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Aujourd'hui c'est le premier jour de la Golden Week, série de quatre jours fériés qui se concentrent sur toute une semaine. D'habitude, pour moi, ça sonne comme un véritable supplice. Mais cette fois ce sera différent, n'est-ce pas ?
Cette fois le vide de la résidence ne me fait plus peur, parce que j'ai moi aussi quelqu'un d'important à rejoindre.

J'avance d'un pas résolu jusqu'aux cuisines où je suis sûr de trouver Tomura et me poste à ses côtés en souriant. Je le salue mais il ne répond pas. Il ne répond jamais, mais c'est ça qui me plaît. Avec lui les sourires de façades n'existent pas.
Moi aussi je veux arrêter de faire semblant, alors sans préambule je lui demande :


- T'as un numéro ?

- Un quoi ?, me demande-t-il à son tour, visiblement interdit par ma question.

- Un numéro de téléphone, j'insiste, pour qu'on puisse s'appeler et s'envoyer des messages.


Il s'arrête et me dévisage comme si j'étais fou à lier mais je soutiens son regard sans faiblir.


- Je comprends pas, grogne-t-il en croisant les bras, pourquoi tu voudrais m'appeler et m'envoyer des messages ? Tu as lu mon dossier, tu sais très bien d'où je viens.

- Tu parles de la prison ?

- Evidemment ducon ! 


La tension qui émane de lui est palpable. A l'évidence, je m'engage sur un terrain plutôt glissant mais je ne compte pas abandonner. Je me fiche bien de ses quinze années de prison.


- C'est vrai, je sais que tu es sorti de prison l'année dernière. Mon père mécène le projet de réinsertion de la ville et chaque année ils nous envoient un ancien détenu en reconversion.

- Pourquoi ça n'a pas l'air de te déranger ?

- Parce que je passe de bons moments avec toi, peu importe ce que tu as fait avant.

- Et ce que je ferais encore, rétorque-t-il d'un ton sec. Tu crois quoi au juste ? Que je suis un gentil détenu plein de regrets ? Que je cherche le pardon ? C'est pas le cas. Je suis rien d'autre qu'un putain de taré fouteur de merde, une anomalie qui ronge le système et ça me plaît de faire mal aux autres. Ca me plaît de les voir souffrir autant que j'ai souffert. Tous ces cons qui se croient bien à l'abris dans leur confort toujours plus grand, paresseux et égoïste, au-dessus de tout, méprisants les plus faibles plutôt que de leur venir en aide... Je changerais pas, j'emmerde leur système malsain et corrompu ! Alors putain, pourquoi est-ce que tu veux mon numéro de téléphone ? Je suis bon pour personne, et je ne veux pas que ça change.


Sa détresse me fait mal. Il essaie de la dissimuler mais elle ressemble trop à la mienne pour que je puisse passer à côté. Bouleversé, je fonds sur lui pour enrouler maladroitement mes bras autour de sa taille et le serrer contre moi. 


- Moi en tout cas, je me sens moins seul depuis que tu es là... Tu peux bien t'accorder une pause, non ?


Cette étreinte n'a rien d'autre à offrir qu'un maigre réconfort et la promesse d'un "nous" futur qui saura se battre contre la solitude qui nous entoure tous les deux. Mais comme je sens les bras de Tomura m'entourer doucement à leur tour, je sais que ça lui convient autant qu'à moi.

A côté des autres, nous - OS découpéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant