Chapitre X

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Anaïs se réveilla au petit matin. Elle mit une poignée de secondes à se souvenir où elle se trouvait, et une autre pour constater que sa sœur – qu’elle avait toujours du mal à considérer comme telle – n’était plus à ses côtés.

Elle se leva et frotta ses yeux embués par le sommeil. Le soleil vif du matin créait des ombres mouvantes sur le sol. La jeune fille se rendit compte pour la première fois que le paysage était vraiment, vraiment magnifique.

Pensant que Léna n’avait pas envie d’être dérangée si elle s’était éloignée, Anaïs décida d’escalader un arbre afin de voir le paysage qu’elle n’avait pas pû admirer en détail la veille. Emplie d’une énergie joyeuse, sans doute dûe à une bonne nuit de sommeil, la jeune fille fit quelques pas dans les bois avant de trouver ce qu’elle cherchait : un chêne au tronc large et aux branches disposées parallèles au sol. Elle l’escalada en une série de gestes souples et assurés que lui avait procuré un bon entraînement.

Une fois au sommet, elle s’assit à califourchon sur une branche, les jambes dans le vide. La brise fraîche qui parcourait la lande agitait ses cheveux, pourtant attachés en une queue de cheval serrée. La jeune fille avait une vue imprenable sur les alentours et elle ne manqua pas d’en relever chaque détail.

La lande semblait s’étirer à l’infini vers le sud mais Anaïs discerna une ligne un peu plus foncée au nord, qu’elle estima être une immense montagne. À l’est, elle remarqua des tâches de couleur brune, certainement de petits villages et, plus loin, à la limite de sa vision, des tours qui ne pouvaient être autre chose qu’une grande ville. La rivière qu’elles suivaient depuis la veille bifurquait avant d’être rejointe par un autre cours d’eau puis filait dans cette direction, sans doute allait-il se jeter dans une mer ou un océan quelconque. Au moins, elle savait maintenant où aller. Elle se retourna sur sa branche et constata que la forêt de laquelle elles arrivaient n’était pas très loin, peut-être une dizaine de kilomètres.

Alors qu’elle s'apprêtait à redescendre, la jeune fille nota quelque chose qu’elle n’avait tout d’abord pas remarqué, dissimulé derrière une colline. Elle plissa les yeux et poussa un petit cri de joie : c’était une ferme !

Elle désescalada le tronc à toute vitesse et appela sa sœur.

– Léna ! Léna !

Après de longues secondes, cette dernière finit par surgir d’entre les arbres, essoufflée.

– Qu’est-ce qu’il y a ? haleta-t-elle. J’ai cru qu’il t’arrivait quelque chose !

Surexcitée, Anaïs ne prit pas la peine de s’excuser et débita d’une traite :

–J’aivuunefermeilfautyalleronvaenfinpouvoirmangerquelquechoseetpeutêtremêmequilyaquelquunquipourraitnousaiderviensviensilfautyallerviiiiite !!!

– Pardon ? éructa Léna, interloquée.

– Suis-moi ! abrégea la jeune fille.

L’autre secoua la tête, encore à bout de souffle mais finit tout de même par suivre sa sœur. Celle-ci avait fourré leur maigres possessions dans son sac et semblait prête à détaler à tout instant.

Les deux sœurs coururent hors du bosquet où elles avaient passé la nuit et filèrent tout droit à travers la plaine, escaladant les collines sans prendre la peine de les contourner. Après quelques minutes de course effrénée, elles virent enfin ce qu’elles cherchaient.

– Une maison ! s’écria Léna avant de s’écrouler au sol, haletante.

– Chut ! la rabroua Anaïs. Il y a peut-être quelqu’un.

La jeune fille ne vit pas le regard noir que lui lança sa sœur et elle s’aplatit au sol avant de ramper jusqu’au sommet de la petite colline où elles se trouvaient dissimulées.

Les Légendes d'Engamella - Livre 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant