X- ESCAPADE

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Avril, Las Vegas, États-unis

TW : auto-mutilation, que je mentionne avec un ∞ en début et en fin de passage

Les volets constamment fermés, j'ai perdu la notion du temps. Je m'applique à éviter Ace depuis «l'accident». Lui non plus ne cherche pas à établir le contact.

Cela fait quelques jours que nos horaires de repas sont décalés. Sans même se concerter, nous avons réussi à trouver une entente pour s'esquiver.

Allongée sur mon lit, fixant le plafond, je ressasse les derniers évènements dans ma tête et les classe. J'ai l'impression d'être devenue muette : mes lèvres sont restées scellées, je n'arrive même plus à imaginer la tonalité de ma voix.

Mes pensées restant au plus profond de moi ne m'aide pas, les ruminer continuellement m'empêche d'avancer. J'observe mes bandages aux poignets, et retiens un geignement de frustration. Ils me dérangent légèrement, mais j'ai préféré protéger mes plaies.

Suite aux épisodes légèrement traumatisants de ces derniers jours, je n'ai pas pu me contrôler. Cette vieille habitude malsaine a refait surface.

J'étais assise par-terre, le dos contre mon lit. Le visage baignait de larmes, je n'ai pu empêcher l'incident, c'était plus fort que moi.

J'ai d'abord regardé mon poignet droit, et je l'ai mordu. Jusqu'au sang. Plusieurs fois. Et pourtant, le vide béant dans ma poitrine était toujours là.

Je sentais mon cœur battre douloureusement, à en casser ma cage thoracique, mais je n'avais pas l'impression qu'il était mien. Comme factice. La souffrance toujours présente, j'ai cherché des yeux un objet tranchant.

Un ciseau sur la commode a attiré mon attention. Je me suis relevée, j'ai avancé à pas lent, et je l'ai saisis. Il ne m'a fallu qu'une demi-seconde d'hésitation. Je ne pouvais pas laisser ma peine gagner.

Alors, je l'ai ouvert, et ai tracé des marques sur mon poignet gauche. Des croix, qui commençaient à la limite de la paume, et continuaient sur tout l'avant-bras. Le sang et les larmes brouillaient ma vue, je suis tombée au sol.

Je me suis pris la tête entre les mains, et je me souviens avoir murmuré : «mais qu'est-ce que j'ai fait ?». Mais cette action, on ne peut pas la régir.

À chaque fois, on s'en veut, et on se dit qu'on ne veut pas recommencer. Mais arrivé sur le fait accompli... on n'y peut plus rien.

Alors que je touche délicatement mes poignets, en retenant mes larmes, des bruits de pas se font entendre. Ils continuent, et s'arrête devant ma chambre.

Bordel, nan...

Je ne veux pas affronter Ace. Mes plaies sont béantes, et je ne parle pas que physiquement. Je ne veux pas qu'il voit mon état émotionnel, alors que, rien qu'à l'évocation de son prénom, je tressaille et prends peur.

Il toque doucement à la porte, trois coups distincts. Je ne réponds pas, et ramène mes genoux à la poitrine. Il prend malheureusement ça pour un oui, puisqu'il ouvre la porte.

À peine a-t-il franchi le seuil que je ne peux m'empêcher :

-Vous avez un réel problème avec le consentement, vous savez ? Non, c'est non, et quand quelqu'un ne répond pas, ça ne veut certainement pas dire oui.

Il se mord la lèvre, visiblement gêné, et reste sur le seuil de la porte. Il se racle la gorge, et renchéris :

-Ce jour-là, dans la ruelle, je n'ai pas eu le choix, Tess. J'aurais aimé te le laisser... et, pour maintenant... je pensais que tu dormais, je voulais juste vérifier.

Somebody ElseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant