Message

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Jamais un mal si grand ne s'abattit. 

Tu es venu avec moi, savoir la nouvelle ; tu me berçais, me rassurais, mais la nouvelle est tombée. J'ai échoué. On m'a désaffecté. Je suis limogé, perdu, détruit. Tout était fini alors que rien n'avait encore commencé. Tu me rassuras, tu me disculpas et tu m'assuras ta continuelle présence. Tu cherchais une solution à la nouvelle, mais il n'y en avait pas. Il n'y avait que la nouvelle, brute, infâme, là et pour toujours au fond de moi, avec toi. Tu te tus, c'était peut-être là la chose la plus intelligente que tu fis de toute la nuit ; je me réconfortai dans tes bras, sachant que le moment allait bientôt arriver, la Moisson allait venir, je serai récolté.

Tu m'invitas à fuir, à partir loin avec toi et c'est ce qu'on fit. Je t'attendis longuement et ensuite on partit, comme deux amants prêts à tout l'un pour l'autre, bercés des plus tendres illusions —en tout cas moi, je l'étais. Et une minute j'oubliai mes peines grâce à toi, oui, grâce à toi. Je te l'ai suffisamment dit mais je t'aimais. Je te parlai de notre destination : toujours plus loin, plus perdu —aussi perdu que ma vie désormais. Ils voulurent tous me rattraper, m'appeler, mais moi je ne voulus que subir avec toi et tu acceptas.

Mais l'on nous rattrapait, un bruit assourdissant s'abattit sur nous et je t'appelai à fuir, ce que tu fis. On s'enfuit, main dans la main, inséparable, un tendre couple parrainé par la Lune s'étalant dans la débauche. Je rigolai même à te voir ; tout sujet était sujet à blague et toute blague était un sujet. Je t'aime, je t'aime je répétais ; seul toi fais fuir mes maux. Et on fermait les yeux, le saule comme seul compagnon. Mais on partit à nouveau, toujours poursuivis, alors que tu haletais les passants mon bohème.

On finit par se réfugier quelque part et on s'enivra, sans trop réfléchir. On s'enivra et on s'enivra et je te voulais, de plus en plus je te voulais. On dansait, on buvait, mais tu partis.

Tu partis et moi j'étais derrière, bête. Tu étais à nouveau froid, comme la dernière fois, comme si la Nuit était passée et que l'Envie était morte, que je t'avais dégoûté. Tu t'endormis sans même que je le remarquai et quand je voulus te rejoindre tu me rejetas. Bref, je compris et je partis, aigri et pleurant. J'avais été de nombreuses fois incapable de prendre une action, faire un choix, mais moi je n'avais pas de courage et j'avais perdu toute Force depuis, tu le savais pourtant.

Mais ça, tu n'en avais rien à faire. Tu m'en voulais ! Tu m'en voulais ! Tu m'en voulais ! Soit ! Alors même qu'on me condamne tu veux m'achever. SOIT ! Qu'il en soit ainsi ! Cessons tout. Mourrons. La fenêtre est ouverte. Je me jetterai après ces mots. Adieu Amour et adieu vous autres, pâles soutiens, aides de pacotille face aux déplaisirs de la passion trahie ; vous ne méritez même pas un adieu. Non ! Moi je voulais m'élever ! Je le voulais, cet archange de mai. Mais il est parti, jamais il ne reviendra. Adieu ! À jamais ! Terre désolée où j'ai perdu les pieds ! Sautons désormais ! 

EnferOù les histoires vivent. Découvrez maintenant