Chapitre - 6

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À l'entrée, la porte se met à sonner, ma mère lève la tête de son plat, regarde l'horloge et pose son couteau.

"Cela doit être le facteur, j'ai fait une commande de légumes il y a quelques semaines, je pense qu'il doit venir nous livrer !
- Je vais m'en occuper, comme ça, tu peux continuer de t'occuper du repas.
- Ce serait parfait, merci beaucoup !"

Ma mère me sourit, et elle replonge la tête pour couper ses ingrédients, je pose le tablier que j'avais mis sur mes genoux et me dirige vers la porte, je surveille que le regard de ma mère ne se dirige pas vers moi, et j'ouvre le sas.

Dans celui-ci, se trouvent quatre combinaisons qui sont attachées contre la paroi, j'appuie sur un bouton pour empêcher que le sas ne déclenche la dépressurisation et la sortie complète de l'oxygène. Lorsque le bruit retentir, j'ouvre alors la deuxième porte du sas.

En réalité, sortir n'est pas vraiment impossible, mais cela est vivement déconseillé. Il n'est pas rare de croiser du monde dehors, seulement, si tu souhaites survivre, il est indispensable de revêtir une combinaison intégrale. Ainsi, si vous croisez un "zombie", qui pourrait avoir la grande envie de vous faire un câlin, il ne pourra pas vous contaminer. Contrairement à ce qu'on peut voir dans les films, ces hommes à demi-mort ne s'attaque pas aux humains, ils sont même généralement assez calmes, mais il n'est pas rare qu'ils souhaitent être aidé et se dirige alors vers vous à vive allure. Enfin, à vive allure quand l'une de leurs jambes ne tombe pas, complètement nécrosées, cela restait des êtes errant, assez inoffensifs. Quitte à être enfermé, je préférais être chez moi... Mais je m'imaginais certaines fois courir dans le sable qui entourait la maison, respirer à pleins poumons l'air en foulant le sol de mes pieds nus. Je détestais cette combinaison.

À l'entrée, l'homme attend avec un panier à la main, il est rempli de légumes, je pense n'avoir jamais vu un panier aussi garni, mais c'est une bonne nouvelle pour nous.

"Bonjour mademoiselle Gaïa, comment allez-vous ?
- Je dirais que cela va comme chaque jour, et vous ?"

J'ai l'habitude de voir cet homme, je le connais d'une certaine manière, c'est lui qui nous livre nos légumes et notre courrier depuis une dizaine d'année maintenant. Mais aujourd'hui, ses yeux ne sont pas semblables aux autres jours, ils semblent vitreux et tristes, ce n'est pas à son habitude, même s'il n'est pas rare de croiser des regards tristes comme celui-ci avec cette pandémie qui nous dévore de l'intérieur.

"Vous savez, mademoiselle, c'est un peu dur en ce moment...
- Quelqu'un de votre entourage est décédé il y a peu de temps ?
- Ma femme !"

En entendant ses mots, je recule légèrement et je tape une fois à la porte du sas, en espérant que ma mère l'entende et qu'elle vienne voir ce qu'il se passe. S'il vivait avec sa femme, il est très probable qu'il est été contaminé.

"C'est une bien triste nouvelle, je tape une nouvelle fois, je n'imagine même pas à quel point cela dû être dur de l'emmener jusqu'au centre des derniers soins en se disant que vous ne pourriez jamais la revoir.
- Je n'ai pas pu m'y résoudre...
- Rassurez-moi, quelqu'un l'a emmené pour vous, vous connaissez les conséquences si ce n'est pas le cas !"

Je ne me sens pas en sécurité face à lui, j'ai la vague impression que cette discussion va m'emmener sur un terrain que je ne souhaite pas pratiquer, une fois de plus, je redonne un coup un peu plus fort dans la porte, je dois à tout prix me sortir de cette situation.

"Je ne voulais pa qu'elle meurt dans cette maison de fou, entouré de gens qui perdent leurs bras, leurs yeux... Vous imaginez, à quel point cela aurait été dur pour elle de se dire qu'elle allait bientôt ressembler à tous ses monstres, elle qui avait été si douce avec nous, je ne voulais pas savoir qu'elle allait mourir dans ces conditions... Et puis peut-être qu'il y avait un espoir que je la sauve, après tout, on ne sait pas s'ils meurent vraiment quand ils sont envoyés là-bas !

- Depuis quand est-elle morte ?
- Cela va faire presque 4 jours."

Le calcul est très rapide dans ma tête, il est malade depuis au moins 6 jours, il est contaminé et il est même contagieux. Je le regarde de la tête au pied, putain d'insouciance... Ma mère aurait vu directement qu'il ne portait pas de combinaison, elle n'aurait même pas ouvert le sas, elle, au moins, elle se serait un peu méfiée de ce qu'il pouvait se passer dehors. Mon regard fini par s'arrêter sur sa veste, je remarque que sous le tissu, quelque chose semble bouger. Subitement, un énorme ver sort de sa veste, il se dirige d'ailleurs contre moi. Je donne un ultime coup contre la porte, espérant que celui-ci sera tellement violent que ma mère ne pourra que l'entendre. Je lève en même temps le pieds pour le maintenir loin de moi, il a l'air de délirer, il tente d'attraper plusieurs fois mon pied et fini par y arriver, cela l'empêche de tomber mais son corps est trop faible pour le supporter, son bras s'arrache et tombe sur le sol, sa veste, ne pouvant plus tenir sur ses épaules, se met à pendouiller dans son dos et je peux apercevoir l'intérieur de son corps, je me sens mal mais je lutte pour ne pas tomber dans les pommes, si je tombe, je ne pourrais pas m'en sortir. Finalement, il regarde son bras sur le sol et relève le regard vers moi avant de me dire :

"Cela ne fait pas si mal que cela n'y parait..."

J'essaye de le taper sans succès, je ne veux vraiment pas qu'il me touche, si c'est le cas, je n'aurais plus aucune chance d'être saine. À travers la fenêtre du sas, je vois le visage de ma mère apparaître, je n'arrive pas à lire ce qu'il se passe sur son visage, je ne sais pas si elle a peur, ou si elle va me tuer dès que j'aurais réussi à m'en sortir. Je sais que je vais me faire lourdement réprimander dès que je me serais sorti de ce pétrin.

Brusquement le silence se fait, je n'entends plus l'homme se débattre autour de moi, j'ai l'impression que j'ai réussi à me sauver dans cette situation assez compliquée, mais je sens brusquement une chose très lourde me tomber dessus, la main du facteur s'accroche à mon bras, et par la douleur que je ressens, je comprends que ses ongles sont en train de s'enfoncer dans ma peau, je pousse un hurlement qui couvre les bruits de son corps s'écrasant sur le sol et le sas finit par s'ouvrir.

À travers la fenêtre du sas, je vois le visage de ma mère apparaître, je n'arrive pas à lire ce qu'il se passe sur son visage, je ne sais pas si elle a peur, ou si elle va me tuer dès que j'aurais réussi à m'en sortir. Je soulève le t-shirt qui couvrait légèrement ma peau pour laisser apparaître des griffures, celles-ci me brûlent et je remarque que des morceaux sont encore coincés dedans. Je tente de ne pas vomir en enlevant les ongles et les restes de doigts qui sont encore imbriqué dedans.

Le sas se met en marche, j'attrape un masque à oxygène et le bloque sur mon nez. Durant les 5 prochaines minutes, le sas va vider complètement la pièce de son oxygène et va me priver, ainsi que le ver, de la respiration. Je me rapproche des sorties d'air et plaque la blessure contre l'une d'elles afin qu'elle soit proche de l'aspiration et je ferme les yeux.

Souffle d'espoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant