte. C'est sans trop de surprise qu'elle finit par le faire. Elle blottit sa tête contre moi, l'air fragile. Je dépose un baiser sur le sommet de son crâne.

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