Bâton Rouge

Chapitre 1

JUNE

Un sourire effleure mes lèvres, le Mississippi s'étend sous mes yeux, fier, long, tumultueux et attirant. Je suis tellement heureuse de rentrer, de revenir là où je suis née. Deux ans , deux ans d'absence, mes amis m'ont manqué. Je vois défiler sous mes yeux Capitol Gardens, le Mémorial... enfin j'aperçois la piste. Dans quelques minutes je pourrais enfin respirer l'air cajun qui m'a tant manqué, l'air de Bâton Rouge.

Ma patience est mise à rude épreuve, je dois attendre mes bagages au milieu d'une foule hétéroclite de touristes et de gens pressés. J'attends devant le tapis qui avance une à une les valises. J'aperçois enfin mes sacs, les récupèrent et les posent sur le chariot que j'avais pris à ma descente de l'avion. L'habitude ! Je suis une voyageuse rompue aux aéroports et à l'attente.

Je me dirige enfin vers les portes et sors du terminal. Je ferme les yeux et hume cet air chaud et doux. Un cri me sort de ma torpeur et je suis tout à coup enserré par deux bras puissants qui me soulèvent. Priam est là, comme il me l'avait promis.

- Enfin , tu es là, tu es là !!

- Priam !

Je le sers dans mes bras et aperçois Izar à quelques pas. Je m'écarte de Priam et saute dans les bras de mon amie.

- Izar ! Tu m'as tellement manqué. Putain ! ça fait un bien fou d'être là. Comment allez-vous ? Où sont Annaïg et Hélios ?

- Ils nous attendent chez toi avec impatience. Tu es partie si longtemps.

- Je suis là maintenant.

Nous nous dirigeons vers la voiture, Priam dépose mes bagages dans le coffre et nous prenons la route. J'appréhende un peu de revoir la maison, tant de souvenirs heureux et tristes, tant de manques. Je chasse mes pensées tristes et profite du paysage. J'ai hâte de me promener dans ces rues, de sentir le vent dans mes cheveux aux abords du fleuve. J'aperçois les premières maisons du quartier. Beauregard ! J'adore cet endroit, un mélange de maisons créoles, shotguns et Queen Anne. Queen Anne comme la mienne. Blanche, grande avec ses façades asymétriques. J'adore ma maison avec ses tours et son grand porche qui courre tout autour de la bâtisse.

- June, On est arrivés.

Izar me sort de mes rêveries et je vois enfin la maison, belle et fièrement dressée. La voiture s'arrête à peine que j'ouvre la portière et me précipite dans les bras d'Hélios et Annaïg.

- June, enfin, Comment vas-tu ? Dit Hélios, ton voyage s'est bien passé ?

- Long, mais je suis enfin là.

- Tu m'as tellement manqué, me dit Annaïg en pressant mes mains.

Priam arrive derrière nous avec mes bagages. Je monte avec mes amis les quelques marches qui mènent au porche et pousse la porte. J'entre dans la maison, rien n'a changé. J'ai passé tant de temps à la mettre à mon image, un mélange d'anciens et de modernes. Je me dirige vers le salon et m'écroule sur le canapé. Mes amis m'entourent. Je sens Izar qui trépigne, elle a surement mille questions mais Priam a dû lui faire promettre de me laisser un peu d'air et de temps. Les 14 heures de vol m'ont effectivement éprouvés.

- Comment vas-tu alors ? Me demande-t-elle alors n'y tenant plus.

- Ça y est, tu as validé ton Master, la coupe Annaïg ?

- Oui ça a été dur mais j'ai enfin soutenue ma thèse.

- Et les anglais ? Pas trop .... anglais ?

Je ris, Izar n'a jamais compris mon départ pour Londres il y a deux ans. Elle m'en a longtemps voulu. Mais le King's Collège était pour moi la meilleure option, un bon établissement, un Master en Arts après mon Bachelor et surtout plus de 7000 kilomètres entre moi et mes souvenirs, trop dures à supporter après le drame de l'année de mes 20 ans.