Ta sœur est MORTE

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L'enfer, ce n'est pas la même chose pour tout le monde. Pour Emma, c'était son collège et plus généralement, sa vie. Ainsi que tous ses professeurs, et tous les autres collégiens.

Chaque jour était une torture, chaque pas un enfer, chaque cours la faisait se briser un peu plus, chaque parole à son adresse était un supplice sans nom.

Emma souffrait, trop, mais personne ne semblait s'en rendre compte, ni ses camarades qui se moquaient d'elle, ni ses professeurs qui lui disaient « Bougez vous un peu Mlle Larson, vous êtes molle, si vous continuez ainsi vous n'aurez pas votre brevet ! ».

De plus elle ne comptait pas sur sa mère, celle-ci n'ayant déjà rien vu avant que sa sœur ne se suicide. Elle se doutait bien qu'elle ne verrait rien de son « petit » mal être.

Emma avait eut des amis, avant le drame, avant que Flore ne quitte le monde des vivants, avant, ils étaient une famille normale, heureuse, et pleine de joie, et elle était une petite fille normale, rigolote et adorant les autres.

Elle se souvenait de quand sa sœur avait commencé a dépérir, elle venait d'entrer en seconde, et elle s'était retrouvé dans une classe sans aucun de ses amis, de plus, son copain l'avait quitté en la trompant, et elle l'avait très mal vécu, surtout quand ce dernier avait commencé a la harceler en raison de sa couleur de peau, elle s'était pris un bon nombre d'injures raciste et sexiste et cela l'avait brisée. Comme c'était en train de briser Emma.

Emma se souvenait aussi de la lettre, celle que Flore avait écrite avant sa mort, elle en connaissait chaque mot vu le nombre de fois qu'elle avait passer à la relire.

Ma chère Emma, ma petite sœur,

Si tu lis cette lettre, c'est que j'ai réussi à me tuer, et que je ne suis plus en vie. C'est étrange de se dire que cette lettre me survivra...

Je suis tellement désolée de te faire ça ma chérie, ma sœur, mon cœur... tu as été la seule à essayer de m'aider. Mais je n'en peux plus, je suis fatiguée, je suis malheureuse et de n'est pas de ta faute.

J'ai prévu de me tuer, demain, lorsque je serai (enfin pour toi lorsque j'étais) avec mes amis, enfin ceux qui sont censés l'être, bref je ne vais pas t'embêter avec tout ça, j'ai donné un code à Laure et lorsqu'elle te pensera prête elle te le donnera.

Je suis en train de pleurer Emma chérie, je m'en veux tellement pour la douleur que je vais te causer, je sais que tu vas me détester et tu auras bien raison, c'est ignoble de te faire tant de mal, mais je ne peux m'empêcher de t'écrire cette lettre.

Tu es la seule à qui j'en ai écrite une, les autres n'en méritent pas, sauf Laure, et elle en aura une dès que j'aurais fini d'écrire la tienne.

Je t'aime ma Emma, de tout mon cœur, et si tu savais à quel point je m'en veux de te faire ça...

Ma chère sœur... je suis tellement désolée... tellement navrée...

Ma petite Emma, sache que si tout ça s'est produit, ce n'est pas ta faute, tu n'y es pour rien, tu as essayé de m'aider, du haut de tes dix ans, et grâce à toi j'ai tenu, aussi longtemps que j'ai pu. Mais je n'en peux plus des insultes, des moqueries et du reste.

Je t'aimerais toujours ma petite sœur, de tout mon cœur, de toute mon âme, de tout mon être.

Je t'aime, maintenant et pour toujours.

Essaye d'être heureuse, vis ta vie, ne prêtes pas attention aux moqueries, ni à tout le reste.

Je t'aime.

Ta sœur qui est profondément désolée,

Flore

Lorsqu'elle avait lu cette lettre, Emma en avait voulu à Flore, puis à ses parents, puis aux gens qui avaient été méchant avec sa sœur. Puis, les larmes étaient arrivées, et durant une semaine, elles ne s'étaient pas taries. Pendant une semaine elle avait refusé de manger, elle voulait rejoindre sa sœur, mais elle avait fini par remanger, de toutes petites quantités, mais elle avait mangé.

Pendant de longs mois, elle mangeait peu, très peu, elle était déjà fine, mais elle avait perdu plus de dix kilo.

Ses yeux s'étaient ternis, ses cernes s'étaient creusées, son entrain avait disparu, et elle ne l'avait jamais retrouvé.

Elle avait failli redoubler, et était passé en sixième de justesse. Souvent elle se disait qu'elle aurait préféré redoubler, car tout ce qui avait suivi son entrée en sixième l'avait brisée plus encore.

Emma avait désormais un an de moins que Flore lorsqu'elle était morte. Comme celle ci, elle devenait la proie, celle de prédateur terrible, les moqueurs, les harceleurs et leurs armes étaient redoutables, à coup d'injures, de rires et de moqueries, ils brisaient,  et leurs coups, loins d'être moins douloureux que les blessures physiques, poussaient Emma à se blesser elle-même.

Chaque injure finissait par se retrouver, gravé sur le bras d'Emma. Chaque méchanceté rentrait dans son cœur comme un pique aiguisé. Elle souffrait, beaucoup, et avait de plus en plus envie de rejoindre sa chère Flore.

Mais elle résistait, encore un peu, juste un tout petit peu. Pour se prouver qu'elle en était capable.

Pourtant, chaque jour était pire que le précédent, les insultes fusaient, les rires également et la jeune fille en pouvait de moins en moins.

La joie d'Emma était partie, il y avait des années, quatre. Disparue dans les eaux sombre de la Seine, envolée, partie, en même temps que sa Flore.

Emma n'arrivait pas a se reconstruire, elle n'arrivait pas à atteindre la dernière phase du deuil. Elle ne VOULAIT pas accepter, elle ne voulait pas continuer à vivre sans sa sœur.

Flore lui manquait, terriblement.

Récré, ce mot n'était pas synonyme de délivrance pour la jeune fille. Bien au contraire. Il était bien plus synonyme de mort, de malheur, de douleur...

Elle sortit de sa classe, en trainant des pieds, ne voulant pas sortir car sachant ce qui l'attendait, ou plutôt ceux qui l'attendaient...

Cela ne manqua pas, ils étaient là, tous. Adossés au mur, attendant que leurs proie préférée daigne se montrer.

« Eh la voila !

- Emma ! Tu nous a manqué !!

- Eh ! Essayes pas de fuir ! On a même pas commencé à jouer. Tu vas pas t'en aller comme ça ?! Tu vas pas nous faire ça ?!

- Alors ? Tu penses encore à ta sœur ? Mais elle est MORTE ! Tu arrives à te rentrer ça dans la tête ? MORTE !

- Je... arrêtez, laissez moi...

- Même pas en rêve Emma, tu peux toujours courir. »

Soudain, ils se rapprochèrent, l'entourant, l'insultant...

Emma senti les larmes lui venir aux yeux. Elle en bouscula un, et couru se réfugier dans les toilettes, pleurant et ressassant leurs paroles.

« Ta sœur est MORTE ! Tu arrives à te rentrer ça dans la tête ? MORTE ! »

Et les larmes redoublèrent. Le mot « morte » résonnant dans tous les coins de sa tête.

Soudain, elle sentit son téléphone vibrer. Un message s'afficha : « Si on te trouve, T morte. Tu va payée pour ce que ta fait. »

Si Emma n'avait pas été paralysée par le contenu du message, elle aurait rit de l'écriture pleine de fautes. Mais elle en était incapable. Elle savait ce qu'ils pouvaient lui faire et elle avait le pressentiment qu'ils allaient passer à l'étape supérieure et cela la terrorisait.

Pourquoi moi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant