xv.

20 3 1
                                    

Le silence des arbres malades et la chaleur du soleil absent me font frissonner. Comme à chaque mois d'Octobre, mes doigts se glacent puis prennent place dans mes poches, mon nez rougit puis se réchauffe quand je rentre chez moi, ma gorge est enrouée puis elle s'apaise quand je bois du miel.

Je n'aime même pas le miel.

Mes yeux verts comme les maigres plantes qui restent, et bleus comme la pluie qui m'agace, ainsi que marrons comme les branches de peupliers rouillés. Mes joues rosées par le froid du sol humide et du vent qui fouette constamment mon visage clair. Mes bras frissonnants d'automne pluvieux. Mon corps engourdi, mes poils redressés, mes cheveux congelés.

Et mes lèvres gercées.

Le trajet jusqu'à l'école où mes yeux pleurent de froid est insupportable. Les bus rouge et bleu qui passent une fois sur deux m'exaspèrent dès le matin. Les trottoirs sales me font regretter la campagne. Les gens désagréables qui me bousculent pour passer, à huit heures à peine, m'agacent.

Et ils ne s'excusent même pas.

La musique dans mes oreilles et le nez dans mon écharpe à carreaux me réconfortent. Mon manteau noir et beige me réchauffe. Mes mains dans mes poches pour les protéger du froid et mes lunettes qui glissent sur mon nez. Mes pieds qui piquent et la buée qui se crée sur mes verres.

Elle m'obstrue la vue.

L'attente devant le portail pour garder ma musique pendant plus longtemps, et les surveillants qui nous disent de rentrer même si l'on a pas envie. L'unique grande flaque d'eau juste à côté du trottoir, et les voitures qui roulent dedans. Le chat de rue gris que les gens caressent le matin et que, moi, j'évite.

Je n'aime pas vraiment les chats.

La sonnerie plus qu'agaçante qui m'indique que je dois aller en cours, et les couloirs bondés et bruyants à à peine huit heures trente. Les élèves qui me bousculent et ceux qui marchent lentement me tapent sur le système. Lundi, début des cours, début de la semaine, déjà exaspéré.

En plus je commence avec les sciences.

Biologie, physique et technologie s'enchaînent. Le mardi je commence par anglais et le mercredi par les mathématiques. Deux en plus, sinon ce n'est pas drôle. Le jeudi je débute par grec et puis j'ai anglais. Et le vendredi j'ai maths, français, anglais et histoire. Quatre heures de cours, fin de ma semaine.

Une longue semaine.

Marchant toute la journée, mon pied droit me fait mal. Cassé, la faute à pas de chance. En cours de sport bien sûr, sinon où pourrais-je me blesser ? La fin de journée, quand tout le monde se presse pour sortir en premier comme s'il y avait le feu. Une fois dehors, les odeurs de la ville et le bruit du monde actif me font mal à la tête.

Je n'aime pas les odeurs et les bruits forts.

De la marche, encore et encore. Le bus qui passe juste devant moi alors que j'arrive tout juste à l'arrêt. Le conducteur qui me sourit et qui ferme les portes alors qu'il m'a vu. Bon sang, je vais vraiment m'énerver ! Ça m'arrive au moins une fois par semaine. J'ai l'impression qu'ils trouvent ça amusant.

Les conducteurs de bus ne m'aiment pas. C'est réciproque.

Enfin arrivé dans ma rue qui monte, évidemment . C'est raide, c'est chiant, c'est long. J'arrive enfin devant ma porte d'entrée. Je rentre et je monte poser mes affaires. J'enlève mes chaussures et mon manteau. Je descends pour vider le lave-vaisselle, je sors les vêtements clairs du sèche-linge, je les plis et les range.

C'est agréable le linge chaud.

Après avoir terminé, je remonte dans ma chambre pour faire mes devoirs. Flemme de la fin de journée, je m'allonge sur mon lit et commence à lire un livre, toujours de la musique dans les oreilles. Je me perds, je plonge, je me noie. Le livre maire et le temps passe à toute vitesse. 18h30 mes parents rentrent.

C'est tard.

À peine arrivés, ils me disputent de ne pas avoir fait à manger. Ça m'énerve mais je ne réponds pas. Il ne vaut mieux pas. Alors je monte pour éteindre ma lumière puis je vais faire à manger avec ma mère. Elle me laisse faire que les trucs chiants et longs. Elle râle - encore - que je ne suis pas assez rapide.

Je ne sais pas cuisiner aussi !

Je mets la table, ma soeur rentre, on mange. Je retourne dans ma chambre, fait mes devoirs, me prépare pour aller dormir et vais me coucher à 21h. Je ne dors pas directement, j'allume ma lampe torche et commence à lire tranquillement. 22h mes parents montent dans leur chambre, j'éteint à toute vitesse.

Il ne faut pas que je me fasse prendre !

Minuit, je ne dors toujours pas. Aucunement car je lis ou car j'ai des écrans. Seulement les insomnies récurrentes qui me rendent visite tous les soirs. Je suis complètement crevé mais le sommeil ne vient pas. Une heure, deux heures, trois heures... Trois heures trente du matin, je m'endors enfin.

Pour me lever à sept heure vingt.

Le lendemain, mardi, rebelote. Je me lève (fatigué), je me prépare, je pars, la ville m'agace, les gens aussi, le bruit pareil. J'ai mal à la tête. La routine, que c'est ennuyeux (et chiant). Toujours les mêmes semaines, les mêmes jours et les mêmes cours. Toujours la même chose, continuellement dans nos vies intéressantes.

Vivement que ça se termine.

NyktóviaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant