Chapitre 3

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Le ménage, ce n'est pas vraiment ma tasse de thé. Je le fais généralement par obligation, ou pour me changer les idées et éviter de penser, comme tout de suite. J'essaie de faire abstraction des plaintes incessantes de ma mère qui pense pouvoir encore diriger ma vie comme si j'avais cinq ans. Son envie de toujours vouloir tout contrôler devient toxique pour moi. Je me sens oppressée par toute cette pression qu'elle m'oblige à ressentir.

-Tu as un mois pour trouver un éditeur Anna, m'informe ma mère. Passé ce délai, tu commencera le travail en tant que comptable dans le cabinet du meilleur ami de ton père. Nous avons fait des pieds et des mains pour que tu intègres son entreprise, j'espère que tu feras honneur au service que nous te rendons.

Je soupire et continue de laver mon plan de travail déjà flambant neuf, mais j'ai besoin d'être occupé. Sinon, je ne suis pas sûre que je parviendrai à garder mon sang froid.

-J'espère que tu te rends compte que c'est une idée complètement stupide maman.
-Je te demande pardon ? S'ahurie-t-elle.
-J'ai toujours été nul en maths, je n'ai pas fait d'étude scientifique, je n'ai rien à faire en comptabilité. C'est absurde, je me ferai virer au bout d'une journée. Et quant à trouver un éditeur en moins d'un mois c'est presque mission impossible maman. Autant que je continue à me faire connaître sur les réseaux sociaux.
-Foutaise !

Je soupire et lui jette un regard froid qui en dit long sur ma façon de penser. Je pense qu'elle a été heureuse dans le passé, mais je ne sais pas ce qui s'est produit dans sa vie pour qu'elle ne devienne que méchanceté et antipathie. Pourtant, c'est bien ma mère qui a fait des pieds et des mains pour obtenir la garde de Rosie à la mort de ses parents. Elle avait treize ans, et moi cinq. Je pensais que c'était par pure bonté, mais c'était plus par loyauté envers ses parents. Parce que la vérité, c'est qu'ils se sont toujours plaints de Rosie et de son franc parler. Ils étaient pourtant bien content qu'elle soit assez grande et mature pour s'occuper de moi, comme ça, ça leur évitait de remplir leur rôle parental envers leur dernière fille.

C'est Rosie qui m'a élevé après la mort de ses parents. Pendant six ans, elle a été la maman dont j'avais terriblement besoin. Puis lorsque Rosie à eu dix-neuf ans, elle est tombée enceinte de Louise et mes parents l'ont mis à la porte. Je n'avais que onze ans, et j'avais perdue tous mes repères. J'ai été séparé d'elle durant deux ans environ, et c'est grâce à internet que nous nous sommes retrouvées. Je n'ai que neuf ans d'écart avec Rosie, mais elle est la sœur que j'ai toujours rêvé d'avoir, la mère que j'aurai dû avoir, et ma meilleure amie.

-Il serait temps que tu suives l'exemple d'Agathe et Adam, me suggère ma mère le plus normalement possible. Ils ont tous les deux des métiers respectables et envieux, ils se sont mariés, ont leur famille et leurs enfants.
-Je n'ai que vingt-quatre ans, je soupire dépitée alors que je lui tend sa tasse de thé, et moi mon café bien noire.
-Justement Anna, arrête d'écouter les conseils débiles de Rosie et écoute un peut plus ta mère qui a plus d'expérience qu'elle ! À ton âge tu devrais déjà avoir un homme dans ta vie et d'envisager l'engagement qu'est la famille !
-Les conseils débiles de Rosie ? Je répète en sentant la colère monter. Mais tu te rend compte des conneries que tu racontes au moins ? C'est elle qui m'a élevé, depuis mes cinq ans ! Et tu voudrais que je t'écoute et que j'ai confiance en toi ? Mais enfin, à part me critiquer et me juger en permanence, tu n'as rien d'une mère pour moi ! Ce n'est pas ça être maman, pas pour moi.

Harriette Perrot pince une nouvelle fois les lèvres, et comme à chaque fois que nous nous voyons toutes les deux, cela explose. Elle se lève, et se dirige vers la porte de mon appartement.

-Je te donne environ un mois Anna, me menace-t-elle. Passé la date, tu ne seras plus maîtresse de ton destin.

Puis elle claque la porte. De rage, j'envoie valser sa tasse encore remplit de thé. Mais pourquoi ? Qu'est-ce que j'ai bien pu faire pour être autant détesté de mes parents ? Et comment je suis censée trouver un éditeur en aussi peut de temps ? Je me met à douter de moi. Car même si j'adore le dessin, la peinture, qu'est-ce qui me fait croire que je suis douée dans ce domaine ?

Just breathOù les histoires vivent. Découvrez maintenant