XXVIII - Tigre - 2ème partie

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Un matin, peut-être douze ou treize jours après l'arrivée de la Légion, peut-être seulement quelques jours après les exercices sans scénario, Mikhail se réveilla troussé comme une volaille pour la broche. Il avait un sale goût dans la bouche, mais comme ils n'avaient bu que de la tisane la veille au soir, il devina qu'il avait été drogué. Pas sympa. Pas sympa du tout.

Il ouvrit les yeux et regarda autour de lui. Il faisait un peu sombre, avec une lampe de poche pas très forte sur un rebord rocheux un peu haut. Il y avait d'autres hommes attachés avec lui. Prisonniers. Comme ses yeux s'habituaient à la faible lumière, il en reconnut certains. Et réalisa qu'il manquerait un homme dans chacune des chambrées. Pas plus. Un homme par peloton.

Il se tortilla sur le sol, essayant de trouver une position plus confortable, mais ses pieds étaient attachés à une tige de métal, comme un gros fer à béton, et il ne pouvait pas bouger. Alors il contracta ses abdos pour s'asseoir.

Ils étaient dans une grotte. Sol sableux, plafond rocheux, air sec... La tige de métal était bloquée au sol par des piles de cailloux à chaque bout et tous les prisonniers avaient les pieds fixés à cette tige.

Point positif : il ne faisait pas aussi froid qu'à l'extérieur et il n'y avait pas de vent. Point négatif : quelle heure était-il ?

Il entendit des voix dans la grotte, mais comme elles étaient déformées par l'écho, il ne pouvait pas comprendre les mots. Mais l'un des soldats avaient une voix féminine. Et il n'y avait qu'un soldat féminin ici. Donc ils étaient prisonniers des légionnaires.

La première réaction de Mikhail fut la peur. La Légion s'était retournée contre eux, ils avaient été trahis... Puis son sens commun refit surface. C'était un exercice. Mikhail se détendit et se rallongea, le soulagement – et peut-être les dernières traces de la drogue – lui faisant tourner la tête.

Ils n'avaient qu'à attendre que leurs camarades viennent les délivrer des légionnaires. Il gloussa. Les autres allaient suer et souffrir pendant que les prisonniers resteraient bien au chaud sans se fatiguer.

Après un petit moment, quand la position inconfortable dans laquelle il se trouvait lui avait donné des fourmis dans les mains, il finit par se dire qu'à leur place, les légionnaires ne seraient pas restés immobiles à attendre qu'on les délivre. Donc il fit un rapide inventaire de la situation.

Autour de lui, les autres prisonniers se réveillaient. Certains gémissant, d'autres se plaignant de la traîtrise des Français.

- Mais non, idiots, c'est un exercice. Regardez autour de vous, ils ont pris un homme par chambrée, par peloton.

- Mais... comment ?

- Ils ont dû nous droguer. J'ai l'impression d'avoir la gueule de bois, mais on n'a rien bu de plus fort que du thé hier soir.

- C'est dégueulasse...

- Tout est juste à la guerre, Mischa répondit.

- Bon, on fait quoi ? On attend que nos camarades nous délivrent ?

- Ou on peut essayer de s'échapper. Peut-être maîtriser les Français.

- Baliakov, on est attachés...

- Et ? Je suis sûr qu'à notre place, les légionnaires réussiraient à se libérer, et à retourner à leur base sans l'aide de leurs camarades.

- Forcément que tu penses ça, tu es amoureux d'eux, Baliakov. Ils ne sont qu'humains, comme nous.

- Ce sont des soldats d'élite, ils s'entrainent avec les meilleurs...

- Humains quand même.

- Va chier, trouduc. Je ne vais pas attendre nos camarades. Je vais me battre pour sortir.

La Compagnie du Lys de Sang - histoires parallèlesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant