Je comptais bel et bien tenir parole.
Donc le jour qui a suivi, j'ai consacré tout mon temps à ma famille. En effet, après avoir savouré de bons petits déjeuners à la française, nous avions visité les plus beaux endroits de Paris, bien que ce soit toujours en voiture ou péniche privatisée étant donné ma popularité – ce qui signifie, le risque qu'on soit dérangés par certains fanatiques.
Une chose était sûre, c'est qu'avoir les deux personnes qui comptaient le plus pour moi, remplissait mon cœur de joie. Je n'ai pas arrêté de sourire, rire auprès d'eux toute la journée, entre Bria qui explorait les lieux d'un œil enfantin et Nao qui n'a fait qu'aller et venir entre plusieurs endroits – débordant d'énergie et d'excitation – ça faisait bien longtemps que je ne m'étais pas aussi amusé. Et pourtant, même avec tous ces bons moments, un sentiment de honte refusait de quitter mon esprit à la fin de la journée.
Et oui. La veille, j'avais été tellement préoccupé par mes retrouvailles avec Sae lors de la fête que j'avais littéralement oublié d'aller chercher ceux que j'avais tant envie de retrouver. L'image de Bria me fixant les larmes aux yeux, et un Nao endormi dans ses bras saccageait mes pensées à présent.Comment avais-je pu faire ça ? Oublier ceux que je voulais tant retrouver depuis des mois ?
- Rin, ça va ? Me demanda Bria, allongée près de moi.
Après une autre longue journée de visite, nous étions détendus dans un jardin privé de Paris, dans le 17ème arrondissement. Une nappe grandement soignée se trouvait en dessous de nous, et un panier de pique-nique entre ma copine et moi accompagné de divers aliments légers. Bria avait eu l'idée en cette belle journée ensoleillée de se reposer dans un parc, tel une famille ordinaire se promenant un jour d'été. D'habitude, c'est le genre de scène qu'on pourrait voir à la télé : une famille réunie dans un parc pour un bon pique-nique romantique, accompagné d'un chien qui court après un os (souvent c'est le cas, pas la peine de rire). Sauf qu'en ce moment, il s'agissait de la vraie vie, moi en compagnie de ma femme et mon fils, où celui-ci jouait avec son ballon de foot à quelques mètres de nous.
« Attends un peu... tu as bien dit femme là... ? »
... Possible, oui. Bien que nous n'étions pas mariés, ça faisait déjà un moment que je considérais Bria comme telle. L'amour, peut-être...
- Oui, oui, tout va bien. Pourquoi ? Lui répondis-je tout en la tenant dans mes bras.
- Tu faisais une tête bizarre, c'est pourquoi. Tu veux qu'on rentre ? T'es fatigué ?
Un sourire se fit entre mes lèvres en la voyant si soucieuse.
- Quoi ?
- Rien. C'est juste que t'as toujours été comme ça.
- Comment, « comme ça » ? Demanda-t-elle les sourcils légèrement froncés.
- Si attentionnée. Tu as toujours fait passer les désirs des autres avant les tiens... comme pour Nao, par exemple.
- Ah... elle se mordit légèrement la lèvre, j'ai jamais fait attention.
- Tu rigoles ? Dis-je dans un rire.
Bria répondit, les épaules nonchalamment haussées :
- C'est naturel chez moi. En fait, ça l'est surtout devenu depuis que j'ai eu Nao. Donc je suppose que c'est normal.
- En tout cas, c'est ce qui me plaît le plus chez toi. Mais si jamais tu ne vas pas bien, que quelque chose te contrarie ou te gêne, tu peux aussi m'en parler. Tu es venu jusqu'ici avec Nao, et moi je suis là pour prendre soin de vous.
Elle tourna sa tête pour me regarder, un sourire crispée sur ses lèvres.
- Justement, hum... en parlant de ça... si je dois tout te dire...
- Oui, je t'écoute.
Ses yeux se détournèrent ensuite légèrement d'hésitation, comme si elle cherchait convenablement la façon d'aborder ses mots.
- Hier, quand tu es venu si tard à l'aéroport... j'étais vraiment, vraiment agacée.
- Je comprends.
- Non, tu comprends pas Rin. Ça va plus loin que ça. Je veux dire, Nao était si excité à l'idée de te revoir, et moi aussi... j'ai pas arrêté de m'inquiéter parce que j'ai commencé à penser que quelque chose de grave s'était passé vu que tu ne répondais pas à mes messages. Et puis... quand tu m'as dit que tu étais retenu à cause du boulot... d'une fête...
- ...
- Je peux comprendre que ta carrière te prenne beaucoup de temps, je peux tout à fait comprendre. Mais on est ta famille Rin, et on a parcouru des kilomètres pour venir te voir. T'attendre dans cet aéroport m'a fait soudainement rappelé les jours où tu venais au Japon pour repartir direct le lendemain, toujours à cause du travail. J'avais l'impression... que tu nous abandonnais.
- Bria...
- Je ne veux pas revivre ça à nouveau, Rin.
Elle me fixa de ses yeux nostalgiques, presque tristes. Un côté de moi pouvait la comprendre : elle était inquiète, et comme elle l'a dit plus tôt, ils avaient fait des kilomètres pour venir me voir. C'était impossible que je lui dise la vraie raison de mon retard, elle ne comprendrait pas et serait sans doute plus agacée qu'elle ne l'était déjà. Et c'est pourquoi un autre côté de moi ne pouvait pas partager son sentiment : je venais tout juste de retrouver mon frère, celui à qui je n'avais pas parlé depuis des années. Celui à qui je partageais une rancune extrême, celui qui m'avait fait du mal, la cause de mon caractère si froid et apathique des autres. Et bien que je n'ai jamais parlé à Bria de mon frère – et inversement d'ailleurs – je doute fortement qu'elle puisse compatir à mon histoire après toutes ces années. Peut-être que oui, si j'avais eu le temps ou même l'idée de lui parler de lui ? Mais à quoi bon, ni l'un ni l'autre ne se rencontreront un jour, de toute façon. Même si j'avais renoué avec Sae, du temps serait nécessaire si je devais lui annoncer que j'étais père d'un enfant.
Beaucoup de temps, même.- Je t'ai entendu, et crois-moi que je comprends. Je suis désolé que vous ayez dû subir mon retard. À présent c'est terminé. Plus rien ne passera entre vous.
- ... Plus rien ?
- Absolument, plus, rien. Je te le promets.
Je lui caressai tendrement la joue avant de l'embrasser à plusieurs reprises, des baisers auxquels elle y répondit langoureusement. Au moment où nous nous relâchions, j'entendis la voix joyeuse de Nao qui me demandait de le rejoindre jouer avec lui. Bria et moi regardions notre fils, qui tenait son ballon sous son bras gauche tout en gesticulant son bras droit vers nous.
- Papa ! Viens jouer ! Dépêche-toi !
Le voir dans son agitation nous fit esquisser un petit rire narquois, où Bria me répondit par la suite :
- Allez, va entraîner ton fils.
- Avec plaisir.
Je me levai alors et rejoignis Nao dans sa joie, le regard affectueux de Bria sur nous. Les rayons du soleil sur le point de se coucher illuminait son beau visage foncé, ses longs cheveux bouclés ainsi que ses yeux noisettes.
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Soulmates - Partie 2
Fanfic《 Je ne comprenais pas pourquoi mes larmes menaçaient de couler. Sae a été odieux avec moi, et je ne méritais certainement pas de pleurer pour les mots de ce sale type. 》 « Alors pourquoi je me sentais si mal ? » Deuxième partie de Soulmates - Et ta...