Chapitre 15 - La grotte-alcôve

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— Tu fais encore la tête parce que je t'ai volé ta boucle d'oreille ?

La brise nocturne emporta le rire railleur de Blanche, qui avançait prudemment à travers les arbres. Sans même daigner accorder un regard au chasseur de dragons pour s'apercevoir de sa moue agacée, elle continua de se dépêtrer entre les branches, tout en ajoutant :

— Dire qu'il t'a fallu toute une journée pour t'en rendre compte... C'est donc ça les instincts de dragon ?

Sting ne répondit pas. Une frustration muette le tenait en joue.

— Je continue de croire qu'elle m'allait très bien.

— J'aurais mieux fait de te livrer au Conseil, grommela-t-il.

La chance les ayant quittés depuis les récents évènements, il eut fallu qu'ils se trouvassent en compagnie de Balkan des forêts, qui n'avaient pas eu de scrupules au moment de se disperser avec leurs affaires. La force du destin, ou parce qu'ils se trouvaient déjà cotes à cotes avant d'être volés, comme souvent d'ailleurs, avait fait que Sting et Blanche s'étaient retrouvés dans le même pétrin, leurs compagnons perdus de vue.

— Tu sais bien que ça aurait été très ennuyeux. Es-tu au moins sûr qu'on avance toujours dans la bonne direction ?

Sting haussa les épaules.

— La pluie a effacé les odeurs, on ferait mieux de trouver refuge maintenant qu'il fait nuit. Quoique, ce serait plus satisfaisant de te laisser là.

— Aucun soucis. L'argent, ça vient et ça part. Dormir dans la forêt, c'est sans doute moins pire que les rues sales de mon village.

Il fut pris de court. Il resta silencieux un instant, se punissant d'avoir osé menacer de l'abandonner, même s'il n'en avait pas pensé un mot. Blanche se mit à rire.

— C'est une blague. Je suis bien trop forte dans ce que je fais pour dormir dans les rues.

Sting ne partagea pas son rire. L'affliction qu'il avait éprouvée en l'imaginant dans les tréfonds damnés de la pauvreté peinait à le quitter. Elle s'arrêta subitement pour se planter face à lui.

— Dis... Tu viens d'une autre époque, pas vrai ?

— Tu le sais déjà.

— Un orphelin du passé, projeté quatre cents ans plus tard ; tu ne vas pas me faire croire que tu n'as jamais volé une pomme ou deux pour survivre ?

Sting soupira. Il contourna la jeune femme pour se remettre à avancer.

— Arrête ça.

Il exhala un long soupir.

— Je ne te juge pas, Blanche.

Il entendit que son cœur s'était affolé de la nouvelle. Elle mit un instant avant de se mettre en marche derrière lui.

— Bien sûr que j'ai déjà dû voler pour survivre, j'étais qu'un gamin. Mais je me suis entraîné pour avoir un travail, et que Lector n'ait pas à dormir dans la rue.

— Et maintenant, tu es maître de guilde... Ça a bien tourné pour toi.

Il soupira de nouveau, plus bruyamment, fit volte-face pour lui saisir le poignet et brandir la main de Blanche devant son propre visage.

— Comme je viens de te le dire, si tu m'écoutais, je ne te juge pas. Regarde ton emblème : c'est un travail que je te propose.

— J'étais pas en train de me plaindre ! protesta-t-elle. Je ne suis pas malheureuse.

— Alors tu ne veux pas faire partie de Sabertooth ?

Elle s'était prise à le vouloir.

Blanche s'était satisfaite de cette instabilité de la vie qu'elle menait. Plus que ça, elle avait trouvé dans l'inconstance et la fragilité de sa survie une adrénaline qui lui faisait palpiter le cœur, lui donnait de plaisants vertiges.
Pourtant, elle avait découvert ne jamais vouloir se détacher de la marque des Tigres à sa main.

Sting Eucliffe x OC : Le Trésor InterditOù les histoires vivent. Découvrez maintenant