Ne jamais s'oublier

Epilogue

Trois ans plus tard

— Veuillez tous applaudir le roi Dray d'Estyriam !

Tout comme le reste de l'assemblée, je me levai en tapant mes paumes l'une contre l'autre. Sourire aux lèvres, je regardai Dray s'incliner devant son peuple et les quelques représentantes mermailyainnes qui étaient présentes sur les lieux.

Son père était mort quelques semaines plus tôt. Une ballade sur la plage qui lui avait été fatale. Une crise cardiaque, apparemment. Je soupçonnais ma mère d'en être la cause.

A présent, Dray héritait du trône. Ce que j'attendais depuis trois ans était enfin arrivé.

Dray embrassa l'assemblée du regard, jusqu'à ce que ses billes grises se posent sur moi. Sa bouche s'entrouvrit légèrement, mais la joie qui étira les traits de son visage ne laissait aucun doute sur ses émotions. Il était heureux.

Sitôt qu'il eut descendu de l'estrade qu'il occupait, les personnages les plus importants d'Estyriam fondirent sur lui pour avoir le privilège de lui adresser la parole en premier. Je me tournai vers ma mère, sourcils froncés.

— On doit faire ça aussi ?

Cela ne me branchait pas vraiment de lui parler devant tant de monde.

— Toi, oui. C'est la première fois en trois ans que vous vous revoyez, gronda ma mère. Ne compte pas sur moi pour t'accompagner. Va lui présenter tes hommages, ou tout ce que tu veux d'autres, toute seule. J'irai plus tard.

Je soufflai, faisant s'envoler une mèche de cheveux qui s'était échappée de mon chignon.

— Lâcheuse.

L'ancienne reine de Mermailya pouffa de rire avant de se tourner vers une autre sirène pour entamer une discussion avec elle. Seule, je me dirigeai vers le nouveau dirigeant du pays voisin. Il était en train de saluer un noble de son peuple mais, dès qu'il entendit mes talons claquer sur le sol dans sa direction, il se tourna vers moi sans plus me lâcher des yeux.

Tel une reine qui se respectait, je tentai de ne pas fléchir ni sourire sous le poids de son regard de braise qui me détaillait. Ses pupilles m'examinèrent des pieds à la tête, avant de se fondre dans les miennes dès que je m'arrêtai devant lui.

— Reine Maeve.

— Roi Dray, le saluai-je avec cérémonie.

Je ne savais pas de quelle manière il désirait se comporter avec moi même si la façon dont il m'avait reluquée m'en donnait une petite idée. Il redressa ses épaules, comme si un poids invisible venait de disparaître.

— T'es venue, murmura-t-il.

Il semblait ne pas y croire. Je hochai la tête, bien que sa remarque n'amenait pas à confirmation.

— Bien sûr que oui. Je n'aurais loupé ton couronnement pour rien au monde.

Un léger sourire étira ses lèvres et il tendit l'une de ses mains en direction des miennes. J'agrippai mes doigts aux siens sans me soucier des regards posés sur nous.

— J'ai loupé le tien, me fit-il remarquer.

— Tu n'y étais même pas invité.

Il s'esclaffa, avant de reprendre bien vite son sérieux en voyant mon expression.

— Alors, tu vas encore trouver un prétexte qui nous empêcherait d'être ensemble ? lui demandai-je.

Son père était mort. Ma mère validait cette union. Nous étions tous les deux couronnés et libres de nos choix. Les relations entre nos peuples étaient au beau-fixe depuis des mois. Plus rien ne se dressait entre nous, désormais. Sauf s'il en décidait autrement.

— Non, répondit-il pour mon plus grand bonheur.

Une joie indescriptible s'empara de ma poitrine et je ne pus m'empêcher de sourire.

— Sauf si tu ne veux plus de moi, ajouta-t-il.

Je le dévisageai avant de rouler les yeux. Rapidement, je lançai une œillade à ma mère, qui acquiesça.

Alors, devant toute l'assemblée réunie, je posai mes lèvres sur les siennes sans cesser de sourire. Il ne fallut pas longtemps à Dray pour me rendre mon baiser. Je collai mon front contre le sien en me mordant la lèvre inférieure.

— Ma réponse est assez claire ?

Le sorcier hocha la tête.

— Je t'aime, Maeve.

— Je t'aime, Dray.

Et j'espérais bien que plus rien ne viendrait se mettre en travers de notre chemin.