𝙿𝚛𝚘𝚕𝚘𝚐𝚞𝚎

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Москва [ Moscou ],
26 mars 2005

09h20.

Je tirais sur la culasse, de mes petites mains encore si innocente.

Maman était encore à l'intérieur. Je ne savais pas ce qui se passait. La seule chose que je comprenais, c'est que mon père était là. Après des mois qui m'avaient semblé être des années, il était revenu.

Tire, me dit-il en italien

J'avais appris l'italien. Papa m'avait toujours appris à avoir de grandes ambitions. Il voulait que je m'entoure des meilleurs enfants de la ville, que je maîtrise le plus de langues possibles, que je sois dans les meilleures écoles de Москва, mais je n'étais pas bête. Nous n'avions pas toujours eu cette vie. Papa travaillait beaucoup pour nous faire sortir maman et moi de notre ancienne vie, jusqu'à réussir à nous trouver cette maison ici.

Vas-y

Je fixai les cibles et posai le doigt sur la détente.

« Ne sois jamais pressée. Appuie quand tu es certaine, et jamais avant. C'est de cette façon qu'on devient bonne tireuse ».

Je coupais ma respiration et appuyais avant de me déplacer sur ma droite en abattant chaque cible les unes après les autres. Je sentais les douilles tombées sur mes pieds en mouvement. Mes pieds qui ne chaussaient encore que du 27.
   Je m'arrêtais au bout de la sixième cible abattu, fière de moi et me tournais vers mon père.
Je regardai l'homme qui à mon âge avait l'air de faire deux mètres. Ou peut-être plus. Il sourit puis plongea ses mains dans ses poches et s'approcha de moi. Je savais très bien que cela voulait dire que je n'avais pas tout bien fait.

Elle est où maman ? Demandais-je par réflexe

Elle arrive ma chérie

Je le regardais heureuse. On m'avait toujours dit à l'époque que lui et moi avions certaines ressemblances. Surtout dans le caractère. Nous étions tous les deux impitoyables, mais lui... lui, il était différent.
    Il me serra contre lui et me ramena en face de la première cible.

Quand je demande un travail parfait, je sais que je peux compter sur toi

Il nous rapprocha de la bible circulaire nous faisant alors écraser les restes de neige de cette fin d'hiver.

C'est parfait ma chérie

À l'époque, je ne me demandais pas encore pourquoi mon père et moi jouions à tirer sur des cibles étranges en plein froid, à neuf heures du matin. À l'époque, je ne savais même pas dire ce que mon père faisait exactement de sa vie. Je savais simplement qu'il avait rencontré ma mère ici, lors de ses études et qu'il travaillait maintenant dans son pays d'origine qui était aussi en somme le mien.

Regarde cette deuxième et cette troisième.

— Elles sont belles

Au lieu de dire que mes poupées - bien que j'en avais - étaient belles, je disais que mes balles étaient belles. Mais rien ne me choquait. J'aimais cette vie. J'adorais ce temps passé avec mon père.

Giuseppe Ferragni de qui je tenais mon nom était tout pour moi. J'étais sa princesse, il était mon roi.

Ces deux-là maintenant

CERBERE [ DARK ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant