Chapitre cinquième

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Petit avant propos :

Je tiens à m'excuser pour ces quasi 4 mois d'absence sans vous donner de nouvelles. J'ai dû essayer de me concentrer sur mes études (je dis bien essayer, vu que je me retrouve de toute façon avec une seconde session) et j'ai eu quelques soucis d'ordre privé haha. Mais je suis là. Et je compte ne plus partir (sauf si vacances ou festival, bien évidement).

Voilà, je vous laisse donc avec le 5e chapitre du Voyage d'Hiver!

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       Après la lecture de ce roman, je me demandai, non sans appréhension, en quoi ces balles à blanc pourraient être plus inoffensives que des balles réelles. J'étais incapable de répondre et de savoir si j'aimais ce roman. Semblablement, je ne puis préciser si j'aimerais recevoir une fléchette de curare entre les deux yeux ou nager parmi les requins avec une blessure à la jambe.

       Je me concentrai sur les points positifs. Ainsi, j'avais ressenti un soulagement profond dans j'avais eu fini ce livre. Certes, j'avais souffert en le lisant, mais pas pour des raisons littéraires. J'appréciais par ailleurs qu'il n'y ai pas de photo de l'auteur sur la jaquette, en cette époque où l'on échappe de moins en moins à la bobine de l'écrivain en gros plan sur la couverture. Ce détail me réjouit d'autant plus que je connaissais le ravissant visage de Mademoiselle Malèze qui eût pu servir d'argument de vente. La notice ne disait pas l'âge de la romancière, pas plus qu'elle ne nous racontait qu'il s'agissait du talent le plus prometteur de sa génération. En foi de quoi, je pouvais conclure que ce bouquin ne manquait pas de qualités.

       Grâce à la rubrique "Du même auteur", j'appris que ce n'était pas son premier roman. Elle en avait déjà publié quatre : Sans anesthésie, In vivo, Effractions et Stade terminal. J'éprouvai le désespoir du chevalier qui, se croyant sorti victorieux de l'épreuve, découvre que la dame de ses pensées lui en impose quatre autres du même acabit.

       Je les commandai chez le libraire de mon quartier et j'attendis fiévreusement le prochain rendez-vous. Apporterais-je le livre à dédicacer? Etait-ci une bonne idée? Si j'étais écrivain, aimerais-je que d'aucuns se conduisent ainsi avec moi? Le prendrait-elle pour un geste déplacé, une familiarité, un empiètement sur sa vie privée? Je m'arrachais les cheveux sur ces questions d'étiquette qui avaient désormais envahi le peu d'espace social où je me mouvais.

       Le jour venu, je mis Balles à blanc dans mon sac à dos, sans avoir décidé d'un plan. Aliénor: j'avais tant cristallisé sur ce prénom qu'il sonnait à mes oreilles comme un diamant. Il faudrait pourtant que j'évite de l'appeler ainsi: cette perspective me parut aussi difficile que de ne pas remercier une harpiste qui aurait joué du Debussy où l'on aurait eu le besoin urgent d'entendre ce genre de beauté.

       Aliénor m'accueillit avec une politesse qui me fit mal. La copine neuneu, dans son soin, mangeait une casserole de purée fumante. "Ca réchauffe" me dit-elle d'une voix de bec-de-lièvre. J'opinai et commençai à travailler. Le bâchage s'avéra plus difficile que je ne l'avais cru: la romancière m'aida et je lui avouai honteusement que sans elle, j'aurais dû renoncer et la laisser en proie aux courant d'air avant de revenir avec une équipe.


       " - Vous voyez, ce n'est pas si vilain, dis-je quand ce fut achevé.

          - Le ciel mérite mieux qu'une transparence de plastique, répondit-elle. Quand l'enlèverez-vous?

          - Doucement! Nous venons à peine de poser cette bâche. Avant fin avril, à votre place, je ne toucherais à rien.

             Du grand sac qui contenait la toile de plastique, je sortis le plus petit modèle de chauffage électrique à panneau rayonnant.

Le Voyage d'hiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant