Chapitre X 🍋

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La cohabitation avec le Seigneur Thorkell était compliquée. Je prenais grand soin de ne pas lui adresser la parole, mais il ne l'entendait pas de cette oreille. Il cherchait continuellement mon attention, et cela en devenait presque agaçant. Malgré mon envie de l'envoyer paître une bonne fois pour toutes, je devais garder à l'esprit la différence hiérarchique entre nous. Il était mon Seigneur.

- Bonsoir, dit-il en s'installant à la table de la cuisine.

Je ne répondis rien, comme à chaque fois qu'il cherchait à me parler. D'ordinaire, il se désintéressait, mais pas cette fois.

- Tu commences à m'agacer, grogna-t-il. C'était juste une petite blague. Personne n'est mort !
- Ce n'était pas une blague, Seigneur Thorkell. Vous avez cherché à m'humilier en me prenant par les sentiments. Vous saviez que j'avais envie de monter à cheval et vous en avez profité. C'est très bas, pour un Seigneur de votre rang, de m'attaquer en traître.

Il fronça les sourcils, et je vis que cette fois, j'avais touché un point sensible. Ses poings se serrèrent fortement, je pus voir ses phalanges blanchir. S'il y a bien une chose qui le mettait en rogne, c'est qu'on lui parle de son honneur de guerrier bafoué.

- C'était une blague ! Combien de fois faut-il que je le répète ?!

Il se leva de table et s'éloigna rapidement vers sa chambre.

- Ah, les femmes ! râla-t-il en claquant la porte. Toujours pareil !

Sa frustration ne me touchais pas. Je ne parvenais pas à avoir ce genre d'empathie. Plaisanterie ou non, il m'avait mise en danger. Cet épisode, ajouté à celui de la gifle. Non décidément, je ne pouvais pas le tolérer.
Et puis, cela m'importait pas. Car j'avais entendu les guerriers dirent qu'Askeladd serait bientôt de retour avec le reste de la troupe. À cette pensée, je pouvais sentir un fourmillement dans mon ventre et dans mes jambes. J'étais plus qu'impatiente de le revoir.

Je dus patienter encore plusieurs jours avant qu'enfin, les éclaireurs reviennent de leur promenade pour annoncer qu'un navire avait été aperçu au large. D'ici deux heures, il serait là. Malgré moi, je me surpris à peigner mes cheveux plus soigneusement que d'habitude, et à porter le corset qui galbait ma poitrine.

Lorsque je le vis enfin, il ne me remarqua pas tout de suite. Plutôt que chercher à me mêler à la foule, je me tenais à l'écart, appuyée contre la porte de l'écurie. Il traversa le village à cheval, saluant les guerriers heureux de le revoir. Il approcha et mis pied à terre. Aussitôt, Thorfinn et moi nous sommes avancés afin de récupérer son cheval et aller le débarrasser de son harnachement. Askeladd me vit enfin et un sourire sournois se dessina sur ses lèvres. Il me détailla en s'attardant sur ma poitrine, et je me sentis soudain gênée d'avoir autant soigné mon apparence.
- Merci, ma beauté, souffla-t-il en me tendant les rênes. Je te rejoindrais dans ma chambre tout à l'heure.
Mes joues rosirent à cette promesse, tandis que je m'éloignais en menant le cheval.

- C'est lunaire, dit Thorfinn qui curait les sabots de l'équidé. Tu as vu comment il t'as regardée ? Il voulait te déshabiller sur place. Lunaire !
- Parle moins fort ! j'ai ris tandis que je brossais la robe grise du cheval. Je ne voudrais pas qu'on nous entende...
- Crois-moi, après le numéro de gentlemen qu'il vient de te faire, c'est officiel, toute la troupe est au courant que tu es sa nouvelle maîtresse.
Cette pensée ne m'importunait pas autant qu'elle aurait dû. Quelque part, je n'avais que faire de ce que les gens pouvaient penser de ma liaison. Il n'était pas rare que des filles de mon âge se rapprochent d'hommes plus âgés. Et puis, Askeladd n'était pas non plus un vieillard, c'était un guerrier dans la force de l'âge.

Le soir même, tout le monde, même les esclaves, étaient conviés à un banquet donné en l'honneur du retour des guerriers. Ils étaient partis en repérage et rapportaient avec eux de la nourriture et d'autres trésors.
- Buvons, mes amis, lança Thorkell en levant sa corne. Ça nous tiendra chaud d'ici la fin de l'hiver !
Le banquet était très animé, et les deux seigneurs s'efforçaient de participer à un maximum de conversations. Ils savaient l'importance de maintenir le moral des troupes au plus haut.

THE FANFICTION - VINLAND SAGA x O/COù les histoires vivent. Découvrez maintenant