Adieu monde

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Emma était allongée sur le sol de sa chambre. Les yeux brillants et dans le vague, elle venait d'achever la cinquième lecture du journal de Flore, et celui-ci la faisait pleurer à chaudes larmes.

Elle finit par se relever, pleurant silencieusement. Elle décida de partir au parc non loin de chez elle afin de se changer les idées et de quitter cette chambre à l'allure morbide. Cela la ressourçait souvent de marcher le plus vite possible, pourtant elle sentait dans son ventre un pressentiment qui lui ordonnait de ne pas sortir.

Lorsqu'elle sortit, la neige tombait, le sol était plein d'eau, car la neige ne tenait pas. Elle se dirigea vers le parc, les mains bien au chaud dans ses poches et le visage encore constellé de larmes translucides.

Elle ne souriait pas, contrairement à ceux qui se promenaient en ce vingt-deux. Ses yeux étaient pleins de larmes, et ses jambes tremblaient de plus en plus fort, la faisant trébucher à chaque petit pas.

Trop de révélations avait été faites en cette journée, et Emma se sentait extrêmement triste de n'avoir pas vu l'état dans lequel sa sœur avait plongé et surtout de n'avoir pas su la sauver.

En moins de deux mois, Flore était passé de la jeune fille joyeuse qu'Emma connaissait, à une tombe, celle d'une jeune fille morte trop tôt et de son plein grès suite à des attaques constantes envers sa personne.

Les gens étaient heureux, plus que deux jours avant le réveillon de Noël, tous couraient en tout sens afin de finir leurs courses et leurs paquets. Emma quand à elle, n'était absolument pas de cette humeur festive, quoi de plus normal lorsque vous venez d'apprendre les raisons de la mort de votre sœur et de comprendre toute sa souffrance.

En entrant dans le parc, elle eut un mauvais pressentiment, elle se sentit oppressée... mais elle continua sa route, en silence.


Il ne lui fallut pas longtemps pour se rendre compte que son pressentiment était fondé.

Au détour d'un virage, elle vit une dizaine de silhouettes. Elle retint son souffle, espérant encore se tromper. Mais ce n'était pas le cas, c'était bien les mêmes personnes qui la faisait souffrir depuis quatre ans qui se tenait devant elle.

« - Eh les gars, regardez qui voila !

- Mais c'est Emma, tu nous suis ou quoi ?

- Oh non pas elle, elle commence a me faire chier cette fille.

- Encore ? Mais elle est chiante !

- Bon qu'est ce que tu fous dans NOTRE parc, tu sais pas que t'as pas le droit d'y aller, tu pourri notre air sale singe. Dégage on veut pas de toi.

- Dégage de là, a moins que tu veuilles qu'on le fasse nous-même. On s'en ferait un plaisir! »

Emma se sentit prise d'une envie de rébellion, elle voulut changer, faire en sorte que cela stoppe. Alors, elle dit calmement.

« - Je sais que vous ne m'aimez pas, mais c'est un endroit publique. En plus, si vous continuez, je porterais plainte pour coup et blessures répétées, je suis très sérieuse. Laissez moi passer je ne vous embêterais pas plus longtemps.

- Eh mais t'a fumé quoi ? Tu crois sérieusement qu'on va te laisser tranquille comme ça ? Ta famille a brisé la mienne Emma, TU m'as brisé... A cause de toi, je suis seul, et ma sœur va mal. C'est votre faute, vous avez brisé ma famille...

- Eh Sacha, ça va ? t'a l'air pas loin de vomir...

- C'est cette fille, elle me dégoûte...

- Tu sais quoi Sacha ? Aujourd'hui j'ai découvert les raisons de la mort de Flore, j'ai perdu ma sœur, mon meilleur ami m'a jeté comme une merde, m'a insulté, et a fait en sorte de me briser. Alors tu sais quoi, toi et ton petit groupe de crétins méchants, je vous emmerde. Je vais finir par mourir, et vous serez bien content, mais au nom de l'amitié de nos sœurs et de celle qui était la notre, laisse moi passer, juste cette fois. Ce sera ma dernière demande avant que tu ne sois débarrassé de moi à tout jamais. Parole d'honneur.

- On va pas la laisser, hein mec ? Eh Sacha... Tu... Tu pleures ?

- Oh putain, elle a fait pleurer Satch... Larson tu vas payer, on va te faire crever, t'as fait du mal a Sacha, on va te défoncer. »

La fille qui venaient de parler, Jeanne, attrapa Emma par le bras, et lui mit une gifle, pas très violente, mais qui permettait à Emma de se rendre compte que ce jour là, elle ne pourrait pas fuir, qu'elle était coincée.

Les autres s'approchèrent, et la frappèrent, leurs forces étant différentes, ils se relayaient, et la jeune fille n'en souffrait que plus.

Quand ils la lâchèrent, elle n'était plus vraiment humaine. On aurait dit un tas de vêtements plein de sang, pas une jeune fille de quatorze ans. De plus son cœur était mort, son esprit avait été déconnecté, Emma était partie très loin.

Elle rentra chez elle, les armes coulant sur son visage meurtri. Les passants qui la croisaient détournaient le regard, évitant de voir la souffrance de la jeune adolescente.

Elle se coucha, sur le lit de Flore, pleurant a chaude larmes.

Les coups n'avaient jamais été aussi brutaux. C'était la fin. C'était fini. Elle avait atteint le maximum de violence que son corps pouvait subir.

Elle s'approcha du bureau, et attrapa un paquet de feuilles. Sept exactement.

Assise, comme une âme en peine, elle écrivit, plus de vingts lettres, a la police, a sa mère, a Sacha, a Laure, et a tous ceux qui avaient cautionné, de près ou de loin, aux violences qu'elle avait subies.

Elle pris ensuite le journal de Flore, ainsi que les photos. Puis elle les mit dans le boite.

Ensuite, elle attrapa son propre journal, et écrivit une conclusion.


Je ne suis sans doute plus a l'heure ou quelqu'un lit ces lignes. Je ne vit plus, ne respire plus, n'existe plus... Depuis cinq ans. Il y a cinq ans, ma grande sœur adorée est morte. Mon meilleur ami m'a quitté car sa sœur souffrait de la mort de la mienne.

On m'a souvent dit d'être forte, et j'ai fait tout mon possible. Mais j'ai atteint le maximum. Je suis incapable d'aller plus loin. Ces lignes sont sûrement les dernières de ma vie. D'ici une heure, je ne vivrais plus. Je vais rejoindre ma sœur.

Malheureusement, contrairement a elle, je ne manquerais a personne. Je n'a personne qui pensera a moi avec un pincement au cœur. Cela me rend extrêmement triste de savoir qui personne ne se souviendra de moi, ou e tout cas pas en bien.

Si qui que ce soit lis ces lignes, c'est que je suis morte.

Je te dis adieu monde, tu ne m'auras rien apporté de bien.

Dès demain, ce sera Noël, même si il est actuellement deux heures du matin, je peux dire que c'est demain.

J'ai peur, tellement peur. Mais c'est la fin de ma vie. cinq ans après la mort de ma chère Flore.

Je part enfin, libre de tout, je me sens enfin prête à rejoindre ma sœur chérie. J'arrive Flore, attends moi s'il te plaît, je te rejoins.

Adieu cher monde, apporte un peu de joie à d'autre, donne à d'autre la chance que je n'ai pas eu, donne leur le bonheur que je ne connaîtrai jamais.


Elle avait fini. Plus rien ne la rattachait au monde désormais, elle avait accompli sa dernière mission. Elle fit une dernière fois le tour de son appartement, gravant chaque pièce dans son esprit, observant tous ces recoins où elle avait passé toute sa courte vie. Elle se regarda dans le miroir, et pour la première fois depuis cinq ans, elle se trouva belle.

Elle alla ensuite chercher les médicaments, prête à se laisser partir. Puis elle s'allongea, pour la dernière fois, dans le lit de Flore, celui qui l'accueillait depuis tout ce temps.

Elle les enfourna, et se sentit partir, un fin sourire sur ses lèvres blêmes. Adieu monde.

Pourquoi moi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant