Chapitre 5 - Le mythe d'Elpis

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Énée ne parvenait pas à sortir l'image de Théa et Sylvan de son esprit. Ils n'étaient même pas assis à côté, comme la coutume le voulait. Elle était sa fiancée et il imaginait sans mal le rapprochement qui finirait par s'opérer, si cela ne s'était pas déjà fait. Pourquoi Sylvan ne lui avait-il pas parlé de la jeune femme ? Pourquoi avait-il omis de dire qu'il allait se marier ? Ils n'étaient peut-être plus amis, mais n'était-ce pas une chose que l'on partageait avec son associé ? Énée se souvenait encore des longues heures passées sur la plage, à rêver d'avenir. Combien de fois avait-il entendu Sylvan lui dire que jamais il n'épouserait une femme. Est-ce que toutes les promesses qu'il lui avait faites n'avait été que des mensonges ?

— Énée ! Faites attention où vous marchez, le prévint Pénélope.

Le jeune homme s'écarta juste à temps, avant que sa sandale ne s'enfonce dans du crottin et remercia l'esclave du regard alors qu'ils arrivaient sur le forum. L'après-midi, l'agitation était moins importante que lors des marchés matinaux. À cause de la chaleur, les habitants se repliaient à l'intérieur pour faire la sieste ou s'affairaient à d'autres activités. Certains s'enfermaient dans des temples, au frais, et seules quelques personnes parcouraient encore la ville, principalement des domestiques ou artisans. Pénélope et Énée remontèrent la rue des temples, jusqu'au musée de Curiosité. La façade colorée les accueillit, ainsi que les grandes marches s'ouvrant sur les portiques d'entrée. Énée prit une forte inspiration, prêt à retourner dans ce lieu qu'il aimait tant, mais qui lui rappelait aussi de mauvais souvenirs.

— Ça va aller ? demanda Pénélope.

— La dernière fois que je suis venu, les gardes du conservateur m'ont mis dehors.

— Pourquoi ? s'étonna-t-elle.

— Il a refusé de m'accorder le titre d'historien, alors j'ai insisté. J'ai postulé trois fois, j'ai envoyé des lettres, je suis venu et ...

— Vous l'avez harcelé ?

— Non, j'ai seulement montré mon intérêt et ma détermination, et ...

— Donc vous l'avez harcelé, confirma-t-elle. Pas étonnant qu'il vous ait mis dehors. Dois-je m'attendre à ce que nous soyons chassés ?

— Non, maugréa-t-il, je pense qu'ils m'ont oublié.

Cela lui coûtait de l'avouer, mais Énée était persuadé que le conservateur ne se souvenait même pas de lui, alors que lui se rappellerait toujours ses yeux noirs et de son doigt boudiné, tendu vers l'extérieur. Le jeune homme passa devant Pénélope et elle le suivit en remontant les marches jusqu'à l'entrée du musée. Deux hommes, vêtus de longues tuniques, gardaient les portiques. Énée baissa la tête en arrivant à proximité, dans la crainte que l'un d'eux le reconnaisse. Heureusement, plusieurs mois étant passée depuis sa dernière visite, personne ne lui fit de remarque. À l'intérieur, ils débouchèrent sur un immense hall au plafond décoré de fresques représentant la procession des Isthmathénée. Des sculptures habillaient la pièce et se yeux s'attardèrent un instant sur celle de deux enfants aux mains entrelacées, symbole de l'amour.

Énée fit signe à Pénélope de le suivre et ils s'enfoncèrent dans une première galerie. Le jeune homme connaissait le musée comme sa poche, pour y être venu des centaines de fois. Malgré sa forte envie d'aller faire un tour dans la galerie des sculptures – où il adorait contempler la bataille entre les cités du sud et la ligue -, le jeune homme la délaissa par respect pour Pénélope. Énée perdait vite la notion du temps lorsqu'il se trouvait ici. Il pouvait passer des heures à contempler les vestiges, avec la forte envie de les toucher pour lire en eux. Techniquement, il n'y avait pas droit sans une autorisation du conservateur, mais il lui était déjà arrivé d'en récupérer quelques-uns pour tester ses compétences.

Le collectionneur et l'historien [Romantasy Historique MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant