Entre nos blessures

Prologue

En préparant ses affaires à la dernière minute ce matin, Alexis Bourguignon se sent pressé par le temps. Il court d'un bout à l'autre de son appartement, se laisse glisser sur le parquet pour mieux freiner devant sa valise ouverte en grand sur son canapé dans laquelle il jette ses affaires au fur et à mesure. Un oeil toujours porté sur la box de sa télé qui affiche une heure dont il n'est pas certain de la justesse. Il souffle, râle, se maudit de ne pas s'y être pris hier soir déjà.

Sa petite amie, Mélanie, est assise en tailleur sur le fauteuil, toujours en pyjama, à fixer tristement cette malle qui se remplit progressivement. Elle craint le moment où il passera cette porte, redoute le silence qui s'en suivra car finalement, il n'y a rien de plus déprimant qu'une porte qui se ferme derrière une personne que l'on aime. Et ce quelque soit la durée de son absence.

En fourrant finalement sa trousse de toilette dans sa valise, le trompettiste ne peut s'empêcher de marquer un arrêt pour jeter un oeil à son écran plat. Ce dernier a été happé malgré lui et comme toujours par l'un des passages de son film préféré, celui qu'il partage avec son père et qui l'a ramené déjà tout petit à sa passion ; Le Chanteur de Jazz. Ce film a presque cent ans, est considéré comme le premier film parlant de l'histoire du cinéma. Mais rien à faire, Alexis reste toujours autant attaché à l'historie de Jackie, ce joueur et chanteur de jazz propulsé sur les scènes de Broadway. Il ne le regarde qu'en VO, et ce matin, en se réveillant il n'a pu s'empêcher de se préparer avec en bruit de fond son film de prédilection.

- Bon, je dois vraiment y aller maintenant, finissait-il par proclamer en fermant enfin sa valise.

- Tu as tout ? s'assura sa petite-amie en se levant.

- Il me semble oui, enfin j'espère ...

Il enfila son sac à dos et tira sa valise jusqu'à la porte d'entrée suivi de près par Mélanie. La jeun femme ne perdit pas une seconde de plus pour se jeter dans les bras de son petit-ami en tremblant. Alexis referma lentement ses bas autour d'elle tout en se demandant q'il avait bien pensé à prendre sa batterie externe.

- Je t'appelle quand on arrive, la rassurait-il en se souvenant qu'il avait effectivement rangé l'objet en premier dans sa pochette.

- S'il te plaît oui ...

Il recula d'un pas et embrassa rapidement sa petite-amie sur les lèvres sans rien ajouter. Il s'apprêta à sortir mais marqua un arrêt en entendant raisonner depuis son téléviseur la fameuse réplique « Wait a minute, wait a minute. You ain't heard nothin' yet ! ».

***

Un peu plus loin, dans un autre arrondissement de la ville, ce sont des préparations d'un tout ordre qui animent Jenifer Bartoli. D'un tout ordre, mais finalement pas si éloignées. Voir même identiques ...

Contrairement au musicien les affaires de la brune sont déjà prêtes et l'attendent dans l'entrée au pas de la porte qu'elle ne passera pas tout de suite. Elle peut donc terminer son café tranquillement en attendant le chauffeur qui devra l'emmener rejoindre son équipe. Le bruit de sa télé encore allumée la rassure, lui propose un bruit de fond dont elle ne saurait se passer à l'heure actuelle.

Elle trouve qu'il fait un peu frais n'ose pas quitter son gilet en maille tout en serrant sa tasse entre ses mains pour se réchauffer un peu plus.

Jenifer est assise dans le fauteuil qui siège sous la fenêtre de son séjour. Cette dernière donne sur la rue, ou plus exactement sur l'immeuble d'en face à première vue puisque la chanteuse habite au 3ème étage de son bâtiment.

Elle devrait penser à sa tournée qui débutera dans à peine quelques soirs, à cette nouvelle page de sa carrière qu'elle va entamer en montant dans ce bus d'ici quelques heures. Normalement les jours qui précèdent sa tournée sont ceux qui l'angoissent le plus tant elle reste focalisée sur ce q'elle s'apprête à revivre.