Prologue

411 29 24
                                    

Once Upon a December" - Song by Liz Calaway - (From The "Anastasia" Soundtrack)
https://spotify.link/x3uOcWL8PDb

━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━
31 Décembre 1799
━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━━

"Tic, Tac, Tic, Tac," chaque battement du pendule semblait s'entrelacer avec le rythme de son cœur, une élégie mélancolique qui jouait en harmonie avec sa tristesse. "Tic, Tac, Tic, Tac," semblable à une valse en si bémol, tout ton exprimait, tout son résonnait, son rôle, un souffle dans cette morne antienne. "Tic, Tac, Tic, Tac," il tentait de capturer les éclats de son bonheur brisé, mais ils se dérobaient, laissant derrière eux une mélodie tronquée.

Sous le voile diaphane de la nuit de décembre, une cantilène s'épanchait, une homophonie d'émotions gelées qui s'insinuait entre les parois de l'alcôve. L'atmosphère qui y régnait était saturée d'une moiteur nivale, imprégnant jusqu'au moindre recoin.

Le lit à baldaquin, saisi par le frimas, réminiscait des insomnies en clameurs de glas, sous le dais doré, des instants délaissés. Les toiles suspendues, sans émotion murées, à l'ombre profonde, paraissent fanées, dans leur retraite moribonde. Le miroir trumeau, sur la cheminée de marbre dressée, interceptait, dans ces reflets névrosés, les cadences noires des souvenirs sans espoir.

Près de la fenêtre en ogive givrée, les flocons de neige dévalaient du ciel figé ; nulle étoile ne luit, mais les dendrites glacées assumaient le relais dans l'obsidienne nocturne. Chacun d'eux, un cristal unique, trouvait repos en surface du rebord lithique.

Agenouillé sur le tapis d'Aubusson, les jambes en étau, il ressentait dans les plis du sol dur, son fardeau. Ses prunelles, hissées vers la sphère argentée, évoquaient une cacophonie d'émotions où des gemmes salines jaillissaient. Alors que ses doigts, dans un geste empreint de piété, se nouaient près de son menton élevé, il déclama à l'ovale opalin :

"Ô tendre lune, veillant dans la nuit profonde, percevez-vous une étincelle de vertu, là où le vice abonde ?
Une flamme ardente, à l'abri du malheur et de l'hostilité, défiant l'ombre, en toute éternité.
Ô chère lune, si cette clarté existe en vérité, dois-je entreprendre la quête, m'aventurer ?
Si découverte à mes pas se dévoile, trois secondes suffiront pour m'inonder, bonheur et amour en mon être s'ancrer."

Détonna-t-il sa complainte, pourtant fut-elle appréhendée ? Hélas, point de résonance, juste une dissonance. Seul, son monologue s'épanchait dans le néant, une décadence déclinant en mélisme, souffrant et lancinant. Ce n'est qu'aux confins des limites, exsangue de mots et de pleurs, qu'il prit sa décision, en-deçà de toute ardeur.

D'un geste prompt, sans délai, face à la fenêtre en arc brisé, il s'érigea ; sans hésiter, l'ouvrant à l'hiémal, il laissa pénétrer. Son manteau, humble guenille, en tourbillons folâtres voltigeait. Sa besace, gardienne du nécessaire, à son flanc oscillait. Son écharpe, rempart vaillant, autour de son cou résistait.

Sous oripeaux choisis, en habits pittoresques, il s'abaissait, étranger à ses titres noblesques. Déguisé, pourtant, une aura altière persistait, comme un fanal andante, son essence ne faiblissait.

Innovant, il fallait être pour saisir ces tonalités ; néanmoins, lorsqu'il manifesta la volonté d'avancer, des préludes on pouvait discerner. Le premier pas, en cantate incertaine, amorça l'archet d'une cadence soudaine. Le second pas, en septième mineure, défit le tacet, bravant sa propre terreur. Le troisième pas, en arpège sur le rebord, il césura, exsudant, d'un souffle à l'essor.

Dominant sa perspective, l'environnement en contrebas semblait dévorer toute parcelle de bravoure. Ses pupilles, noyées dans un triolet de peur, se rétractèrent, leur diamètre, en croches infimes, fut réduit.

À cette frontière déterminante, la retraite aurait pu s'annoncer ; par conséquent, il refusait le repli, voulant persévérer. Il s'installa en fuite dolente, ses membres en chancelle, oscillant dans le néant, icelle ; avec prévenance, il s'engagea, son souffle haletant, à la maçonnerie ; il s'accrocha vaillamment, descendant avec lourdeur, cherchant solidité sur les corniches.

Étape par étape, il s'écarta de la sérénade première, implorant la fin de cette composition dans la détresse amère. Ses mains endolories, son corps en peine, le rythme défiant, son âme timorée en arrière-leine.

La tension s'accroissait, son but en vue, touchera-t-il la terre, en manteau blanc, sans la moindre trace d'outrage ? Las, le destin moqueur, sournois, à la lisière du terme, lui réservait une douleur, son pied glissa, le précipitant dans l'abîme de l'erreur. Il déferla en descente, frappant la neige épaisse, sa chute brutale, marqua la fin de cette coda glaciale.

Gisait-il figé dans l'inertie, son haleine dévoilant sa présence dans l'aether fringal, la question persistante s'éveillait : en vie, se portait-il ? Bien plus de frayeur que de maux éprouvés, mais indemne, il ne s'est point sauvé.

Ses joues, par le blizzard effleurées, écarlates, cherchaient la chaleur, la flambée tant désirée. Ses mains, égratignées, pourpres et blessées, frémissaient dans l'algide réalité où la chaleur s'éteignait. Ses bras, engourdis, semblèrent en gelure éperdus, loin de l'ardeur, dans l'engourdissement confus. À travers vallons, dans sa chair, l'agonie s'insinuait ; immobile, la bise n'était plus ressentie.

Et lors, dans l'immensité des flocons glacés, il se tint solitaire, à leur gré abandonné, jusqu'au point où se produisit un fulgor singulier : le chagrin s'apaisa, les larmes se tarirent, et naquit un rire clair, tel un sonnet sans contrarie. On aurait pu le croire épris de démence ; mais dans l'apathie, plus rien n'avait d'importance.

Par foy, que n'eut-il point été surpris. Un moment d'égarement, dans cette immensité; puis l'hilarité s'éteignit, emportant sa gaieté. Pourtant, sur ses lèvres, un sourire demeurait. Malgré les engelures, il se leva, résigné.

De ceste manière naquit le caprice de sa destinée, vers le nord, dans la tempête hivernale, il s'en fut, laissant Belcastel en dédale. Espérait-il, ne plus jamais retrouver, ce château, vallée de l'Aveyron, à jamais mépriser.

Évanescent, le jouvenceau s'est éclipsé, en quête de la lumière convoitée ; Charles De Florimond, tel fut son nom.

Charles De Florimond : Quand Les Lettres S'enlacentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant