Jamais deux sans trois

106 6 80
                                    

                                              
                                               Cléa

Université de Californie, lundi 1 septembre,  8h30 :

La fumée qui s'infiltre dans mes poumons me procure une sensation de bien-être que personne ne pourrait m'apporter à cet instant.

1er septembre, c'est la rentrée pour notre avant-dernière année à l'université.
C'est aussi la date qui signifie que je dois retourner étudier et consacrer l'ensemble de mon temps aux notes et la réussite.

Or, je réussis dans beaucoup de domaines.
Comme vider deux paquets de clopes par jour parce que je ne sais pas gérer cette addiction qui me tue un peu plus chaque jour et consume mon âme à petit feu.

Je suis douée pour dessiner aussi , c'est un exutoire qui me permet d'échapper à la réalité dans laquelle je me suis noyée depuis bien longtemps.
Mais la chose pour laquelle je sais que j'aurais toujours la défaite collée à moi sont les études.

Étudier n'a jamais été mon domaine de prédilection et être attentive en cours encore moins.
Je divague et mes pensées me submergent toujours, ce qui me vaut des réprimandes de la part des enseignants.

Surtout un, M.Brown, professeur de mathématiques, 29 ans.

Avec sa stature imposante et ses yeux ébène, il fait l'unanimité auprès de toutes les étudiantes qui ont pour fantasme de passer une nuit avec lui, à une exception près, moi.

Il pense que son air de monsieur,  je suis le plus beau et tout le monde aimerait se taper mon corps d'apollon lui donne un passe-droit pour humilier sans aucune considération les étudiants en difficultés, étudiants dont je fais partie.

Il a toujours été mon professeur référent durant les deux dernières années.
Bien-sûr, je n'ai jamais été épargnée les remarques désagréables qu'il crache lorsqu'il me rendait une copie qui ont fait l'effet d'une bombe dans ma confiance en moi.

J'ai déjà du mal dans sa foutue matière avec ses calculs à la con qui mélange des termes que seuls les grands génies arrivent à déchiffrer alors quand il a commencé à ajouter des piques bien placés tel que

« aurait t-il un jeune homme qui vous déconcentre en ce moment ? Bien que vous n'en ayez pas besoin pour avoir des notes aussi catastrophiques, reprenez-vous. »

« Vous pensez sincèrement aller loin dans la vie, remettez-vous en question la vie, ça n'est pas en écrivant vos bouquins que vous y arriverez. Le bois de Boulogne vous attend avec une considération pareille pour les cours. »

Des remarques qui ont toujours été couvertes par son physique digne d'une œuvre d'art, même si c'est un vrai connard, je ne peux pas nier qu'il est beau.
Deux raisons me rappellent qu'une quelconque histoire avec lui serait impossible :

-c'est un connard fini
-c'est toujours un connard fini

Et une troisième raison me dit que je ferais mieux de ne pas avoir pour projet se sortir avec cet énergumène pour quelques bonnes notes ou que sais-je.

-Elyo Damsone en personne, je sais qu'il a reçu un flingue il y a de ça deux mois, mais je ne lui ai pas posé plus de questions.
Je ne veux pas d'un mort sur la conscience, même s'il mérite que quelqu'un lui en mette une.

Le monde dans lequel on vit nous confronte à la triste réalité qu'avoir une arme sur soi aujourd'hui reste nécessaire si on veut vivre en paix.

La seule chose pour laquelle je concentre toute mon énergie ces derniers temps est d'espérer que cette année sera la bonne et que l'on aura un nouveau professeur pour cette matière.
Je venais de coincer une deuxième cigarette entre mes lèvres avant de l'allumer aussitôt et de tirer une taffe.

Tue moi je te suisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant