Chapitre 1 : La nouvelle

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6 :23.

L'horloge de la piscine affiche ces chiffres en rouge. Déjà 23 minutes que je suis dans l'eau à enchaîner les longueurs et je ne vois pas le temps passer. Je profite des quelques secondes de repos pour jeter un regard par les grandes baies vitrées. Les premières lueurs du jours apparaître ce qui donne une couleur rosée au ciel, quelques nuages sont encore présents mais je sais que la température est agréable dehors. J'adore ces moments hors du temps, plonger dans une piscine, faire travailler mon corps, me concentrer seulement sur ma nage et mes sensations alors que le jour n'est pas encore levé et que la plupart des gens dorment encore ou émergent seulement. Le réveil à 5h30 et le trajet dans le silence d'une ville endormi où les oiseaux commencent leurs premiers chants de la journée m'apportent un sentiment de calme et de plénitude.

Au fil des années, j'ai appris à apprécier ce rythme strict. Mes premières années d'entraînement intensif n'ont pas toujours un plaisir, mais ma passion pour la natation et mes ambitions sportives m'ont permis de me créer un schéma d'entraînement adapté à mes besoins, en harmonie avec ma personnalité. Le premier entraînement de la journée est pour moi le plus agréable. Il correspond généralement à l'entraînement le moins cardio, celui où on se concentre sur notre technique de nage après un échauffement intense. Il diffère largement de celui du midi qui se décompose en une partie cardio avec des accélérations en bassin et une partie de renforcement musculaire en salle. L'entraînement du soir dans le bassin extérieur du centre de formation, nous permet bien souvent de profiter de jolis couchés de soleil et de clôturer la journée en beauté. Beaucoup de gens admire les sportifs de haut niveau qui vivent pour leur sport. Ce schéma de vie demande tellement de sacrifice mais la passion et les victoires, mêmes minimes, sont des récompenses qui balayent les souffrances.

Je tourne mon regard vers le chronomètre à quatre aiguilles, caractéristique de notre sport, et part pour mon 13ème 100m crawl à allure rapide au moment au l'aiguille jaune arrive sur le zéro. Encore 7 fois cent mètres à réaliser et je pourrai me concentrer sur mes nages favorites : la brasse et le papillon. Je pousse sur le mur, ondule pour aller le plus loin possible et commencer mes mouvements dès que la surface arrive. Je me concentre sur ma respiration pour ne pas trop puiser dans mon énergie et apprécie la sensation de glisse sur mon corps. Je reste sur un tempo d'une respiration tous les trois temps pour essayer d'améliorer au maximum mon endurance. Mes sensations sont bonnes depuis plusieurs mois, sans aucunes douleurs au niveau des épaules et une motivation remontée à bloc. Rapidement, le mur arrive et j'enclenche mon virage en essayant d'être à la distance idéale pour la meilleure coulée possible. Je déroule ma nage et boucle mon 100mètres dans un temps qui me permet une pause de quelques secondes afin de reprendre mon souffle pour partir pour le 100 mètres suivant. Je jette un regard à Luc, mon coach depuis maintenant 4 ans qui observe les nageurs depuis l'autre bout de la piscine.

- Bien Leila, m'encourage-t-il, n'oublie pas de bien placer ta main sous l'eau, on ne veut pas d'une tendinite à deux semaines de ta première course au JO.

- Ouais, je veux ma partenaire des podiums avec moi sur les podiums pour les JO s'il te plait, fait gaffe, ironise Antoine, mon partenaire d'entraînement depuis notre enfance, depuis la ligne d'eau d'à côté.

Je n'ai pas le temps de leur répondre avant de me lancer dans mon 14ème cent mètre avec un sourire après la remarque de mon meilleur ami, et concentrée sur chacun de mes placements pour être le plus efficace.

Antoine et moi avons commencé la natation dans notre petite ville natale du sud-ouest de la France et ne nous ne sommes jamais quitté depuis. Le début de notre relation était plutôt caractérisé par un sentiment de compétition entre nous deux. Nous étions tous le temps en train de nous comparer, de savoir lequel de nous deux était le meilleur, de nous tirer la bourre aux entraînements pour être en première position dans la ligne. Nous avons passé notre enfance à nous détester même si nous étions ravis de nous retrouver après chaque vacance scolaire. C'est seulement autour de nos 14 ans qu'on a compris que cette compétition entre nous nous empêchait juste le développement de notre amitié. C'est aussi à cette période-là qu'Antoine a grandi et a développé une force avec laquelle je ne pourrai jamais rivaliser. Depuis, nous avons évolué ensemble sans jamais nous quitter. Nous avons fait notre scolarité ensemble, nous somme allées dans les mêmes centres de formation et nous avons surtout pu s'appuyer l'un sur l'autre dans les coups durs mais aussi partager d'excellents moments. Aujourd'hui, nous sommes indispensables l'un pour l'autre. Nous nous comprenons parfaitement car nous vivons les mêmes défis et les mêmes réussites qui nous ont fait grandir ensemble.

Dans les bassins de ParisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant