Chapitre VI

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- Très bien, j'accepte.

Si Nikolaï semblait étonné de la réponse rapide de la jeune fille, il n'en démontra rien.
Il la connaissait, cette impatience que l'on ressent quand on découvre ce à quoi on est destiné, cette envie pressante de prouver au monde de quoi on est capable.
Il savait que cette enfant le ressentait aussi, peut importe quelle n'ait même pas vingt ans.

Après tout, depuis sa création la Confrérie comptait dans ses rangs des spartiates, des mercenaires, des pirates, des nobles, alors pourquoi pas une Grande-Duchesse impériale ?

Si elle a su répondre aussi vite et avec autant d'aplomb, alors pas de doute possible, et Nikolaï le savait.
On ne devient pas Assassin, on nait Assassin.
Et il savait au fond de son être qu'il venait de trouver la perle rare, celle qui pourrait bien redonner l'éclat et la toute puissance à un Crédo affaibli par l'après-guerre.

Ainsi dans une révérence parfaite, il s'exclama :

- Votre Majesté, je serais honoré de vous former aux principes de notre Credo. Nous oeuvrons pour la justice du peuple, nous châtions les hauts criminels de ce monde, ceux qui font passer leurs propres intérêts avant ceux des plus démunis. Ensemble nous sauvrons votre famille et votre empire, votre honneur et votre destinée. Nous changerons l'avenir et votre frère régnera sur l'empire le plus prestigieux qui soit.

Ces paroles réchauffèrent le coeur meurtri de Maria, qui ouvrit la bouche comme si elle s'apprêtait à parler, puis se ravisa. Nikolaï le vit mais ne dit rien.
Elle finit par se lancer :

- Vous savez, vous n'êtes pas obligé de vous adresser à moi avec un titre. Si l'un de nous deux doit être titré, ce serait vous.
Elle vit l'étonnement sur le visage de son désormais Mentor, elle se sentit donc obligée de préciser. Vous êtes désormais mon mentor, et je n'ai jamais aimé les titres. C'est trop formel, trop... Je ne sais pas, cela ajoute une distance supplémentaire avec la personne avec qui je converse. Elle se détourna et erra dans la pièce. D'ailleurs en y réfléchissant bien personne ne nous appelaient par nos titres. Pas même nos serviteurs. Ceux qui ont tenté ont essuyé la colère de Tatiana.

Ce souvenir la fit rire, un rire franc et sincère qui se marierait à merveille avec la douce chaleur du printemps.

Nikolaï, soudain d'humeur farceuse, déclara :

- Comme il vous plaira, Votre Altesse Impériale.

Maria se retourna vivement, ses yeux immenses équarquillés de manière surnaturelle et rivés sur Nikolaï, qui se retenait clairement de rire. Sur un ton impérieux, elle s'exclama :

- Je ne veux plus jamais entendre cela !

Nikolaï ne parvint pas plus longtemps à se retenir de rire, au grand dam de la Grande-Duchesse. Ce n'est pas tant pour sa réflexion que pour son comportement : pour quelqu'un qui n'aimait pas être désignée comme supérieure, elle n'avait aucun mal à donner des ordres !

Une fois son fou rire passé, il réfléchit tranquillement sur la manière dont il allait bien pouvoir entraîner cette jeune fille. Assis de nouveau dans le canapé beaucoup trop confortable, son coude appuyé sur l'accoudoir et sa tête reposant sur son poing, il étudia distraitement Maria. Elle qui n'avait connu que les robes coûteuses, les bals, les évènements sociaux et les voyages entre les différents palais impériaux dans différents pays, elle n'avait guère, au premier abord, les compétences requises pour devenir un Assassin.

- Pouvez-vous envisager de porter un pantalon ?

- Je vous demande pardon ?

Au vu de son air choqué, la réponse est non. S'il voulait avoir un peu plus de marche de manœuvre, surtout accompagné d'une princesse, il allait falloir être très, très inventif.
La déguiser en paysanne serait perdu d'avance, ses manières sont trop élégantes, sa peau trop claire et ses mains trop manucurées pour prétendre être une fille du peuple.
Conserver son rang de noble ne fonctionnerait pas non plus, les nobles étant avides de ragots et se connaissant tous les uns les autres, l'idée de faire d'elle la fille d'un cousin de tel ou tel prince serait démasquée dans l'heure.
Nikolaï décida donc d'y aller au culot. Cela n'allait pas plaire du tout à la demoiselle, mais tant pis.

Notre bien aimée Grande-Duchesse Où les histoires vivent. Découvrez maintenant