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2024

J'ai été chargée d'approcher Vitelli, le constructeur immobilier. C'est un quinquagénaire bientôt divorcé qui fréquente beaucoup le yacht club du rivage. On lui prête deux ou trois maîtresses mais vous savez ce qu'on dit...

Il y a une très belle piscine au yacht club et les jeunes femmes en quête de maris fortunés s'y pressent. C'est un vrai déballage de culs. Autant dire que je vais éviter d'avoir la même stratégie.

Je me suis donc fait embaucher. Et me voilà partie, vêtue de l'uniforme réglementaire : un polo blanc et un short en lin bleu marine, mes longs cheveux blonds balayant mes reins, avec un grand plateau chargé de coupes et d'un Melchisédech de champagne. La plus grosse bouteille.. 30 litres ... Dans le genre "m'as-tu-vu"...

Je grimpe jusqu'à sa table avec sa commande en simulant de crouler sous le poids de sa commande, en riant intérieurement. Je soulève bien plus lourd que ça à la salle avec la famiglia...

Je simule de m'écrouler en arrivant à lui et il attrape galamment la bouteille.

"Ouf! Pardon... Pardon monsieur vitelli, ne dites rien au patron s'il vous plaît, j'ai besoin de ce travail..." Dis-je, tête basse en déposant les coupes du plateau.
"Tout va bien mon petit"
Je lève légèrement le menton et dévoile mes yeux : deux grands yeux bleus turquoises frangés de longs cils noirs denués de mascara.

Ses yeux font le triangle magique: yeux - bouche - yeux. Bingo. Les femmes à sa table n'ont plus le moindre intérêt pour lui.

Petit sourire de ma part, simulant la satisfaction. Je lui fais goûter le champagne. La marque la plus chère évidemment, il simule l'extase gustative, je sers toute la tablée puis glisse mon plateau sous mon bras et les salue d'un "bonne dégustation messieurs dames!" Avant de filer sans demander mon reste.

Il n'a pas eu le temps de me glisser un billet. A lui de me retrouver maintenant.

Je prends volontairement toutes les commandes éloignées de sa table maintenant. Je sens qu'il me suit du regard tout le long de mon service. Il faut donc que je trouve une opportunité de le faire venir à moi et elle est toute désignée. Depuis cinq jours que je travaille ici, une réputation m'est venue  remeaux oreilles: un client que les autres serveurs évitent comme la peste car il a tendance à hurler sur tout le monde et exiger que tout le monde soit licencié... Monsieur Lopez, un petit investisseur mexicain dans le genre récemment parvenu qui profite de son tout nouveau pouvoir pour tyranniser les plus petits que lui.

Je prends donc sa commande et j'inverse volontairement les verres pour l'agacer. Ça ne rate pas...

"Voilà Monsieur Rodriguez !" Je dis volontairement pour l'indisposer en lui remettant la bouteille la moins chère alors qu'il a commandé du haut de gamme. J'ai à peine fini de poser le premier verre qu'il me retourne une gifle. Celle-là je ne l'ai pas vue venir!

"Salope incompétente ! C'est pas possible d'être aussi conne! Réussir à oublier la commande en deux minutes! Virez moi cette..." Je suis prête à riposter avec un uppercut quand une ombre s'interpose entre nous deux. Vitelli s'interpose comme un chevalier entre nous. Finalement la sécurité emporte Lopez qui en est à sa troisième esclandre cette semaine et qui vient de frapper publiquement une employée aux allures d'adolescente, défendue par un des gros porte-monnaie du club. Me voilà donc assise dans un bureau, monsieur vitelli incendiant le patron alors que j'ai une poche de glace sur la joue. Lopez ne perd rien pour attendre. Je vais lui envoyer une équipe cette nuit...

"Tout va bien mon petit? Montrez moi cette joue!"

"Ça va monsieur vitelli"

Tu parles. Ça me lance. Mais j'ai vu pire.

"C'est tout gonflé mon petit"

Je le regarde avec mes grands yeux mouillés. Effet garanti. Il caresse mes cheveux d'un air paternel.

Et voilà. Il est piqué. Il se raconte encore que ses intentions sont nobles mais dès que possible il essayera de m'avoir dans son lit...

"Ne me renvoyer pas monsieur bonini... J'ai besoin de ce travail pour mes études..."

"Quel genre d'études" demande vitelli

"L'architecture "

Son regard s'illumine. Et voilà. Il la tient l'idée du siècle : devenir le pygmalion moderne, qui m'aidera, me montrera la voie, me modelera à loisir, jusqu'à ma sexualité pour que je devienne son oeuvre ultime...

Il enchaîne les questions : mon université - la même que lui, mes professeurs, les lieux de stages... Toutes mes réponses sont prêtes pour faire croire que je gravité déjà autour de lui.

"Très bien. Bonini, je vous l'enlève, je lui propose un stage d'un an, rémunéré en parallèle de ses études dans mon cabinet. Ça vous dit mon petit?"
Bim. L'affaire est entendue. Je commence dans deux jours.

Série: Mafia. Tome 2. LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant