Chapitre 8 ~ Rendez-vous fatidique

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PLAYLIST :
Aretha Franklin- You send me

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Je sors du cabinet d'Hervé, nous venons de finaliser les papiers. Il attend un appel important concernant la dette familiale. En attendant, nous décidons d'aller déjeuner dans le restaurant du coin. C'est une maisonnette faite de pierre, très provençale. Des fleurs se trouvent sur les fenêtres et la terrasse est couverte de verdure. L'odeur des roses me rappelle les macarons que je mangeais en rentrant de l'école. J'ai toujours aimé être ici, mais j'avais eu ce besoin de m'éloigner et de me construire seule.

Hervé me fit un signe de m'asseoir sur la chaise en bois et décidons de prendre un viande rouge et ses légumes. La serveuse lui tend la carte mais ce dernier refuse.

"Je vous en prie, choisissez. Je pense que vous êtes bien meilleure connaisseuse que moi."

J'aimais bien le respect que Hervé me portait. Je risquais d'y prendre goût. Je cède et prends la carte des vins. Je glisse rapidement mes yeux sur mon favori.

"On va prendre une bouteille de Saint-Émilion."

La serveuse prend congé.

"Vous devez repartir prochainement si je comprends bien ?" Entame Hervé.

"En effet, j'ai des fournisseurs à rencontrer. Je songe à agrandir la propriété... et faire une activité."

"Il faudrait que je vous présente le maire alors!"

Je me rappelle soudainement de ce que Valeria disait hier soir. Elle n'appréciait pas le maire... je me demande si elle avait grossi le portrait du fait de son amertume à son égard ou s'il était réellement un magouilleur.

"Cela peut se faire en effet. Peut-être avant que je ne parte pour New York ?" Proposais-je.

J'allais voir si cet homme avait les yeux plus gros que le ventre.

"Il y a une soirée organisée par la famille Ménessi. Cette soirée réunit tout le gratin. Le maire y sera assurément. Si vous le voulez bien je peux demander à ma secrétaire Lara de vous transmettre une invitation. L'événement a lieu demain."

J'accepte sans négocier. Le souvenir de cet homme au charisme déconcertant était en train de me contaminer jusqu'au plus profond de mes veines. Si je pouvais venir accompagnée d'Hervé à ce genre d'événement, cela m'éviterait d'être dans une position de vulnérabilité. Le début de soirée était trépidant, la fin m'avait laissé un froid glacial.

La serveuse nous distribue les plats et le vin. La viande saignante légèrement poivrée s'imprègne du vin rouge. C'est succulent. J'ai toujours adoré le vin de Bordeaux pour son tanin. Il a un côté âpre tel une fine couche restant en bouche.

"Je me régale! Vous avez bien choisi Madame Derwin!"

Son téléphone sonne. Il a gardé la sonnerie pour s'assurer de ne pas manquer l'appel concernant mon problème de dette. Il a l'air dépité face à son portable. Il a eu le temps de toucher qu'à quelques bouchées de sa viande et je sais qu'il regrette d'être aussi professionnel. Je prends une gorgée pour cacher mon sourire face à sa frustration.

"Je vous prie de m'excuser."

J'acquiesce. Je continue à déguster ce festin car je sais que tout sera froid quand il reviendra. De plus, il y a de fortes chances que je perde l'appétit quand je connaîtrai mon fameux créancier.

"Alors..." Hervé tire sur le col de sa chemise comme si l'air lui manquait. Je glisse mes couverts sur le côté. "Je sais qui est la personne à qui vos parents devaient de l'argent."

J'étais sceptique. Pourquoi faire ? Après tout peut-être qu'il était préférable que je n'échange pas avec lui le temps de me décider si je voulais acquérir l'ensemble de la succession.

"Je vais y réfléchir."

"Réfléchissez vite car vous êtes attendue vendredi au Logotha pour 20:00"

"Je vous demande pardon ? Ça arrive souvent à vos clients d'être conviés par le créancier ? Enfin je veux dire j'ai l'impression d'être convoquée."

"Absolument pas... mais écoutez, j'ai eu des difficultés à remonter jusqu'à cet homme... je vous conseille de ne pas trop en faire des vôtres... après tout, c'est vous qui êtes en position de faiblesse."

J'étais sidérée par la remarque mais je ne pouvais pas contredire les faits pour autant.

Le repas prend fin. Lara, la secrétaire d'Hervé, me transfère alors l'heure et l'adresse des Ménessi. Je saisis le numéro de Valeria.

"Bonjour ! Bien remise ?"

Je rigole à l'écoute de son timbre de voix, rocailleux.

"Tu m'as prise pour une petite joueuse ? Heureusement que je m'en suis remise. Ça fait quelques jours que la soirée est passée."

"On dirait que tu as du gravat dans la gorge." Dis-je en plaisantant à moitié.

Je me promène dans l'allée du marché, nous sommes mercredi et le soleil tape pour cette fin d'après-midi. Je demande à une marchande quelques pommes rouges.

"Est-ce que tu es dispo pour une virée shopping ? J'ai besoin d'une robe pour la soirée de demain."

"Évidemment que je suis disponible ! Tu parles de shopping ! Je suis toujours disponible! D'ailleurs... si tu fais allusion à l'événement mondain qui a lieu, j'ai déjà ma liste de boutiques où nous devons nous rendre !"

Je remercie la vieille femme qui me glisse les pommes dans mon cabas et avance dans les rues fleuries de Provence.

"Je bois un café et j'arrive! Je t'envoie une adresse de suite et on se retrouve là-bas."

Une heure plus tard, je fais face à Valeria qui est resplendissante. Elle porte une jupe en jean et un haut à bretelle couvert de dentelle aussi rouge que mes pommes. Talons compensés aux pieds, je me demande bien comment elle fait pour condu ire aussi aisément avec une hauteur pareille.

Elle m'enlace et sautille.

"Allons-y !"

Elle me tire par le bras à l'intérieur de la première boutique.

"Tu aurais dû mettre des baskets si tu pensais faire un marathon", dis-je sur le ton de la plaisanterie.

Elle me lance un clin d'œil.

"Oh, mais je sais très bien courir avec des talons ! J'ai appris cela de ma mère quand elle devait courser mon père qui s'amusait à rentrer bien trop tard à la maison."

"Tu m'apprendras alors !"

"Bonjour, mesdames. N'hésitez pas si vous avez besoin d'un conseil."

Nous voilà face à trois jeunes femmes. Je les remercie de la tête et commence à arpenter le magasin.

"Minute papillon ! Je pense qu'il faut d'abord que tu me dises ce que tu veux porter pour demain."

"Je pensais opter pour le coup de cœur ?"

"Absolument pas, c'est le meilleur moyen pour revenir avec des cousins ou un lustre pour ton salon et sans robe en faisant ça. Je suis une femme, je connais nos plus grandes qualités mais surtout nos défauts. Pas de coup de cœur pour trouver TA robe, et puis de toute manière", elle me montre une sublime robe bustier d'une couleur dorée fendue sur le côté. "Comme ma mère le disait si bien, tu es jeune alors dans notre jargon, il n'y a que les coups d'un soir !"

Elle se retourne et claque des mains par trois fois.

"Mesdames, nous avons besoin de vous. Est-ce que vous avez d'autres merveilles comme celle-ci ? J'aimerais qu'elle ait une robe sans traîne, il faut un côté très sexy, si jamais vous nous proposez du noir et pour le reste, faites-vous plaisir !"

ABDIQUEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant