Chapitre 4 - Duel à l'écran

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Le lendemain, Paris se réveilla sous un ciel gris, un reflet de l'humeur maussade de Gabriel Attal. Il se prépara avec lenteur pour une journée qui s'annonçait particulièrement éprouvante. Ce soir, il devait affronter Jordan Bardella lors d'un débat télévisé sur TF1, un rendez-vous qui le remplissait de nervosité. Depuis leur dernière rencontre, les pensées de Gabriel n'avaient cessé de tourner autour des implications de sa relation avec Jordan et des tensions de plus en plus palpables avec Emmanuel Macron.

Le trajet vers les studios de TF1 fut une succession d'angoisses silencieuses. Gabriel, assis à l'arrière de la voiture, fixait les rues de Paris défiler, l'esprit embrouillé. À peine arrivé, il sentit une boule se former dans son estomac, une sensation familière avant les confrontations publiques. La préparation d'avant-débat battait son plein, chaque mot était pesé, chaque argument affûté.

Dans les coulisses, Gabriel aperçut Jordan accompagné de Mathilde et de Manon Aubry, une députée européenne bien connue pour ses désaccords avec Jordan. Manon s'approcha de lui, un sourire détendu sur le visage, contrastant avec la tension qu'il ressentait.

"Gabriel, prêt pour ce soir ?" demanda-t-elle avec une nonchalance déconcertante.

"Autant que possible," répondit Gabriel, tentant de sourire malgré la nausée qui montait en lui.

Jordan s'avança, son expression neutre masquant à peine une lueur d'inquiétude dans ses yeux. "Tu as l'air un peu pâle, tout va bien ?"

Gabriel hocha la tête, dissimulant son malaise derrière un masque de professionnalisme. "Juste un peu de fatigue, rien de grave."

Mathilde observait la scène à distance, son regard perçant ne manquant aucun détail. Gabriel sentit une pointe de jalousie monter en lui, qu'il réprima rapidement. Ce n'était ni le moment ni l'endroit pour laisser ces sentiments prendre le dessus.

Le débat commença sous les projecteurs éblouissants du studio, chaque candidat prenant place sous les yeux attentifs des téléspectateurs. L'animateur introduisit le sujet de la soirée : l'éducation et les politiques sociales. Dès les premières minutes, la tension monta, les échanges devenant rapidement animés.

"Nous devons investir davantage dans l'éducation pour garantir un avenir meilleur à nos enfants," plaida Gabriel avec passion, sa voix vibrant de conviction.

Jordan riposta avec une précision tranchante. "Investir, oui, mais nous devons également nous assurer que cet argent est utilisé efficacement et qu'il profite à tous, sans exception."

Manon, ne restant pas en retrait, se joignit au débat, apportant sa propre perspective critique. L'intensité des échanges augmentait, particulièrement entre Jordan et Manon, dont l'animosité semblait presque personnelle. Gabriel, bien qu'animé par le débat, sentait ses forces le quitter progressivement, chaque parole demandant un effort supplémentaire.

À chaque pause publicitaire, il sentait le regard attentif de Mathilde depuis les coulisses, ce qui ne faisait qu'accentuer son malaise. Ses pensées dérivaient souvent vers Macron, et les rencontres de plus en plus troublantes qu'ils partageaient. La veille encore, après une réunion tardive, Macron l'avait retenu dans son bureau.

"Gabriel, tu sais que je veux ce qu'il y a de mieux pour toi, n'est-ce pas ?" avait murmuré Macron, sa voix douce et persuasive, sa main posée sur l'épaule de Gabriel. La tension dans l'air était palpable, une sorte de domination subtile mais écrasante. Gabriel, troublé, ne savait comment réagir à cette proximité de plus en plus envahissante.

De retour sur le plateau, Gabriel s'efforça de se recentrer sur le débat. Mais chaque fois que Jordan prenait la parole, une partie de lui ne pouvait s'empêcher de voir l'homme au-delà de l'opposant politique, celui avec qui il avait partagé des moments de vulnérabilité et de complicité.

Le débat s'acheva enfin, laissant les candidats épuisés se retirer dans les coulisses. Gabriel, vidé, s'appuya contre un mur, essayant de reprendre son souffle. Jordan le rejoignit rapidement, l'inquiétude inscrite sur son visage.

"Ça va ?" demanda-t-il, la voix empreinte de sollicitude.

"Oui, juste fatigué," murmura Gabriel, sentant ses défenses se fissurer.

Manon, passant près d'eux, leur lança un regard curieux mais continua son chemin sans un mot. Mathilde, quant à elle, s'approcha, son visage affichant un mélange de curiosité et de défi.

"Jordan, tu as été excellent ce soir," dit-elle, ignorante de la présence de Gabriel.

"Merci, Mathilde," répondit Jordan, avant de se tourner vers Gabriel. "On devrait parler."

Mathilde se crispa, mais Jordan ne s'en soucia guère. Il prit Gabriel à l'écart, trouvant un coin tranquille à l'abri des oreilles indiscrètes.

"Je m'inquiète vraiment pour toi, Gabriel. Tu ne sembles pas bien," dit Jordan, sa voix douce contrastant avec la dureté de leurs échanges publics.

Gabriel haussa les épaules, tentant de cacher ses émotions. "C'est juste la fatigue. Et puis, Macron... il devient de plus en plus difficile à gérer."

Jordan fronça les sourcils, une ombre de colère traversant son regard. "Qu'est-ce qu'il fait exactement ?"

Gabriel hésita un moment, puis se décida à parler. "Il profite de son pouvoir, de notre relation professionnelle pour... disons, m'imposer des situations intimes que je n'apprécie pas."

Les mâchoires de Jordan se serrèrent, visiblement choqué et en colère. "Ce n'est pas acceptable, Gabriel. Tu ne devrais pas avoir à subir ça."

"Je sais," murmura Gabriel, les yeux brillants de larmes contenues. "Mais que puis-je faire ? Il a tant de pouvoir."

Jordan posa une main réconfortante sur son épaule, une chaleur rassurante dans son geste. "Tu as plus de soutien que tu ne le penses. Je suis là pour toi, et si tu as besoin d'aide pour faire face à Macron, je t'aiderai."

Gabriel sentit une vague de gratitude l'envahir. "Merci, Jordan. Ça compte beaucoup pour moi."

Alors qu'ils quittaient les studios, Gabriel savait que le chemin devant lui serait parsemé d'obstacles. Mais avec Jordan à ses côtés, il se sentait prêt à affronter les défis à venir. Peut-être, pensait-il, qu'avec le temps, ils pourraient transformer cette rivalité en quelque chose de plus constructif, voire même d'émotionnellement significatif.

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