Équilibre ~ Link x Oc

Abandon

Link s'était laissé tombé en un dernier soupir dans la dune froide de sable, trempé de la tête aux pieds.

Il avait été rattrapé étonnement rapidement par les Yigas, comme si ils avaient prévu ce cas de figure où le Héros leur échappait.
Le prodige faisait pourtant de son mieux, ignorant comme il le pouvait la voix qui bombardait son esprit sans relâche :

« Tu viens d'abandonner ta camarade. Tu viens d'abandonner Aela. Dans le repaire Yiga. Et tu penses être digne du titre de Héros? »

Mais pire encore, la seule perspective de la perdre une deuxième fois l'affligeait comme aucun maux ne l'avait affligé.
Si il pensait de trop, il suspectait de ne meme plus réussir à aligner un pied devant l'autre.
Alors le jeune blond continuait à courir en boitant encore et encore, essayant de ne pas s'appuyer sur sa cheville en piteux état, la pluie qui se mêlait à ses larmes et cachait son expression de douleur.
Pourquoi la vie se devait-elle d'être douloureuse comme cela avec lui?
Une violente colère monta dans sa gorge en pensant au..stupide équilibre dont lui rabâchait sans cesse les oreilles Aela.

Link était la preuve vivante qu'il n'existait pas.

Il avait cette impression que les Déesses s'étaient amusées à s'écrire son destin un peu au hasard, tachant de voir jusqu'à où leur Héros pourrait aller sans devenir fou.
Malgré ce titre qui résonnait prétentieux à ses oreilles, il ne resterait et ne demeurait qu'un simple hylien qui avait eu la malchance de savoir correctement tenir une épée.

Alors que ses pensées franchement peu encourageantes accompagnait sa fuite, une fulgurante sensation aiguë traversa l'arrière tendon de son genoux.
Le jeune prodige se retourna, et quelle ne fut pas sa surprise de découvrir avec joie qu'une flèche venait de traverser de long en large son genou!
Puis une seconde s'écrasa dans le sable à côté de lui, puis une troisième.
Un rire amer se coinça dans sa gorge, activant ensuite le bouclier de Daruk pour éviter de se faire transpercer de part en part par des flèches acérées.

Évidemment avec sa jambe en mauvais point, il se faisait rattraper.

Ce fut lorsque sa troisième protection vola en éclat qu'il se passa une main sur les yeux, une horrible pensée qu'il regretta d'avoir formulée dans son esprit, mais qui était quand même là :

« Est-ce enfin fini? »

Personne ne l'aiderait.
Aela devait être en train de se faire massacrer par cette folle de Qir'Ha, probablement rongée par la haine que son amie ait aidé son fameux satané prodige à s'échapper. Il croyait en sa camarade, mais l'état dans lequel il l'avait laissé ne lui permettait pas de belles illusions.
Dame Zelda ne donnait plus signe de vie depuis fort longtemps, signe que toute son attention était retenue au château.
Depuis cent ans qu'elle luttait, elle semblait entrer dans sa dernière phase de ténacité. Impa le lui avait bien dit par ailleurs lors de son passage à Cocorico, huit voire neuf mois auparavant : elle tiendrait encore une année maximum, pas plus.

Une autre flèche le transperça brusquement, dans la main cette fois-ci.
Des cris de joies se rapprochèrent dangereusement de lui, tandis qu'il se laissa tomber à terre dans les dunes de sable mouillées.

On ne pourrait pas lui reprocher de ne pas avoir essayé de sauver Hyrule.

Et pourtant, sans même savoir pourquoi, le jeune hylien brandit devant lui l'épée de Légende, qui émettait les habituels chuchotements qui lui était devenu familier voire rassurant.
Au moins il ne mourrait pas vraiment seul.
Il réussit à trancher dans l'air une autre salve de flèches qui l'aurait directement atteint dans le front si ses excellents réflexes ne l'avait pas rattrapé.

Lui qui pensait avoir abandonné.

Puis la lueur dangereuse d'une serpe apparut brusquement dans son champ de vision, saisit par un Yiga visiblement bien en forme. Le Héros, bien qu'encore à genoux à terre, abattit sa lame sur son ennemi, qui s'écrasa quelques mètres plus loin, inerte. Il en fit de même pour un second, puis un troisième, puis une autre flèche vint se figer avec douleur dans son épaule qui tenait son arme.

Link fit l'erreur de regarder devant lui.
Plusieurs dizaines de Yiga déboulaient à une vitesse qui lui paraissait bien trop rapide.

Son heure semblait avoir sonnée.
Aucune magie d'Hylia ne pourrait le sauver de cette situation.

Toutefois, Link ferma les yeux en empoignant fermement de sa main valide la hampe de l'épée sacrée, rassemblant ses dernières énergies pour emporter avec lui quelques Yigas dans la tombe.
Le prodige réussit dans un premier temps ce projet, avant que la réalité ne le rattrape : quatre Yigas l'assaillirent de
tous les côtés, la serpe tendue vers sa nuque.

Alors que Link s'apprêtait à ressentir pour la première ce que cela faisait de se faire égorger, une puissante onde de choc fit trembler l'air alourdi par la pluie diluvienne.
Tous se figèrent, observant pendant moins d'une seconde l'épicentre de ce déferlement soudain.

L'arène.

Puis une onde noire se propagea à la vitesse du son dans l'air, tandis que Link brandissait devant lui par habitude son épée sacrée, qui se mit soudainement à briller d'une lueur non pas bleue mais blanche.

Le Héros ferma les yeux, prêt à accepter son châtiment.

Mais rien ne vint.

Entre deux respirations qui soulevaient anormalement fort son torse, il se permit d'entrouvrir un œil bleu, puis un deuxième.

Le visage constrict de surprise des Yigas qui l'entourait achevait de se désintégrer dans l'air en une nuée de particules noires, qu'il avait déjà vu une unique fois.

Dans l'amphithéâtre.

« Aela. » laissa échapper le jeune hylien en un dernier soupir avant qu'il ne sombre dans l'inconscience, sentant le contrecoup d'absolument tout le frapper de plein fouet.

Puis il tomba de tout son long dans la dune, le visage lavé par la tempête de pluie et ses cheveux blonds flottant autour de lui.