Partie 42 - Le père.

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« Mes parents l'ont adopté peu après qu'on ait emménagé à Montpellier. »

Voilà, c'est dit. Il observa la réaction de Guillaume lorsqu'il dit ça et sans surprise, celui-ci haussa les sourcils d'étonnement.

« Donc Aurél... n'est pas réellement ton frère ? Il est adopté ?

— Oui. Mais je l'ai toujours considéré comme mon vrai petit frère. Même... peut-être plus que ce dernier, paradoxalement. Avec Aurélien... je n'étais pas un bon grand frère. Je le laissais toujours de côté, comme je t'ai dit. Alors quand Aurél est arrivé dans ma vie... j'ai voulu devenir un frère exemplaire. Me racheter en quelque sorte...

— Est-ce qu'il s'est toujours appelé comme ça ? Ou bien c'est tes parents qui...?

— Non, non, répondit Claude en le coupant avant qu'il ne finisse sa question, semblant comprendre cette dernière. Il s'appelait déjà comme ça. Comme un signe, tu vois. En fait, c'est mon père qui l'a rencontré en premier. En tant que médecin, un jour on lui a amené ce petit garçon à ausculter, tu vois. Et quand il est rentré à la maison, il était bouleversé. Il en a parlé à ma mère et les jours qui ont suivis, ils ont continué d'en reparler vu qu'il n'arrivait à penser à autre chose. Il disait qu'il ressemblait tellement à notre Aurélien physiquement que sur le coup il était resté comme paralysé. Il nous a expliqué que c'était un enfant que les policiers avaient trouvé dans un bois près de là où on vivait à Montpellier et même ça, ça lui faisait penser à mon frère. Alors imagine quand le policier lui a dit comment il s'appelait. Enfin bref, mon père est entré en contact avec le policier qui l'avait amené à son cabinet et il a appris qu'Aurélien allait être placé en famille d'accueil car son père venait d'être mis en prison par la police. À ce moment-là on le savait pas encore, mais si son père venait d'être arrêté c'était pour abus physiques et... autres... sur lui, dit Claude en lui lançant un regard hésitant et il fronça les sourcils, se demandant s'il avait bien compris ce qu'il avait voulu lui dire. Donc mes parents ont décidé de l'adopter et une semaine plus tard, on avait déjà le droit à une rencontre avec lui dans le centre où il restait en attendant d'être envoyé dans une famille d'accueil. Ou d'être adopté.

— Mais... sa mère dans tout ça ? Pourquoi il n'est pas allé vivre avec elle ?

— Le policier a dit à mon père que sa mère était morte quelques années auparavant. Apparemment... sous les coups de son mari. Je ne m'en souvenais plus, mais la dernière fois mon père m'a rappelé comment on a récupéré Aurél au début. Il était terrifié, tu sais. Il avait des bleus partout. Il ne parlait presque pas, on a eu beaucoup de mal à lui faire comprendre qu'il était désormais en sécurité avec nous. Qu'il risquait plus rien... J'en suis tombé fou à la seconde où je l'ai vu, Guillaume. Il me faisait tellement pensé à mon frère et j'ai immédiatement voulu le protéger plus que tout. Papa et maman ne m'ont jamais caché tout ce qu'il avait vécu avant d'atterrir chez nous, et je pense que ça a fortement participé au fait que j'avais envie d'être un bon grand frère pour lui. Il le méritait tellement. »

Guillaume hocha la tête doucement, pensif, et il déglutit difficilement en sentant son cœur battre la chamade dans sa poitrine en pensant à son frère. Aurélien était tout ce qu'il avait de plus cher au monde. Et c'est pour ça qu'il lui fallait le retrouver au plus vite.

« Où est-ce que tu crois qu'il puisse être ? demanda-t-il, la gorge nouée, et Guillaume lui jeta un regard interrogateur avant de pousser un petit soupir abattu.

— Je sais pas, mec. Mais ce qui est sûr, c'est qu'on va le retrouver. Je vais venir avec toi et on retournera toute la ville s'il le faut. »

Guillaume se leva et plongea sa main dans la poche de son jean pour en sortir son téléphone portable, semblant à la recherche de ses clés, puis soudain il le vit buguer en voyant ce dernier s'allumer.

« Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-il précipitamment, s'inquiétant de le voir buguer ainsi.

— J'ai un message de Matthieu qui parle d'Aurélien, attends. »répondit Guillaume en se rasseyant à ses côtés et il sentit son cœur battre la chamade en l'entendant dire ça.

Guillaume lut le message de son ami avant de se tourner vers lui, les sourcils froncés :

« Il dit qu'il l'a vu avec un homme qui avait l'âge d'être son père dans la rue et me demande pourquoi il sèche les cours comme moi.

— Un homme ? Attends, mais mon père avait un colloque à l'autre bout de la ville aujourd'hui, donc il a pas pu... »

Il se tut en pensant alors au vrai père d'Aurélien et il devint livide à ça, ce dont Guillaume dut se rendre compte car il le vit lui lancer un regard soucieux :

« Claude ?

— Y a... quelque chose d'autre que je ne t'ai pas dit... Si on est partis de Montpellier et que les parents ont décidé de revenir habiter ici... Je ne suis pas censé le savoir mais je les ai entendus en parler un soir avant qu'on s'en aille... C'est parce que le père d'Aurélien est sorti de prison. Ils avaient peur qu'il demande à récupérer son fils et gagne gain de cause malgré tout ce qu'il lui avait fait par le passé...

— Putain. J'ai failli te dire tout à l'heure que t'avais peut-être eu raison de refuser de nous dire la vérité, vu à quel point son passé a l'air sombre, mais en fait... le fait de pas être au courant, c'est ça qui l'a réellement mis en danger au final ! »

Guillaume semblait être en train de se mettre à paniquer et il le vit soudain regarder son téléphone de nouveau avant d'écarquiller les yeux :

« J'ai un message vocal, j'avais pas vu. Peut-être que c'est lui ? »

Il hocha la tête, le pressant d'appeler sa messagerie vocale pour savoir si oui ou non c'était Aurélien qui avait tenté de le joindre et Guillaume composa le numéro avant de mettre le haut parleur :

Guillaume ? entendit-il alors la voix de son petit frère appeler ce dernier et il fut infiniment soulagé d'entendre celle-ci. Je crois... que j'ai fait une bêtise... Y a un homme... qui dit être mon père. Mon vrai père. Je l'ai rencontré au cimetière en allant voir la tombe... Il sait des choses sur moi... il m'a montré des photos... Il voulait me montrer d'autres choses alors je l'ai accompagné jusque chez lui mais... il m'a servi un thé et maintenant je me sens mal. J'ai la tête qui tourne et j'ai du mal à garder les yeux ouverts. Je me suis enfermé dans la salle de bain en prétextant devoir aller aux toilettes mais... Guillaume, j'ai peur. Alors je sais... que peut-être tu ne m'aimes plus... parce que tu as compris que ce garçon que tu aimais avant ce n'était pas moi en réalité... et c'est pas grave, je comprends. Vraiment. Mais s'il te plaît, viens me chercher. J'ai peur, Guillaume. J'ai peur et j'ai besoin de toi. L'adresse... c'est 12 rue des Jonquilles, bâtiment B, troisième étage à gauche. J'avais retenu au cas où... S'il te plaît... viens me chercher...

Un bruit sourd se fit entendre de l'autre côté du combiné et il releva la tête pour jeter un regard paniqué à Guillaume qui avait les yeux écarquillés, rivés sur son portable :

« Quoi ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

— Il a dû s'évanouir à ce moment-là et son téléphone est tombé par terre. Y'a pas de temps à perdre, Claude. Bouge. »

Il entendit le Guillaume de six ans plus tôt lui crier ça comme dans un écho, lorsqu'il était resté figé alors que ce dernier cherchait son frère dans l'étang. Cette fois, il n'avait pas le droit de rester sans rien faire alors qu'Aurélien appelait à l'aide. Aurélien avait besoin d'eux et il comptait bien tout faire pour le sauver. Il avait promis de le protéger.

Fiction OrelxGringe - Le mystère qui t'entoure.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant