6. Cinnamon Department

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Roselita

Cela fait désormais une semaine que Michaela, Ivy et moi sommes devenues proches. Elles m'incluent dans toutes leurs activités. Nous avons lu un livre en commun, que Michaela a adoré, Ivy l'a quant à elle détesté et moi... je suis mitigée.

Nous sommes assises à trois sur notre lit. Nous avons un peu plus de deux heures devant nous de temps libre. Elles discutent chacune de leurs enfances quand Michaela s'exclame :

-    Mais... attends, je viens de me rendre compte d'une chose ! On ne t'a pas raconté notre rencontre Ivy et moi !

-    C'est son anecdote préférée, poursuit Ivy en levant les yeux au ciel avec un sourire en coin.

Michaela se tourne vers moi, un sourire aux lèvres. Je crois même distinguer des étincelles dans ses yeux.

-    Alors, tout a commencé grâce à la vielle sorcière.

-    Elle parle de la vendeuse de la brocante du coin, clarifie Ivy.

-    On s'est rencontrées il y a trois ans, à nos quatorze ans. Elle marque une pause, sûrement pour vérifier que son calcul soit bon. Puis elle poursuit :

-    J'étais dans la boutique, dans le rayon bijoux plus précisément. Cette sorcière me fixait. J'observais d'abord les colliers, qui avaient tous une pierre précieuse d'une différente forme, couleur, signification, valeur, énergie... bref ce n'est pas important. Des bracelets et portes bonheur étaient dans des pots en céramique. Tous triés par couleur. Mais mes yeux se sont posés sur les bagues ce jour-là. Je regardais chacune d'elles, admirative. Et c'est là que je remarquai la présence d'Ivy, qui était à un mètre de moi, subjuguée par les ornements. Je savais qu'elle étudiait dans la même année que moi et de toute manière les seuls clients du magasin ne sont que des étudiants venant de notre internat.

Nous regardions la même bague. Une bague unique en son genre. Elle était magnifique. Lorsque les autres étaient plutôt rouillées et banales, celle-ci était propre et unique. Elle comportait deux anneaux : un premier doré et un deuxième argenté. Les deux étaient ralliés par deux pierres semi-précieuses qui s'emboitaient à la perfection, comme pour s'unir. Chaque pierre avait une couronne. L'anneau argenté formait un diadème décoré de plus petites pierres en forme d'étincelles. Des pierres de lune : blanches scintillantes et bleues avec des reflets plus foncés. L'anneau doré était une couronne et comportait des pierres en forme de fleurs : des raiponces. Les pierres étaient de différents quartz : certaines pierres étaient d'un quartz orange flamboyant et d'autres d'un violet envoutant. J'allais la prendre pour l'essayer quant Ivy a eu la même idée. Nos doigts se posèrent sur le bijou au même instant. Nous nous fixions avec ardeur quand la vendeuse qui nous avait observés dès le début s'interposa entre nous pour prendre la bague.

Ivy continue le récit de Michaela pour citer les paroles de la vendeuse :

-    Olala, si vous saviez comme j'attendais ce moment. Vous la voulez mais vous ne savez pas qui de vous la prendra ? Coupez la poire en deux.

Michaela continue :

-    La vendeuse ricanait comme si elle venait de faire la blague la plus drôle du monde. Un blanc s'ensuivit, jusqu'à ce qu'Ivy et moi pouffions de rire, face à l'absence de crédibilité de cette dame. La vendeuse nous souriait avec un regard de malice puis détacha les deux anneaux. Ivy et moi avions compris à cet instant qu'il n'y avait pas qu'une bague, mais deux. Deux anneaux, donc deux bagues. La vendeuse qui tenait le bijoux tenda ses bras vers nous et ouvrit les paumes de ses mains. Un anneau dans chaque paume de main, une main dirigée vers chacune de nous. Nous prîmes chacune l'anneau qui nous était destiné et l'essayâmes. L'anneau argenté pour moi et le doré pour Michaela. Elles nous allaient parfaitement. Ivy avait ensuite demandé combien elles coutaient. Elles nous avaient fait payer 12$ chacune, pour des bagues en acier inoxydable et les pierres précieuses comprises. Ce que je considère comme rentable. En sortant de la boutique, Ivy et moi en avions discuté, en s'avouant que chacune avait flashé sur un anneau plus que l'autre et que la vendeuse avait visé dans le mile pour nous les attribuer. C'est sur le chemin du retour que nous sommes devenues amies. Et l'année d'après, partenaires de chambre.

L'as de roseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant