La Danse du Dragon et de l'Étoile

Les Actions de Setho

- Setho ? Je peux entrer ?

Je me tiens devant la porte de la chambre qui lui sert de cage. Une cage dorée, certes, mais toujours une cage. J'aurais pu le laisser en liberté, mais je n'avais pas encore décidé quoi faire de lui.

Il était dans le vaisseau d'Antioche quand celui-ci s'est écrasé, mais pour une raison que j'ignore il a réussi à s'en sortir indemne.

Quand Alec l'a trouvé il n'a pas cherché à s'échapper, et quand nous l'avons enfermé dans cette chambre non plus. Je n'ai pas cherché à le voir, ni a lui parler, depuis la fin de la guerre. J'étais triste, en colère, et je ne voulais pas le voir.

Mais maintenant c'est différent. J'ai besoin de lui parler.

- Entrez Yliana.

J'entends sa voix me parvenir de l'autre côté de la porte.

Je fais tourner la clé dans la serrure et j'ouvre la porte. Je le découvre assit sur le tapis au centre de la pièce. La chambre est faite comme les autres, à la mode Humaine. Chez les plus fortunés du moins. Un grand lit, des arches en guise de fenêtres, couvertes par des draps qui s'agitent au vent, et un miroir. Il y a aussi des bacs d'eau, et des tissus. Puis des armoires en bois qui renferment les vêtements, les bijoux, et toutes ces choses. Il y a aussi une table avec des fruits, des légumes, du pain, des graines, des noix, du fromage, de l'eau. Je remarque qu'il n'a presque touché à rien.

Je l'observe discrètement, toujours postée au niveau de la porte entrouverte. Nous nous sommes procurés une toge blanche, qui tombe sous ses genoux. Une corde enserre sa taille maigre, et il laisse ses cheveux blancs pendre librement dans son dos. Il est pieds nus aussi. Je porte mon attention sur ses yeux. Ils sont gris, mais brillent plus que ceux de la plupart des personnes que j'ai rencontré. Ses lèvres fines sont étirées en un petit sourire.

Je ne l'ai jamais trouvé beau, au contraire je le trouvais plutôt disgracieux, mais aujourd'hui je lui trouve une certaine beauté. Il y a quelque chose, un ensemble, qui lui donne du charme. Et qui le rend touchant.

Je m'arrache à mon étude et ferme la porte derrière moi, puis m'avance de quelques pas.

- Voulez-vous un coussin ?  me demande-t-il.

- Non ce n'est pas la peine, répondis je simplement.

Je m'assois sur le tapis au sol, devant lui, et me mets moi aussi en tailleur.
Il m'observe rapidement, et plonge son regard dans le mien.

Je ne sais pas quoi dire. Je ne le connais pas. Mon père l'a enfermé pour je ne sais qu'elle raison, il est partit avec ma sœur et a rejoint les Ikars. Je l'ai détesté de toute mon âme, mais j'ai l'impression de ne plus avoir de colère en moi. Je suis vidée, simplement vidée.

- Comment allez-vous ?

Je sursaute en entendant sa question. Je ne m'attendais pas à ce qu'il fasse le premier pas, encore moins avec cette question.

- Je suis endeuillée, mais ça peut aller. Je me sens mieux qu'hier, et j'espère que demain je me sentirai encore mieux, lui répondis je.

Il hoche la tête.

- Et vous comment allez-vous ?

Je vois son sourire s'élargir, et je le sens apaisé.

- Mieux que jamais.

Je ne comprends pas. Je fronce les sourcils et m'apprête à l'interroger, mais il me coupe.

- J'ai fait une promesse à Lysandra. Je lui ai dit que je resterai avec elle, peu importe ce qui nous arrivait. Je lui ai juré de ne pas l'abandonner.