Let's Dance

10-Elle

Sincèrement, j'aurais aimé redanser ce tango devant les deux juges, mais je n'ai pas eu cette deuxième opportunité. J'espère que cela ne va pas me porter préjudice. Certes, j'ai eu la chance d'être la première à danser avec Dohän, j'ai vraiment apprécié le moment, mais tout le monde va penser que c'est son talent qui m'a aidé, pas le mien.

Il se vante sans arrêt d'être le meilleur, et c'est bien vrai, celui-ci a un sacré talent !

En plus d'avoir du charisme, d'être attirant et d'être fascinant lorsqu'il danse, il chante très bien.

Pendant que les autres concurrentes passaient devant le jury, j'ai de mon côté usé de mon temps à regarder quelques vidéos de Dohän. Je me demande bien pourquoi il a arrêté sa carrière de chanteur, car il a une voix aussi brillante que sa danse, il peut avec aisance atteindre différentes tonalités avec un naturel déconcertant. Qu'est-ce que cet homme n'est pas capable de faire ?

Je jette un œil de temps à autre à la piste de danse, je remarque que Delly et Dohän sont encore en train de se chamailler. Leurs visages sont fermés, trahissant leur énième désaccord.

– Merci à toutes ! s'écrit d'un coup Delly avec une voix criarde, vous pouvez vous reposer un peu, nous allons devoir nous entretenir plus sérieusement avec Dohän.

Dans un même mouvement, je les suis toutes, quittant ainsi la salle de danse. Comme à mon habitude, je suis la seule à qui on n'adresse pas la parole, mais je tente de ne pas y faire attention. Après tout, j'ai l'habitude.

Avant de refermer la porte derrière moi, je croise le regard noir et froid de mon partenaire du jour.

Ça fait déjà dix minutes que nous attendons, mais c'est déjà beaucoup trop. Leur discussion semble durer une éternité.

Autour de moi, les filles parlent entre elles, certaines se prennent un café au distributeur et d'autre sont penchées aux fenêtres pour fumer. Je les observe sans plus d'intérêt que ça quand une voix appelle mon numéro.

– Numéro sept, ricane une fille entourée de trois autres, tu vas bien ?

Intriguée, je me demande pourquoi elle m'adresse la parole sur un ton moqueur et avec un regard aussi hautain.

– Ça va, dis-je sans m'attarder avec cette dernière.

– Tu sais, ma belle, ce n'est pas parce que tu as partagé une danse avec Dohän que ça te donne le droit de te sentir en sécurité.

Mais qu'est-ce qu'elle raconte ? Je pense être là plus angoissée de toutes ici.

– Je ne le suis pas.

– Vraiment ? Ce n'est pas l'impression que tu donnes. Tu veux que je te dise ce que nous pensons ?

Cette discussion n'a ni queue ni tête, elle ne mérite pas que je lui donne du crédit.

– Avec les filles, on croit que tu essayes de mettre Dohän dans ta poche avec ton petit air de chien battu. Tu peux faire tout ce que tu veux, numéro sept, mais tu n'iras pas loin. Tu n'es qu'un rat dans un restaurant cinq étoiles après tout.

– Et alors ? lancé-je, ma patience atteignant ses limites.

– Et alors ? Nous avons beaucoup plus de chance de gagner ce concours que toi. Alors laisse tomber dès maintenant, ça t'évitera de te faire des ampoules, rigole-t-elle en cœur avec les autres filles, telle des hyènes, garde bien ça dans ta petite tête : tu n'as pas ta place ici.

Une silhouette apparaît derrière elle, elle est loin d'être massive, mais je la reconnais à l'instant où je la remarque.

– Qui donc n'a pas sa place ? intervient sa voix veloutée, mais brusque, je serais curieux d'avoir votre avis, numéro treize.

Prise sur le fait, cette dernière se crispe et son visage devient rouge tomate. C'est hilarant, mais je reste de marbre. Elle se retourne enfin pour faire face à Dohän, bégayant, ne sachant quoi répondre.

– C'est bien ce qui me semblait, ajoute celui-ci en la toisant de haut, l'avis d'une simple danseuse n'a aucun poids ici, retenez-le bien. Maintenant, si vous avez fini de vous crêper le chignon, nous vous attendons dans la salle.

Je jubile au fond de moi, mais une fois qu'il s'éloigne, numéro treize me fait de nouveau face, essayant de cracher le reste du venin qu'elle garde en elle.

– On n'en a pas fini, crois-moi. Ce n'est que le début.

À quoi pouvais-je bien m'attendre ? Ça termine toujours comme ça quand on met un groupe de fille en concurrence.

Quoiqu'il en soit, cela ne doit pas me détourner de mon objectif principal : remporter ce casting.

Je ne suis pas venu ici pour me faire des copines, ni même perdre mon temps. Cette opportunité est un tremplin capital pour moi dans ma carrière de danseuse.

Je n'ai que vingt-quatre ans, mais je tiens à continuer dans cette voie le plus longtemps possible. Ce ne sont pas des médisances qui me feront baisser les bras aussi facilement.

Et puis d'un autre côté, je me sens un peu plus en confiance.

Surtout grâce à Dohän.