La Tri-élémentariste

Episode 4 - L'Elementafest

Terza détourna le regard du portrait fatigué que lui renvoyait le miroir. Les poches violacées sous ses yeux témoignaient d'une nuit au sommeil fluctuant. Ses tentatives de rafraîchir sa chambre après le départ de la Flamme d'Acier s'étaient avérées vaines. L'aura bouillante de sa mère demeurait aussi omniprésente qu'étouffante. Même se débarbouiller le visage ne lui servit pas. Peut-être que je devrais les cacher ? songea-t-elle en attrapant son fond de teint. Elle arrêta son geste à quelques centimètres de son visage avant de reposer le maquillage. A quoi bon ? Je suis un soldat, pas une mannequin. Les esprits élémentaires apaisèrent la magicienne, surprise de les avoir appelés, d'une douce pulsion d'énergie.

La jeune femme quitta la salle de bain en tentant de dompter ses mèches rebelles. En relevant les yeux, elle se trouva face à la veste obscure de l'Académie, toujours suspendue à proximité de son pantalon crème. L'élémentariste marqua une pause devant l'uniforme, observant les emblèmes élémentaires l'agrémentant. Ne pas se laisser distraire, chasser les mauvaises pensées. Encore une poignée d'heures et tout ça serait fini. Ce n'était qu'un duel, après tout. Il ne se différenciait que peu de ceux de sa formation. Certes, tout Novarion le suivait mais il finira par passer. Tout a un fin, même les mauvais moments, lui répétait son père dans son enfance. Un sourire éphémère illumina son visage, outrepassant une montée d'angoisse. Constatant que l'heure du rendez-vous approchait à grand pas, la jeune femme prépara ses affaires. A la hâte, elle enfila son costume, fourra quelques accessoires dans son sac de sport avant de sortir de sa chambre. Elle inspira longuement en verrouillant la porte, dans l'espoir de stabiliser sa respiration. Son coeur tambourinait dans sa poitrine, ses battements frénétiques se discernant jusqu'à ses orteils. Le moment tant redouté arrivait.

Une atmosphère maussade nappait la résidence. La descente au point de rendez-vous s'effectua au milieu de murmures éparses. Certains évoquaient le défilé, d'autres débattaient de l'adversaire qu'ils souhaitaient à tout prix éviter pour le duel. Terza entendit son prénom suivi de gloussements. Ils cessèrent aussitôt qu'Edmund fusilla leurs auteurs du regard.

La pénombre couvrait encore Novaria quand les étudiants se rejoignirent sur le parvis. Une poignée de citoyens brusquait un cordon de gardes devant la grille d'entrée et acclamait les futurs combattants tout au long de leur montée dans le bus aux vitres teintées. Terza distingua que tous les âges y étaient représentés quand un garçonnet pointa en sa direction, demandant à sa grand-mère pourquoi elle avait trois badges élémentaires accrochés sous le blason de l'université. L'un de ses camarades ne manqua pas l'occasion de lui demander si le trio d'insignes colorées n'était pas trop lourd à porter, avant de monter dans le car en pouffant et félicités par ses amis.

Si d'ordinaire la ville somnolait encore à une heure si matinale, il n'en fut rien aujourd'hui. Les habitants s'attroupèrent sur le trajet des aspirants, malgré le périmètre de sécurité, dans l'espoir d'apercevoir leurs prochaine idoles. Terza comprit alors l'intérêt du vitrage fumé, qui les préservait de l'effervescence. Bien que maigre, il offrait un instant de répit avant les festivités dont tous ne profitèrent pas, déterminés à se faire voir de leurs fans.

L'agitation stoppa dès que la silhouette ombrageuse du colisée se découpa de l'aube. Massif, majestueux, sa construction antique avait défié les siècles. Nombreuses furent les générations d'élémentaristes à s'être perfectionnées sur son terrain de sable. Malgré sa présence familière au milieu de la cité, les statues grandioses des combattants légendaires de Novarion encerclant l'enceinte intimidèrent l'intégralité des étudiants. Flanqué des autorités, le bus se fraya un chemin au milieu de la nuée de curieux pour déposer les élèves sous l'enceinte. Préservés des cris de la foule une fois le sous-sol rejoint, les aspirants croisèrent les autres protagonistes du défilé en rejoignant leur vestiaire. La tension monta d'un cran lors de l'échauffement mené à l'abri des regards.