Chapitre 4 : La coulée

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Je fais un signe de main aux filles qui discutent et profitent du soleil sur le balcon et me dirige vers la porte de notre appartement, mon sac de sport aux couleurs de la France accroché à mon épaule. Il est 20h passées et je me rends à la piscine réservée à l'équipe de France et du Canada juste à côté du Village Olympique pour m'entraîner sur certains points techniques et surtout, pour me concentrer sur mes coulées. Cette piscine est située à quelques centaines de mètres de notre immeuble et je profite de l'air frais du début de soirée pour me déplacer à pied et continuer à découvrir le Village Olympique.

Lorsque je sors de notre bâtiment, la brise, qui s'engouffre dans les larges rues de cette ville à taille réduite, caresse ma chevelure blonde dont les pointes bouclées tombent sur mes épaules. Je prends une grande respiration et un sentiment de plénitude m'envahit. J'aime cette sensation, ce moment, où une longue semaine de grande compétition s'apprête à débuter, que la concentration est présente mais n'a pas encore pris le dessus sur la décontraction et l'excitation du début d'une nouvelle aventure.

Les lumières des chambres des athlètes logés dans les bâtiments qui bordent ma route m'indiquent que la plupart des sportifs sont maintenant arrivés. Certains discutent sur les balcons, d'autres se promènent dans les rues avec des étoiles plein les yeux, ... Le Village Olympique est habillé aux couleurs de tous les pays participants et ma petite escapade jusqu'à la piscine me permet de voir que l'Algérie, l'Italie et la Chine sont nos voisins. Je découvre la présence d'un cinéma au niveau de la sortie qui me mène à la piscine et note mentalement qu'il faudra que j'en profite lorsque toutes mes épreuves seront terminées. J'ai décidé de passer toute la période des Jeux dans le Village Olympique, même si les épreuves de natation sont concentrées la première semaine. Je pourrai profiter de l'ambiance, aller soutenir mes camarades et m'imprégner au maximum de cette atmosphère, que je vivrai qu'une seule fois dans mon pays natal.

J'arrive devant la piscine et pousse la porte d'entrée. Instantanément, je sens l'odeur de chlore et l'humidité sur ma peau. Ces sensations me sont familières depuis toujours. La personne à l'accueille me sourit chaleureusement et m'indique le chemin à suivre pour accéder aux vestiaires et au bassin. Je lui souris en retour, agréablement surprise de l'amabilité des bénévoles présents dans le village et dans les sites officiels depuis notre arrivée. Je quitte mes baskets blanches et range mes chaussettes à l'intérieur avant de m'engouffrer dans une cabine pour troquer mes affaires de villes contre mon maillot vert Arena et mon bonnet et mes lunettes. Je tasse mes affaires au fond de mon sac, le ferme et sors de la cabine munie de ma gourde. J'emprunte ensuite le chemin vers le bassin et suis assez étonnée par le calme qu'il y règne. Aucuns coups de sifflet, aucun entraîneur qui crie sur ses nageurs, aucune éclaboussure.

Lorsque je débouche sur le bassin, une personne est occupée à nager à la ligne d'eau numéro 2. Un homme, vêtu d'un maillot bleu et d'un bonnet noir, une grande paire de lunette lui couvre le visage ce qui m'empêche de le reconnaître. Je le détaille quelques minutes tout en préparant mes affaires et en agitant mes bras pour m'échauffer. Sa nage est bonne, il a une manière fascinante de glisser sur l'eau, comme s'il se situait à l'interface avec l'atmosphère et qu'aucun frottement n'avait lieu entre son corps et l'eau de la piscine. Je suis, dans un premier temps, fascinée mais plus j'observe et plus quelque chose me semble étrange dans sa nage. Son bras droit n'effectue pas un mouvement habituel lorsque les nageurs de haut niveau nagent le crawl. Son amplitude est faible ce qui ne lui permet pas de s'allonger et de rentrer sa main le plus loin possible de son corps. Je me demande d'ailleurs comment sa glisse est aussi belle alors que ses mouvements de sont pas parfaits. Je secoue la tête avant d'enfiler mon bonnet et de placer mes lunettes sur mes yeux.

Je me place en ligne 6, à l'opposé de la seule personne présente dans la piscine. Je saute dans le bassin et apprécie la morsure de l'eau sur ma peau qui a lieu pendant les quelques secondes d'adaptation de mon corps à la température du bassin. Je remonte à la surface et enchaîne quelques longueurs de crawl pour m'échauffer, récupérer mes sensations et préparer mon corps aux exercices que je m'apprête à faire. J'enchaîne une série de quatre fois 100m crawl et profite du calme de la piscine et d'être seule dans une ligne pour bosser quelques accélérations en papillon et en brasse. Une fois que je sens que mon corps est chaud, je me positionne au niveau du mur situé du côté du grand bain pour travailler mes coulées. Je me repasse en tête les conseils donnés par Luc : m'allonger au maximum, être dynamique dans mes ondulations et dans mes mouvements de bras et jambes pour la brasse, ne pas respirer sur la première reprise en papillon. Je m'accroche au mur et me prépare à partir. Les coulées sont primordiales sur les distances de 200m et 100m sur lesquelles je concours et de bonnes coulées pourraient me permettre de gagner du terrain et de réduire mes temps.

Dans les bassins de ParisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant