Chapitre 48

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Et quand fanent les fleurs...

Harper — 20 ans et un coeur douloureux

Inspire. Ma robe noire en coton me colle à la peau comme une seconde identité tandis que les larmes noient mes yeux depuis des jours.

Expire. Je ferme mes cuissardes noires et enfile un manteau d'hiver de la même couleur, consciente que la brise de novembre refroidira mon corps épuisé.

Putain, qu'est-ce que j'ai l'air pathétique.

-    Harper ? M'appelle une voix à travers la porte de ma chambre. Tu es prête, ma chérie ? Nous n'allons pas tarder à y aller.

Ma mère fait une pause dans ses paroles, sûrement pour attendre une réponse de ma part qui ne vient pas.

-    J'ai demande à ton amie Courtney et son gentil mari de nous conduire, tente-elle d'une voix douce. Tu sais comme c'est dur pour papa de conduire maintenant.

Papa. Lui aussi va finir par partir. Par m'abandonner. Comme Noah et Gareth.

-    J'arrive maman, j'arrive à articuler malgré ma gorge qui me brûle. Je finis juste de m'habiller et je descends. Mettez déjà vos chaussures pour ne pas faire attendre Courtney.

Je m'empare d'une paire de lunette noire pour mieux dissimuler mes yeux rouges, mais surtout pour garder la face. Depuis quatre jours, j'essaye de mon montrer positive, résistante à la tristesse qui me consume. Mais mes parents ne sont pas dupes, je me doute qu'ils entendent mes gémissements de détresse quand je me retrouve seule dans ma chambre, seule avec mes regrets, mes angoisses, et le deuil.

-    D'accord, ma chérie.

J'entends les pas lourds de ma mère s'éloigner doucement pour aller descendre les escaliers. J'attends qu'elle soit assez loin pour lâcher un sanglot qui me déchire le cœur et l'âme.

Mais enfin, il est déjà mort depuis longtemps, non ?

Quand je trouve le courage de rejoindre mes parents dans l'entrée après avoir mis un papier dans ma poche et un paquet de mouchoir, je retrouve Isaac qui peine à mettre ses Santiags ébènes auxquelles il tient tant.

-    Laisse, papa. Je vais t'aider à les enfiler, je déclare en me penchant pour attraper son pied.

Il se laisse faire, ne semblant pas savoir qui je suis, ni où il est. Ses yeux bruns regardent longuement autour de lui, observant chaque meuble et chaque photo accrochée au mur. En ce moment, enfin, depuis la mort de Gareth bizarrement, il n'a pas tout sa tête. Comme si l'univers se déchaînait sur moi, des fois il semble tout à fait avec nous, riant et dansant avec Henriette en souvenir des 22 ans d'Eden, ou comme aujourd'hui, si loin dans son monde qu'il est impossible de le comprendre. Si je vous dis que c'est pire en ce moment, c'est qu'il est rare de le voir nous reconnaitre. Maman fait comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes, comme d'habitude, mais tout à changer. Ma détresse face à l'indifférence de son mari la touche plus qu'elle ne le montre.

Une fois que j'ai finis ma tâche, j'attache mes longs cheveux roux en une queue de cheval haute pour ne pas les avoir dans la figure ; je sais que je vais encore pleurer malgré mes lunettes, et je ne veux pas qu'ils collent à mon visage.

-    Ma chérie, me dit Henriette en émergeant du salon, je crois que j'ai entendu un klaxon. Ton amie doit être arrivée.

Ravissante dans sa robe noire similaire à la mienne, elle me sourit tristement pour me réconforter, mais je l'ignore en regardant rapidement par la fenêtre, et en effet une voiture se tient devant la maison. Je reconnais la chevelure blonde de John au volant, seul.

The Embers -T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant