Chapitre 14

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Attablée près des machines à café, je déguste mon troisième cappuccino de la journée, tout en essayant de terminer mon dossier de candidature pour une mobilité à l'international. J'ai toujours rêvé de faire un semestre à l'étranger. Non pas que je n'ai jamais voyagé, bien au contraire. Avec mes parents, j'ai déjà visité plus d'une quinzaine de pays : le Canada, l'Argentine, la Chine, la Nouvelle Zélande... En revanche, je n'ai jamais eu l'occasion de m'aventurer en Europe. Alors depuis petite, je rêve du jour où j'irai faire une balade romantique sous la Tour Eiffel, où je me promènerai en contemplant les vestiges du Parthénon et de l'Acropole, ou encore où j'irai déguster un Fish and Chips en haut du London Eye. Après tout, j'ai la chance d'avoir les moyens de voyager, alors pourquoi m'en priver ? En plus de ça, un séjour à l'autre bout du monde peut donner bonne impression auprès de potentiels recruteurs : ça montre que tu es ouvert d'esprit, curieux, que tu t'adaptes facilement, et surtout, que tu as un bagage linguistique intéressant. Je remplis donc ma liste de vœux de capitales et métropoles européennes, afin d'espérer obtenir au moins l'une d'entre elles lors de l'étape de sélection.

- Mad, faut que je te parle, m'interrompt Jay s'accoudant à la table haute sur laquelle je suis installée.

Mon sang ne fait qu'un tour. Que me veut-il ? A-t-il appris pour Faith et moi ? Il semble agité. Pour quelle raison est-il comme ça ? A tous les coups, John a lâché le morceau. Ou alors c'est Faith qui, culpabilisant comme à son habitude, a fini par lui avouer notre petite liaison, et il veut désormais en découdre avec moi... Ça y est, j'suis fichue.

- Ça fait longtemps qu'on est amis, pas vrai ? me demande-t-il solennellement.

Ça commence mal.

- Et je sais que tu t'es aussi beaucoup rapprochée de Faith.

Effectivement. C'est même un euphémisme.

- Je voulais savoir...

Mon cœur se met à battre la chamade. Il sait ce qu'il s'est passé, c'est sûr. Il va sûrement me mettre une grosse droite au beau milieu de la cafétéria, et je n'aurai ainsi plus d'ami, et plus de nez non plus. Quoi que, malgré son côté colérique et sa gestion approximative des émotions, je ne sais pas si Jay serait capable de frapper une fille...

- Est-ce que tu penses qu'elle envisage un truc sérieux avec moi ?

Sa question me sort de mes pensées.

- Pardon ? demandé-je, histoire d'être sûre d'avoir bien entendu.

- Ça va, je sais que vous êtes copines et que tu veux pas trahir son amitié. C'est tout à ton honneur ! pense t-il comprendre ma réaction. Mais j'veux pas espérer quoi que ce soit si c'est pour qu'elle me la mette à l'envers, encore une fois.

Il semble sincèrement inquiet. En même temps, comment ne pas le comprendre ? Faith lui a quand même planté un sacré couteau dans le dos quand elle est partie en Italie. Et encore, s'il n'y avait que ça... D'un autre côté, ce qu'il ne sait pas ne peut pas le peiner.

- Franchement Jay, je peux pas t'aider, le coupé-je pour essayer d'écourter cette conversation qui m'est plutôt dangereuse.

- Attends, dit-il en m'attrapant le bras pour m'empêcher de partir. S'il te plait, j'ai vraiment besoin de ton aide, me supplie t-il avec un regard de chien battu que je ne lui connais pas. J'ai quelques galères en ce moment, alors j'ai besoin de m'assurer que j'vais pas en avoir d'autres si je nous redonne une chance.

Il me ferait presque de la peine, mais je ne peux pas me permettre de lui avouer quelque chose qui me desservirait.

- Tu fais chier Jay, j'peux rien faire pour toi, le remballé-je à contre cœur, ayant tout de même quelques scrupules à l'idée de lui cacher la vérité.

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