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Prologue

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La lune surplombait le domaine des Millicent, l'enveloppant de ses rayons argentés. À cette heure, Aurore pouvait s'en donner à cœur joie dans la partie sauvage des jardins. Ses pattes martelaient le sol, les hautes herbes caressaient ses flancs.

Dans deux jours, les festivités commenceraient. Dans deux jours, elle allait devoir rentrer dans un corset, se maquiller, se chausser de ces horribles talons qui l'empêchaient de courir. Dans deux jours, elle allait devoir devenir une femme parfaite pour ne pas jeter l'opprobre sur sa famille.

Même si cette dernière se moquait de ces bals comme d'une guigne. Ses parents les avaient organisés uniquement pour être en paix, car les aristocrates avaient la langue bien pendue et la spéculation hâtive. Une semaine de vie sociale typiquement humaine et ils pourraient retourner à leur propre normalité. Et elle, à ses balades nocturnes pour juguler ses instincts de louve la journée.

À peine cette pensée traversa-t-elle l'esprit d'Aurore qu'elle freina brutalement entre deux chênes. Le museau en l'air, elle huma de nouveau les fragrances de la nuit. À force de se promener ainsi, à la faveur de la lune, elle connaissait les lieux sur le bout des griffes.

Or, en dépit de sa haute naissance... Enfin, de son statut de demoiselle de la bonne société, elle savait reconnaître l'odeur du sang. Quand vous étiez une Millicent, il était de rigueur de pouvoir identifier cette senteur. Il pouvait s'agir de votre petit frère en train de se vider de son sang, les crocs d'un vampire plantés dans sa jugulaire.

Bon, d'accord, ce n'était arrivé qu'une fois. Néanmoins, le souvenir était imprimé au fer rouge dans la mémoire d'Aurore. Ainsi que la réaction de ses parents.

Ne jamais, au grand jamais, contrarier le Duc et la Duchesse de Millicent.

Prise par son instinct protecteur, Aurore courut vers la source de l'odeur. Au plus elle se rapprochait, au plus elle lui piquait le nez, désagréable. Pourtant, le soulagement l'envahit. Ce n'était pas Florentin. Ses nuances étaient différentes.

Mais alors, de qui s'agissait-il ? Qui pouvait bien se vider de son sang à une telle heure de la nuit ?

Entre les arbres, une silhouette était prostrée au sol. Elle s'approcha en reniflant, la queue dressée, les sens aux aguets. Il s'agissait d'un homme. Vivant, au vu de sa poitrine qui s'abaissait et se relevait régulièrement. Mais en passe de devenir exsangue. Il était déjà inconscient.

Elle ne pouvait pas le laisser ainsi !

Sans réfléchir, Aurore se mua en humaine. Entièrement nue, à son grand dam.

Cherchant la source du saignement, elle découvrit une grande plaie sur le flanc de l'inconnu.

— Morbleu ! Comment cela est-il arrivé ? s'exclama-t-elle.

Comme il ne pouvait lui fournir de réponse, elle saisit sa chemise de soie et la déchira largement. Un des avantages au statut de louve-garou : elle était dotée d'une force assez peu conventionnelle. Surtout pour une frêle demoiselle.

Roulant en boule le tissu contre la plaie, elle déchira une autre bande pour finir de panser le malheureux. Ce dernier lâcha un grognement quand elle appuya pour arrêter le saignement.

— Ouch ! Mais qu'est-ce que...

Elle croisa alors son regard, gris acier. Un instant captivée, elle fut incapable de voir autre chose. Jusqu'à ce qu'il descende sur son anatomie découverte.

Son poing rencontra aussitôt la mâchoire du blessé.

— Oh non !s'exclama-t-elle en le voyant s'écrouler. J'espère que je ne l'ai pas tué...

2. La Valse des MalotrusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant