chapitre 10

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Le district de Stohess était bien trop calme, à peine réveillé, tandis que l'armée opérait déjà en son sein dans la plus grande ignorance des civils.

Les Brigades Spéciales n'avaient pas manqué de réunir un grand nombre de soldats autour du transport d'Eren jusqu'à la capitale. Du moins, le transport de ce qu'ils pensaient être Eren, mais n'était en réalité que Jean affublé d'une perruque. Ces idiots avaient passé tellement de temps à rêver de mettre la main sur lui qu'ils en avaient oublié de retenir son visage. Le vrai Eren, pendant ce temps-là, n'était flanqué que de ses deux meilleurs amis pour un maximum de discrétion. Les Brigades Spéciales étaient aussi persuadées que les seuls membres du Bataillon présents dans le cortège étaient le commandant Erwin et le capitaine Levi ainsi que quelques soldats supplémentaires - et personne ne songerait à lever la tête pour remarquer que les toits en étaient remplis.

Installée en hauteur comme le voulait le plan, Meira se redressa pour voir ce qu'il se passait dans la rue d'en dessous. Armin avait réussi à interpeler cette fameuse Annie et à la convaincre de le suivre pour ce qu'elle devait croire être la mission de sauvetage d'Eren. Pour l'amener à utiliser le passage souterrain, il avait prétexté avoir besoin d'un membre des Brigades Spéciales pour les couvrir jusqu'à quitter le district sains et saufs, rappelant au passage la solidarité dont ils se devaient de faire preuve entre recrues de la 104e brigade.

Meira suivit le quatuor des yeux jusqu'à ce qu'il disparaisse dans la rue suivante, aussi inquiète que frustrée de ne pas pouvoir abattre la coupable maintenant. Elle avait pourtant encore du mal à croire que cette simple adolescente de moins d'un mètre soixante était responsable du massacre de son escouade. Les traits durs de son visage et ses cheveux blonds correspondaient en tout point à l'apparence du Titan Féminin, mais savoir qu'une gamine avait causé tant de dégâts restait perturbant, assez pour laisser une part de déni même dans le cœur de l'une de ses victimes.

Aux côtés de son escouade du jour, Meira se déplaça avec discrétion le long du toit pour assister à l'évolution du plan. Les jeunes étaient postés devant le passage souterrain, au milieu des escaliers qui y menaient, mais Annie n'avait pas descendu une seule marche. Nerveuse, la brune regretta de ne pas pouvoir se tenir plus près et entendre la conversation. Quelque chose clochait et pour le moment, les seuls à deux doigts de se retrouver piégés sous terre étaient le trio de Shiganshina. Meira perçut néanmoins le soudain éclat de rire de la blonde, un rire des plus ironiques qui résonna avec désespoir dans la rue déserte.

Elle avait compris.

Les soldats en première ligne, qui ne devaient intervenir que lorsqu'elle serait engagée dans le passage, se jetèrent sur Annie dès qu'elle amorça un geste pour se transformer. Dans l'ombre des escaliers, Mikasa ôta sa cape et dégaina ses épées, mais c'était trop tard.

Un éclair orangé tendu entre le sol et le ciel illumina le district, suivi par le boucan assourdissant de la transformation. Bientôt, il ne resta de la dizaine de soldats situés trop près de la cible que des éclaboussures de sang et des membres éparpillés sur les pavés de la grande rue détruite. Meira se releva et, sans prêter attention à ses camarades, changea de toit à l'aide de ses grappins. Le Titan Féminin se trouvait juste là, plus imposant encore qu'il ne l'avait été au milieu de la forêt d'arbres géants. Il faisait tâche au milieu des habitations élégantes de Stohess et même le son de ses pas ne pouvait cacher les cris de terreur des malheureux civils.

— Anson ! s'écria le chef d'escouade en la rattrapant. Tu dois rester à ta place !

— C'est pas mon genre. Et, ajouta Meira en se retournant, au cas où vous auriez pas remarqué, on passe au plan B.

— J'en ai rien à faire ! Tu dois obéir à mes-

Loin d'être d'humeur patiente en cette journée spéciale qui partait déjà en vrille, elle ne lui laissa pas le temps de finir et saisit fermement son collègue par le col de sa veste. Le soldat écarquilla les yeux en se retrouvant face au visage abimé de la femme. L'hématome étalé sur sa moitié gauche était passé du bleu à une teinte jaunâtre et aucune des entailles couvrant sa peau n'avait eu le temps de cicatriser depuis sa dernière altercation avec Annie. Ce qui perturba le plus le pauvre homme, cependant, fut le regard plein de colère qu'elle posa sur lui - une attitude à l'opposé de la soldate d'élite bienveillante que tous connaissaient de loin.

𝗛𝗢𝗟𝗗 𝗠𝗘 𝗗𝗢𝗪𝗡 ; levi ackermanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant