J'étais dans une salle de bain. Je portais un marcel déchiré sur un kilt et des bottes cloutées avec des collants en résille à motifs géométriques. J'avais les mains écarlates, du maquillage outrancier, une crête iroquoise jaune citron, des stretchs et des piercings aux oreilles, des brassards en cuir et des chaînettes en toc. Je tirai la langue — une langue percée — en faisant le signe V de la victoire pour me prendre en selfie. La photo chuta sur le carrelage immaculé. Rewind. Rewind. Le rêve reboota. Cette fois, je me retrouvais dans une cave envahie par des statuettes du Bouddha disposées en enfilade. Quatre d'entre elles étaient à taille humaine, assises en tailleur, chacune dans un coin. Il y avait un homme ligoté sur le sol humide. Je ressentis une sensation familière, la vague impression qu'on se connaissait, cependant, je ne distinguais pas correctement ses traits. Une plaie s'étoilait sur sa tempe, un coquard gonflait son œil gauche ; sa bouche fendue, ses joues tuméfiées. Je balançai furieusement mon pied dans ses côtes. Il gémit en tentant de se protéger. J'attrapai une des petites statuettes et l'écrasai contre son crâne à plusieurs reprises. Je continuai à frapper. Entre mes accès de rage, je perçus le bruit de ses os qui se broyaient sous mes doigts. Je relâchai le Bouddha qui se fendit en deux. Son sang se répandit sous mes pieds. L'homme était méconnaissable.
Mes yeux s'ouvrirent tranquillement, sans sursaut, j'étais recroquevillé contre mon coussin. Je respirais normalement. Lorsqu'il se produisait un phénomène inexplicable, celui-ci prenait forme dans mon esprit pour que je le dessine. Je me levai du lit et m'installai devant mon chevalet dissimulé derrière la penderie — de peur qu'on me prenne pour un fou, je peignais en catimini dans ma chambre. J'esquissai un autoportrait que je peaufinai jusqu'au petit matin. Un trou me difformait.
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Parmi la multitude des toiles
RomanceC'est l'histoire de Léo qui a un gros crush sur Muyzu. Ils ne se connaissent pas. Pas encore. Il cherche à comprendre. Et puis, tout est déjà là. Depuis le début, très certainement. Ils cherchent toujours. *** "Parmi la série de peintures, il y e...