Stiles ne faisait pas attention à grand-chose, pas même à ces vêtements gauchement mis qu'il portait malgré lui. Il avait les jambes flageolantes qui peinaient à le maintenir debout et sa main... Une autre, plus chaude, l'entourait. Elle la traînait à sa suite autant que faire se peut. Mais Stiles n'avait pas l'énergie de marcher, pas plus qu'il ne l'avait pas eue pour s'habiller... Alors pourquoi insistait-on pour le faire avancer ? Quoique ses pieds finirent par quitter le sol sans qu'il n'en réfléchisse à la raison, pas plus qu'il se pencha sur cette chaleur grandissante...
... Qui n'empêcha pas un froid certain de fouetter son visage.
Dehors, il faisait nuit et le vent soufflait fort. Il plaquait les cheveux humides de Stiles contre son visage, le forçait à plisser ses yeux trop secs. Il se savait habillé, mais ressentait l'air glacial passer sur son corps comme si celui-ci était encore nu. Ses bras se resserrèrent autour des épaules de Jackson, qui le portait sur son dos pour une raison qu'il ignorait. De toute façon, Stiles ne comprenait pas grand-chose... S'il commençait doucement à retrouver une part de sa lucidité, tout ce qu'il réussissait à intégrer, c'était que Scott était loin. Loin de lui. Loin des autres, aussi. Finalement, il ferma les yeux. La fatigue le prenait si soudainement...
Mais quelques instants plus tard, il les rouvrit en se sentant, comme... Atterrir. Il regarda autour de lui et laissa la stupéfaction l'envahir.
- Attache-toi.
Stiles tourna mollement la tête vers Jackson, dont la voix étonnamment basse le surprit tout autant. Est-ce qu'il agit comme à son habitude en l'envoyant balader, histoire de tout faire pour ne pas l'écouter ? Non. Il obéit religieusement à cette demande qui apparaissait comme un ordre. Un ordre venant d'un besoin primitif. Et même si ses gestes étaient particulièrement gauches, rendus quelque peu tremblants par la faiblesse généralisée de son corps, il l'exécuta du mieux qu'il le put. Assis à la place du conducteur, Jackson fit vrombir le moteur. Et s'il avait l'air étrangement assuré, la flamme vacillante dans son regard détruisait totalement l'image de l'adolescent extrêmement confiant qu'il s'était longuement construite. Ce soir, Jackson n'avait plus rien de Whittemore.
Tout comme Stiles n'avait plus rien de Stilinski.
Rien dans ce qui arrivait depuis le début de cette soirée n'avait de sens à ses yeux. Rien ne s'enchaînait correctement. Rien ne lui donnait l'impression que les choses pouvaient bien se terminer. A l'intérieur, il continuait d'avoir froid. Comment s'était-il retrouvé habillé, déjà ? Et Jackson ? N'était-il pas nu au départ, lui aussi ? Qu'est-ce qu'il faisait avec lui, d'ailleurs ? Ses questions lui venaient une à une, s'ajoutant aux précédentes qu'il sentait émerger graduellement. Son esprit se réveillait et ses mains immatérielles tentaient au mieux de dissiper ce brouillard infernal.
- On va où ? Réussit-il à articuler au bout d'un temps infini.
Ils roulaient depuis... Deux, peut-être cinq minutes. La conduite de Jackson était un peu nerveuse, sa trajectoire quelque peu hasardeuse... Mais ils avançaient.
- Je ne sais pas.
La réponse de Jackson, prononcée d'une voix aussi peu assurée que la sienne, devrait l'affoler tout autant que sa façon de conduire. A la place, il se contenta d'hocher très légèrement la tête et de s'installer un peu plus confortablement au fond du siège. C'était étrange comme il avait presque... L'impression que son corps se réveillait doucement, un peu comme sa tête. Ses membres lui paraissaient un peu moins lourds, un peu plus aisés à bouger... Mais ce qui lui sautait aux yeux, c'était cette envie qui, totalement éteinte par Scott, se rallumait un peu... Pour ne pas croître davantage. Elle stagnait. Stiles ne se sentait plus... Dirigé par cette libido complètement artificielle. Ses yeux, qui avaient perdu tout leur éclat, mirèrent le ciel nocturne de Beacon Hills. Il n'y voyait aucune étoile, comme si le velours de la nuit n'admettait pas la moindre source de lumière en cette soirée cauchemardesque.
- Je n'en ai plus... Envie, s'entendit-il penser à haute voix.
- Moi non plus, répondit Jackson du tac au tac sur un ton qu'il ne saurait interpréter.
Stiles tourna doucement la tête vers lui, mais refusa d'accrocher son regard – il n'y arriverait pas, même s'il essayait. Quelque chose en lui le bloquait.
- Pourquoi je... On...
Pourquoi on a fait tout ça ? Qu'est-ce qui nous est arrivé ?
- Je ne sais pas.
Ce soir, Jackson répondait la mâchoire serrée et l'air... Perdu, confus. Stiles se demanda un instant comment il arrivait à conduire, tout en sachant que lui-même n'en serait pas capable tant il sentait son corps faible et fébrile... Mais cette question s'envola aussi aisément qu'une plume l'aurait fait, emportée par une simple brise. Stiles lui-même se donnait l'impression de ne pas être assez fort, assez lourd pour résister à quelque coup de vent impromptu. L'habitacle me protège, réussit-il à se dire même si, au fond, cette réflexion n'avait pas le moindre sens. Cette soirée en avait-elle eu seulement un peu ? Stiles sentit ses paupières se fermer... Avant de s'en rendre véritablement compte et de les rouvrir brusquement. Je ne veux pas m'envoler. Hors de question pour lui de dormir, de quitter la tangibilité de son corps, de la terre ferme. Pour la première fois depuis des heures, il... Était lucide. Plus ou moins. Et il voulait en profiter, il en avait besoin. Retrouver l'impression qu'il avait le pouvoir sur son corps, sur ses pensées et ressentis... Il le fallait. Se posséder à nouveau. Être lui-même... Dans son entier.
Alors c'est consciemment qu'il souffla :
- La forêt... Viens, on va dans la forêt.
C'était quelque chose qui lui était venu naturellement et qu'il avait eu besoin de sortir. L'envie d'y aller, réelle, le poussait à ne pas se taire sur ce sujet. Par chance, Jackson ne lui refusa pas cette demande des plus incongrues et changea de direction. Avoir un cap précis lui allait. Il avait pris Stiles avec lui, démarré la voiture... Sans avoir aucune idée de là où il voulait aller. Ainsi, la demande de l'hyperactif tombait à pic. Quoiqu'elle n'avait rien de logique, rien de sécuritaire non plus... Mais à ce stade-là, le kanima n'en avait cure. Tant qu'ils s'éloignaient du loft, tant qu'ils n'y retournaient pas... Alors il cacha son manque d'assurance derrière un sérieux de façade. Même affaibli, il restait Jackson Whittemore, soucieux de préserver certaines apparences. Était-il seulement conscient de l'inutilité de sa précaution ? Aucune comédie que ce soit, aucun masque n'avait le pouvoir d'effacer les stigmates de ce qu'il avait vécu. Stiles, de son côté, n'essayait même pas. En avait-il seulement envie ? Jackson, oui... D'autant plus que son état lui permettait de tenter des choses, ce qui ne semblait pas être le cas de l'hyperactif. Un léger coup d'œil sur son passager lui permit de voir qu'il semblait véritablement épuisé... A raison. Jackson lui-même se trouvait fébrile, mais pas suffisamment pour que ce fait l'empêche de conduire.
Le jeune homme finit par arrêter la voiture aux abords de la forêt qui, à cette heure de la nuit, ne semblait pas des plus accueillante... Mais les deux garçons n'en avaient cure tant le besoin de sortir de l'habitacle de la voiture les prit rapidement. L'air frais leur fit du bien et Stiles, que Jackson aidait à marcher, sembla reprendre du poil de la bête – un peu. Son visage se fit légèrement moins blanc, ses yeux retrouvèrent un semblant de vie... Mais Jackson ne se sentit pas de le laisser marcher seul pour le moment – l'avait-il déjà connu aussi fébrile ? Alors que lui apporter de l'aide le répugnait en temps normal, il n'arrivait pas à se défaire de l'idée qu'il ne pouvait pas le lâcher. Pourquoi l'avoir d'ailleurs pris avec lui ? Pourquoi avoir ressenti l'étrange besoin de le faire sortir lui aussi de cet enfer ? En soi, il avait paralysé Scott, dont il ne réalisait pas encore consciemment l'horreur du comportement... Mais il aurait pu laisser Stiles, qui n'aurait plus eu à se soucier de l'alpha pendant un moment.
Or, il avait agi d'instinct, sans pouvoir se résoudre à l'abandonner... Et c'était là qu'il avait trouvé l'énergie d'agir, de partir avec lui. Concernant sa conduite quelque peu nerveuse, elle ne revêtait pas pour lui l'habit du miracle, plutôt le fruit d'une adrénaline certaine.
Et maintenant, les deux garçons avançaient sans trop savoir où ils allaient. Qu'importe, marcher leur faisait du bien et se retrouver à l'extérieur, dans une atmosphère silencieusement douce, leur permit de ne pas penser.
Juste de respirer, sans réellement réaliser ce qu'il s'était passé.
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L'union des corps (Stackson)
Fanfiction(Version Stackson) Un aphrodisiaque surpuissant égaré au milieu du loft va semer la zizanie au sein de la meute de Beacon Hills et mettre à nu chacun de ses membres pour le meilleur comme pour le pire. La soirée, tout d'abord catastrophiquement érot...