Chapitre 1 - La réunion inattendue

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Ce matin-là, une fraîcheur piquante enveloppait l'Élysée, insufflant à l'air une vivacité que le ciel d'hiver, clair et dégagé, accentuait encore. Les premiers rayons du soleil perçaient les grandes fenêtres du Palais, baignant les murs ornés de tapisseries de motifs dorés et complexes. Dans cette lumière douce, Gabriel Attal avançait d'un pas mesuré, le cœur légèrement serré par une appréhension familière. Premier ministre depuis peu, il se dirigeait vers une réunion de haut niveau, orchestrée par Emmanuel Macron lui-même. Une réunion où, parmi d'autres figures politiques de premier plan, se trouvait Jordan Bardella, le charismatique leader du Rassemblement National, connu pour ses discours incisifs et ses positions tranchées.

Gabriel, en traversant les couloirs opulents, ajusta sa cravate en soie bleu nuit et passa une main nerveuse dans ses cheveux noirs, essayant de calmer le tumulte intérieur. Lorsqu'il entra dans la salle de réunion, il fut accueilli par le sourire chaleureux de Brigitte Macron, toujours élégante dans un tailleur crème qui mettait en valeur sa prestance discrète. Emmanuel Macron, au centre de la pièce, échangeait quelques mots avec Stéphane Séjourné, un de ses proches conseillers et ancien compagnon de Gabriel. La présence de Stéphane ajoutait une nuance personnelle à l'appréhension de Gabriel.

"Gabriel, bienvenue," déclara Emmanuel avec une cordialité teintée de sérieux, lui serrant la main avec cette énergie caractéristique qui semblait toujours promettre une nouvelle aventure politique. "Nous attendons encore quelques personnes, mais prenons déjà place."

Assis à la grande table de conférence, Gabriel tenta de détendre ses épaules, se préparant mentalement aux débats à venir. La porte s'ouvrit de nouveau, et son cœur fit un léger bond. Jordan Bardella fit son entrée, arborant son habituel air de confiance inébranlable, suivi de près par Marine Le Pen. Jordan avait ce charisme brut, accentué par ses cheveux soigneusement coiffés et son regard perçant qui semblait toujours scruter l'âme de ceux qu'il fixait.

Lorsque leurs regards se croisèrent, Gabriel crut percevoir, l'espace d'un instant, une lueur d'émotion autre que l'animosité habituelle. Était-ce de la curiosité ? Une forme de reconnaissance tacite ? Gabriel secoua légèrement la tête, repoussant ces pensées pour se concentrer sur l'instant présent.

"Bonjour à tous," salua Jordan en s'installant en face de Gabriel, tandis que Marine Le Pen prenait place à côté de lui, affichant un sourire énigmatique.

La réunion débuta sous la houlette d'Emmanuel Macron, dont la maîtrise des discussions reflétait son désir de trouver des terrains d'entente entre les diverses factions présentes. Gabriel, fidèle à son tempérament passionné, défendit ardemment ses idées, souvent en opposition frontale avec celles de Jordan. Les échanges étaient vifs, mais marqués par un respect mutuel implicite.

"Je pense que c'est essentiel pour l'avenir de nos jeunes," argumenta Gabriel, se penchant légèrement en avant, ses yeux brillants de conviction.

Jordan répondit avec une calme assurance, ses mots pesés mais incisifs : "Nous ne pouvons pas ignorer les préoccupations légitimes de nombreux Français qui se sentent laissés pour compte par les politiques actuelles."

La tension dans la salle était palpable, un mélange d'énergie et de défi intellectuel. Emmanuel Macron observait les échanges avec un sourire à peine dissimulé, appréciant manifestement le débat de haut niveau qui se déroulait sous ses yeux. Brigitte, toujours attentive, semblait capter une dynamique particulière entre Gabriel et Jordan, une sorte de courant sous-jacent qui échappait aux autres.

Après plusieurs heures de discussions intenses, Emmanuel proposa une pause. Les participants se dispersèrent, certains pour prendre un café, d'autres pour discuter en petits groupes. Gabriel, en quête de solitude pour apaiser ses pensées tumultueuses, se dirigea vers une grande fenêtre, contemplant les jardins paisibles de l'Élysée sous le soleil hivernal.

"Alors, toujours aussi passionné, Gabriel ?" La voix de Jordan, douce mais teintée de défi, le tira de sa rêverie.

Gabriel se retourna, découvrant Jordan à quelques pas de lui, un sourire en coin sur les lèvres. Le cœur de Gabriel s'emballa, bien qu'il s'efforçât de dissimuler son trouble sous un sourire poli.

"On ne se refait pas," répondit-il, essayant de conserver un ton léger. "Et toi, toujours aussi inflexible ?"

Jordan haussa les épaules, un éclat joueur dans le regard. "Il faut bien l'être parfois, non ? Mais je dois avouer que tes arguments sont souvent bien construits."

Gabriel fut surpris par cette ouverture inattendue. "Je pourrais en dire autant des tiens," admit-il, sincère malgré lui.

Un silence chargé s'ensuivit, une tension palpable flottant dans l'air, pas uniquement issue de leurs divergences politiques. Il y avait quelque chose de plus, une curiosité mutuelle et un respect naissant qui brouillaient les lignes habituelles de leurs interactions.

La porte de la salle de réunion s'ouvrit à nouveau, Stéphane Séjourné appelant tout le monde à reprendre place. La réunion continua, mais Gabriel sentait par moments le regard de Jordan se poser sur lui, scrutateur et peut-être un peu trop intense pour être purement professionnel.

À la fin de la journée, alors que les participants se dispersaient, Gabriel attendait son chauffeur dans le hall de l'Élysée. Jordan s'approcha, les mains enfoncées dans les poches de son manteau élégant.

"Si jamais tu veux continuer cette discussion ailleurs," dit Jordan, sa voix douce mais teintée de sérieux, "je serais curieux de connaître plus en détail tes idées."

Gabriel haussa un sourcil, surpris par cette proposition qui, il y a quelques heures encore, aurait semblé improbable. "Pourquoi pas," répondit-il, son esprit partagé entre l'appréhension et une excitation difficile à dissimuler.

Alors qu'ils quittaient l'Élysée ensemble, Gabriel ne pouvait s'empêcher de se demander où cette alliance inattendue pourrait les mener. Le chemin serait sans doute semé d'embûches, de malentendus et de désaccords, mais il pressentait aussi la possibilité de découvertes inattendues, tant sur le plan personnel que politique. Une nouvelle page s'ouvrait, marquée par l'incertitude mais aussi par l'espoir d'un dialogue renouvelé.

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