Chapitre 3 - Sofia

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Le dernier jour de salon est signe de soirée de clôture. Toutes les sociétés présentes et quelques VIP triés sur le volet sont invités à participer à un cocktail grandiose.

Je suis heureuse d'y retrouver mon amie Rose.

— Alors ce salon ? me questionne-t-elle en engloutissant un canapé au saumon. On n'a même pas eu le temps de se voir !

— Comme tu le dis ! Mais ça veut dire que l'on n'a pas chômé et on est quand même là pour ça non ?

— Tu es toujours aussi rabat-joie !

— Que veux ? Business is Business. Je suis contente, on a eu pas mal de touches. Monsieur Demerlot est satisfait et je pense que ... je vais avoir une promotion !

— Sans déconner, c'est génial ça ! Tu le mérites c'est sûr.

— Je n'ai rien demandé, mais depuis le début du salon, il me fait beaucoup d'allusions sur mes compétences pas assez exploitées, lui expliqué-je en miment des guillemets avec mes doigts.

Rose m'enlace en guise de félicitations, quand soudain, on nous interpelle.

— Bonsoir mademoiselle Merino.

Rose détaille de la tête au pied l'homme qui avance vers nous tout en faisait une moue de poisson rouge. Je lui donne un grand coup dans les côtes pour la sortir de sa rêverie.

— Bonsoir. Je vous présente Rose, ma collègue, enfin ex-collège Rose Petrini. Rose, je te présente Gabriel Carter, le patron de LuxuryEvent.

Rose jubile et s'avance prestement vers Gabriel en lui tendant la main.

— Monsieur Carter, c'est un plaisir de vous rencontrer.

— Mademoiselle Petrini, le plaisir est partagé.

Je l'observe baiser la main de mon amie. Rose pourrait s'évanouir à tout moment.

— Ex-collègue ? J'en déduis que vous ne travaillez plus ensemble, demande Gabriel en fixant mon amie du regard.

— Effectivement, m'empressé-je de répondre.

Il est temps de reprendre le contrôle sur ces présentations qui sont en train de se transformer en speed dating.

— Rose travaille chez Cactus&Co, mon premier employeur.

— Je suis heureux de constater que votre amitié a su dépasser les limites de la concurrence.

Rose répond en gloussant qu'il n'y a jamais eu de concurrence entre elle et moi et qu'il n'y en aura jamais parce qu'elle m'estime bien trop pour ça. Je m'empourpre en entendant ces mots. C'est vrai qu'elle et moi formions une belle équipe, je regrette parfois d'être partie de cette agence.

— Alors, fêtons ces joyeuses retrouvailles, je vais nous chercher des verres, lance Gabriel en s'éloignant vers le bar.

— Oh my god, mais c'est qui cette bombe !

— Calme-toi Rose, ce n'est qu'un homme !

Mais face au regard réprobateur de mon amie, j'ajoute « OK il canon j'avoue ! »

Nous rions de bon cœur quand soudain, le regard de Rose s'assombrit. Voilà que se dirige vers nous, Gildas, mon ex-petit ami.

— Salut les filles ! Ça fait bizarre de vous voir ensemble ! Vous avez oublié de m'inviter à trinquer avec vous !

Toujours aussi arrogant celui-là dans son costume mal taillé et d'une couleur douteuse. Je me demande encore ce que j'ai bien pu lui trouver, il y a trois ans, quand j'ai accepté son rendez-vous dans un bar parisien miteux. Gildas est centré sur lui-même et menteur. Après quelques bribes de conversations sans importances, Rose ressent mon agacement et décide d'éloigner au plus vite le perturbateur. Le patron de Luxury Event revient alors avec ses trois coupes de champagne à la main.

— Ah ! Vous avez de nouveau perdu votre amie ? me questionne-t-il, amusé.

— Elle est partie voir son équipe. Il ne reste donc que moi.

— Je n'aurais pas espéré mieux, susurre-t-il en me tendant une flute et en trinquant avec la sienne.

Maintenant, c'est moi qui me sens toute chose. Cet homme dégage un magnétisme certain. J'imagine qu'il doit être redoutable en affaire et je profite de cette pensée pour changer de sujet de conversation et le questionner sur ses activités.

— Alors, est-ce que ce salon vous a ouvert de nouvelles opportunités ?

Son sourire est à la limite de l'insolence, mais il me répond avec politesse.

— Il est toujours intéressant de lier connaissance avec de nouvelles personnes. Les meilleures opportunités se font souvent par le biais de rencontres fortuites, vous ne pensez pas ?

— Rassurez-moi vous ne fonctionnez pas uniquement sur le hasard et la chance ? Ce genre d'événement se prépare.

— Vous avez entièrement raison Sofia, mais il faut aussi parfois savoir se laisser porter par le moment présent et ne pas calculer la suite, non ?

Depuis quand nos échanges avaient pris un ton plus amical au point qu'il se permette de m'appeler par mon prénom ? Ce n'était pas du tout mon genre de me laisser aussi facilement séduire, il n'était pas le premier à me faire les yeux doux pour m'amadouer et j'utilisais, moi-même, cette technique avec mes propres clients. S'il pensait me troubler aussi facilement, c'était mal me connaitre.

— Non, je ne suis pas d'accord avec vous ! Dans notre métier, il faut faire le maximum pour tout anticiper et se préparer au moindre couac.

— Êtes-vous une personne stressée ?

— Absolument pas ! Mais j'aime savoir où je vais.

— C'est tout à votre honneur. Et vous m'avez plutôt bien cerné, je ne compte pas uniquement sur la chance. Cela serait bien trop facile. La concentration, la préparation et le travail assidu sont les clés du succès. Je découvre que nous semblons avoir de nombreux points communs, conclut-il.

Intérieurement, je partage son point de vue. Il semble être un homme sérieux et travailleur, en tout cas ses résultats chez LuxuryEvent le prouvent. 

Je m'étais documentée pendant mes rares pauses : à 35 ans, il était à la tête de la première société d'événementiel du pays, certes hérité de son père, mais qui était en déclin et qu'il avait redressée au plus haut rang en moins de deux ans. Mais son air condescendant et supérieur ne faisait pas de lui un homme aussi sympathique qu'il voulait bien le faire croire.

— J'aimerais beaucoup passer le reste de la soirée avec vous Sofia, mais je vais devoir rejoindre mon équipe également.

— Oui bien sûr. Excusez-moi, j'ai accaparé votre temps.

— Absolument pas. C'était un plaisir d'échanger avec vous. Je pense que nous nous reverrons bientôt. Je vous souhaite une excellente soirée.

Et sur ces paroles, il s'éloigne d'un pas assuré vers un groupe de jeunes femmes, visiblement très impatientes de discuter avec lui.

Vraiment ? Ce mec est tellement sûr de son aura ! Les gens lui tournent autour comme des abeilles autour d'une ruche. C'est pathétique !

Business Strategy (En pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant