Le QG

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Paris- 9h00
ALESSANDRO
Je n'ai pas dormi de la nuit. Je suis occupé à remplir un rapport aux hommes à Naples, pour qu'ils sachent précisément à quelle adresse ils doivent envoyer les livraisons.
Je ne suis pas fatigué, je suis habitué aux nuits blanches qui rythment mes nuits.
Je sors sur le balcon de ma chambre pour griller une cigarette. Le garde-corps en verre m'offre une vue panoramique sur le jardin et la piscine. Je souffle la fumée qui vient se mélanger à la buée matinale de ce jour d'hiver. Si ma mère voyait cella, elle en pleurerait.
Elle qui tenait tant à ce que je sois en bonne santé, quand j'étais petit.
Elle est morte il y a maintenant cinq ans et pourtant, j'entends toujours sa douce voix me dire : "prends soin de toi trésor." Elle me manque, je dois bien l'avouer. Mais ce qu'elle m'a fait est impardonnable, elle a failli tout faire rater, détruire mes plans. Me faire perdre tout ce que j'avais à l'époque. 
Tout...
Je suis perdu dans mes pensées, somnolant devant le soleil qui se lève doucement à l'horizon.
Il est temps d'y aller.
J'enfile mon blouson en cuir marron et me hâte à sortir de cette maison, qui devient décidément étouffante.
Je n'ai envie de croiser personne aujourd'hui. Et encore moins cette fille avec qui je suis forcé de vivre.
Je démarre le scooter et grimace en voyant que la vitesse maximale est basse. Bon sang, que j'ai hâte que ma moto arrive.
Je soupire et me met en route en direction de la capitale.

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Paris se réveille lentement et m'accueille d'une lumière orangée délicate. Il n'y a que moi et le vrombissement du véhicule.
Je me retrouve facilement à travers les ruelles et les avenues, puis finis par arriver devant un immense gratte-ciel en verre.
Le garde du corps qui campe devant la porte coulissante m'offre un large sourire et me salue. Je ne prends pas la peine de regarder cet imbécile, qui fait tout ce que je lui demande sans réfléchir.
Cela a beau être la première fois que je viens dans cet endroit, j'ai l'impression de déjà le connaître, il ressemble beaucoup au QG de Naples, que j'ai pu arpenter dans les moindres recoins.
Je m'avance vers la salle de réunion, où j'ai prévu de faire une point afin de donner les directives nécessaires à mes employés.
Soudain, je sens mon téléphone vibrer dans la poche arrière de mon jean.
Sur l'écran s'affiche le nom "Elsa"...
Comment a-t-elle eu mon numéro ?
Je souffle d'agacement et décroche.

-Quoi, dis-je sur un ton nonchalant.

-Tu veux toujours m'accompagner à l'Opéra ? Dit-elle, enthousiaste.

-Je n'ai jamais dit que j'allais t'accompagner, répondis-je en grimaçant.
 
-Oooh s'il te plaît ! Me supplia-t-elle, on fera plus ample connaissance comme ça !

Je souffle et me pince l'arrête du nez.

-16 h 30. Ne sois pas en retard sinon tu dormiras dans la piscine. La menaçais-je avant de raccrocher.

À vrai dire, ce rendez-vous m'arrange, car j'ai des papiers à récupérer à proximité de Garnier. Mais devoir y aller avec cette fille m'agace ah plus à point. Elle va seulement me retarder et me handicaper.
J'entre dans la salle de réunion, dans laquelle une dizaine d'hommes m'attendent bien sagement, autour d'une table en acajou.
Ils me saluent tous un par un.
Je m'assois en bout de table, m'éclaircît la voix et commence mon monologue.
-Messieurs, bonjour.
Comme vous avez pu le constater, nos nouveaux locaux sont opérationnels.
Je ne vous cache pas que l'adaptation va être éprouvante. Vous suivrez des cours de français intensifs et serez en constante communication avec les équipes à Naples. Le projet, quant-à-lui, reste le même.
Je balaye la salle du regard pour m'assurer qu'ils sont toujours attentifs.
-Le premier qui sera soupçonné de trahison, escroquerie ou autre connerie de ce genre, je me ferai un plaisir de le torturer de mes propres mains.
Un silence plonge la salle dans une atmosphère tendue. Ils savent que je ne rigole pas.
Je me lève, et emprisonne une cigarette entre mes lèvres.
-Des questions ? Demandai-je.
Mes hommes secouent négativement la tête.
J'acquiesce et sors de la pièce.
La montre connectée qui brille à mon poignet affiche 11:00.
Et trois appels manqués d'Elsa.

Elsa...putain, ce n'est pas possible d'être aussi collante.

Fuis moi, je t'aime Où les histoires vivent. Découvrez maintenant