Chapitre 3

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Si je ne me retenais pas, je la prendrais dans mes bras pour la faire tournoyer. Elle est là, juste en face de moi. Encore plus belle que dans mes souvenirs.

* Ça fait longtemps que tu attends? je demande.

* Non, m'assure-t-elle, enfin... trois bus avec celui-ci. Je voulais être sûr de ne pas te manquer.

Elle me sourit. Mon cœur bat à la chamade, je suis à deux doigts de faire la danse de la victoire. Pour éviter qu'une telle chose n'arrive et qu'elle ne prenne ses jambes à son cou, je m'assois près d'elle et lui demande des nouvelles de sa semaine. Elle me raconte alors qu'elle travaille dans une galerie d'art et qu'elle adore dessiner ainsi que toutes les formes d'expression artistique. Elle me fait même part de sa théorie selon laquelle s'ils avaient eu des pinceaux entre les mains beaucoup de criminels seraient devenus de grands artistes. Je lui répond du tac au tac que certains artistes sont des criminels mais elle ne démonte pas et argue que ce ne sont que des exceptions et que toutes les théories même les plus brillantes doivent faire face à des exceptions. Elle est si passionnée parce qu'elle raconte et passionnante dans sa manière de le dire qu'on ne voit pas passer les 17 minutes d'attente affichées sur l'abri bus.

Lorsque je vois le bus arrivé au loin j'ai une boule au ventre : quelle est la suite des évènements ? Va-t-elle s'en aller et me laisser prendre le bus seule ? Loin de là ! Elle me devance même dans le bus et trouve une place où nous sommes face à face. Devant ma mine surprise, elle déclare : J'ai pris ma journée, je suis toute à toi. Loin de me rassurer sa réflexion me déstabilise, j'ai des obligations moi, je ne vais tout de même pas tout laisser en plan juste parce qu'un canon a poireauté pour moi près d'une heure près d'un abri bus. Je suis confuse. Elle continue : Si tu veux, je viens avec toi je me ferais discrète. Je suis aux anges. Loin de vouloir modifier mes plans, elle est prête à s'en accommoder sans sourciller. Une vraie crème cette fille. Une fois la logistique réglée, à son tour de me demander des nouvelles de ma semaine. Loin de mener une vie aussi trépidante que la sienne, je lui explique tout de même que je travaille dans un fastfood sur Paris et que je me remets d'une année sabbatique chaotique. Elle me questionne sur mes projets pour l'an prochain, puis sur mon église, elle a vraiment l'air de porter de l'intérêt à ce que je lui dis. C'est flatteur.

Tout d'un coup, ma paranoïa reprend le dessus, plus elle semble s'intéresser à moi, moins je me sens à l'aise. Tout va trop vite. De nouveau, je panique mais c'est trop tard pour faire demi-tour. J'ai déjà accepté qu'elle m'accompagne à l'église, qu'elle rencontre mes amis et découvre tout un pan de ma vie alors qu'on se connait à peine. Mais qu'est-ce qui m'a pris? Un battement de cils et je perds mes moyens. Devant mes réponses de plus en plus évasives, elle s'inquiète et demande : Tu es sûr que ça va? Tu fais une drôle de tête... Je la rassure et souris du mieux que je peux. La conversation tourne court. Et voilà j'ai tout gâché ! Tout allait à merveille et il a fallu que je psychote.
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L'italienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant