La promesse : Récit de Lagarden

Chapitre 6 : Bienvenue à Lagarden

Lisa sut dormir parfaitement malgré les événements, la fatigue avait en effet pris le dessus sur ses angoisses caractéristiques qui ne la quittaient plus depuis le début de l'épidémie. Elle fut réveillée par une personne frappant directement à sa cabine. Elle se leva avec difficulté, pensant avoir affaire avec l'un des officiers du navire rencontré la veille.

Néanmoins, une fois face au militaire, elle aperçut aussitôt l'emblème de l'aigle, puis sa vision se tourna vers le visage du soldat. Gale se tenait fièrement en affichant un large sourire.

— Je t'ai manqué Lisa ? demanda-t-il sur un ton moqueur.

Elle se jeta dans ses bras sans répondre pour l'enlacer, ce qui surprit le gaillard.

— Eh ben, je ne te pensais pas si tactile.

— Je ne le suis pas ! se défendit-elle. Mais si on mourait pour moi, je ne me le pardonnerais jamais. Je voulais m'assurer que tu sois bien réel, c'est tout.

— Je vois, nous sommes arrivés aux abords de l'Amérique du Sud.

— Nous quittons ce rafiot ? exprima-t-elle avec entrain.

— En effet...

— Tant mieux, ça ressemble à un cercueil de métal ici.

— Tu ne pourrais pas rejoindre notre marine, plaisanta-t-il.

Elle lui lança un regard noir, ce qui jeta un froid sur le duo qui marchait à travers les couloirs.

— Je ne suis pas dupe, indiqua-t-il en scrutant le plafond. Mike ne serait pas revenu me chercher et encore moins le commandant. Je te remercie.

— Ils ont dû venir avec tout un escadron pour te sauver, s'amusa-t-elle.

— Non, juste Mike et le commandant, c'était suffisant.

Lisa se moqua de lui, ça devait être une des histoires loufoques de Mike pour se mettre en avant. Elle détestait ce type, mais au moins, il ne s'était pas dégonflé à la dernière minute. Sur le pont se trouvait désormais un hélicoptère de transport.

— C'est notre porte de sortie ! cria Gale, luttant face aux bruits de l'engin.

Guilhem et Mike les attendaient déjà devant l'appareil. Une fois à bord, Lisa fut d'abord saisie par la beauté du panorama qui s'étalait sous ses yeux : l'immensité bleue de l'océan Pacifique, puis la luxuriante forêt traversée par l'amazone.

Mais son émerveillement fut rapidement brisé par la réalité qui s'imposait à elle. De là-haut, elle pouvait apercevoir les quartiers des villes en proie aux flammes, les villages dévastés et les voitures qui tentaient de fuir dans un chaos indescriptible. La situation était la même partout : un paysage de désolation et de destruction.

— Vous m'aviez assuré que les populations ne craignaient rien chez vous ! s'exclama-t-elle face à Guilhem.

Gale lui tapota le bras afin de la mettre en garde.

— Arrête, nous ne sommes pas encore arrivés, murmura Gale. Lagarden aide ces gens aussi, je te le garantis. Ne te mets pas Guilhem à dos.

Guilhem avait, malgré tout entendu, le jeune homme.

— Gale, ne vous en faites pas, vous également, vous doutiez avant de voir pour la première fois notre belle cité ? lui demanda-t-il.

— Non, commandant. J'ai eu foi de suite en notre projet.

— Vraiment ? Vous êtes bien l'un des seuls, répondit le commandant, comprenant qu'il mentait.

Mike se délecta de la scène, s'enchantant de la façon dont son ami s'enfonçait.

— Nous arrivons justement, s'écria Guilhem. Regardez par vous-même Lisa.

Au détour d'une montagne, Lagarden se dévoila dans toute sa splendeur. La ville s'étalait à perte de vue, une immensité d'immeubles scintillants qui défiaient les cieux. Des îlots de verdure ponctuaient le paysage urbain, contrastant avec la rigueur des constructions modernes. Des bâtiments aux styles anciens dénaturaient l'environnement, comme si cela était voulu.

Une question brûlait les lèvres de Lisa : comment une telle ville avait-elle pu se développer à l'abri des regards ? Cachée derrière les montagnes, Lagarden semblait vivre en autarcie, coupée du reste de la société. Surtout, la cité pouvait se vanter de ses défenses, des tours de guet reliées à des murailles pouvant sortir de terre. La ville apparaissait imprenable.

— Je n'en reviens pas, vous aviez toutes ses ressources et vous avez laissé le monde s'effondrer ? s'insurgea Lisa.

— Je vous demande pardon ? répliqua Guilhem.

— Lisa, fermes-là... Lui chuchota Gale en lui tirant le bras plus sévèrement cette fois-ci.

Lisa lança un regard austère au commandant, qui le voyait comme un défi.

— Lagarden ne doit rien à personne, indiqua Mike en désamorçant la situation. C'est le monde qui nous devra bientôt tout, nous travaillons sur un remède pour soigner tous ces gens.

— En effet, mais ça, vous l'apprendriez prochainement Lisa, conclut Guilhem.

L'hélicoptère se posa en douceur sur l'un des toits de la cité. Une fois sorti, Guilhem expliqua à Lisa qu'ils se trouvaient au sein du Parlement de Lagarden. Ce bâtiment imposant était le centre névralgique de la ville, où se prenaient toutes les décisions importantes. Le Parlement se composait d'un conseil dont les membres provenaient de Lagarden, mais aussi d'autres pays. Parmi eux, des sénateurs américains espéraient aujourd'hui obtenir l'aide de Lagarden pour regagner le contrôle de leur État en proie au chaos.

Lisa se sentait soudain au cœur d'un engrenage complexe, où se jouaient les destins de nations entières. C'est à ce moment que Mike et Gale repartaient au sein de leur caserne, laissant Lisa seule avec le commandant. En les voyant partir, son cœur se serrait, pas comme lors d'un premier de jour de travail, mais plutôt de la même manière que le dernier jour d'un condamné. Elle continuait à le suivre tandis qu'elle sentait désormais son dos couvert de sueur froide. Ils prirent un ascenseur qui semblait les emmener à des centaines de mètres sous terre, tellement sa descente paraissait longue. Lisa décida ainsi de briser le silence face à cette tension devenue insoutenable, alors qu'ils arpentaient maintenant d'interminables couloirs éclairés de lumière artificielle.

— Où m'escortez-vous ?

— Je vais vous présenter votre futur lieu de travail.

— Sous terre ?

— Une grande partie de nos infrastructures scientifiques se trouve en effet sous la ville, cela permet de les protéger.

— Je ne verrais plus la lumière du jour ? s'inquiéta-t-elle

— Bien sûr que si Lisa, vous disposez d'une maison comme tous les citoyens, dit-il en soupirant. Écoutez, je sais que changer de vie peut-être effrayant, mais je tiens à insister, ce que vous ferez chez nous pourra réellement sauver le monde.

— Je me suis toujours méfié des institutions et du gouvernement.

— Alors, nous sommes deux Lisa ! Pourquoi, aurais-je créé Lagarden si ce n'était pas le cas ? Tous les indicateurs tendaient à nous montrer que ce jour arriverait. Les grandes nations tombent comme des mouches.

— Et quel serait mon rôle dans tout ça ?

— La mission de tous les citoyens de notre cité est de bâtir un monde meilleur.

Il ouvrit une porte qui était sa destination, se trouvait à l'intérieur de la pièce, une table autour de laquelle les parents de Lisa l'attendaient.

— Bâtir un monde meilleur pour eux... expliqua Guilhem.