Chapitre 3

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Cela faisait bientôt un mois que Sherlock avait assisté à l'enterrement de sa fille, un mois déjà qu'elle était partie, mais il ne semblait pas encore s'en rendre compte. Bien sûr, le déni était une des étape du deuil, mais celui-ci semblait être impossible à accepter pour le détective.

- Elizabeth, peux tu éteindre la télé s'il te plaît, déclara le brun, seul dans son appartement.

- [...]

- Évidemment c'est toujours à moi de le faire.

- [...]

- Mais oui bien sûr, la télécommande est plus près de moi. Et puis quoi encore.

Sherlock souffla, leva les yeux au ciel et attrapa la télécommande qui se trouvait sur l'accoudoir de son siège avant d'éteindre la télévision. Seul dans son appartement, il plia les genoux contre son torse et enfouie son menton sur ces derniers. Un silence pesant l'entourait depuis que la télé s'était arrêté, et pourtant il ne semblait pas se rendre compte que l'appartement était vide. Elizabeth, n'était plus là. La seule pensée qui le maintenait en vie, sa seule raison de se lever et d'espérer, avait disparu et s'était éteinte devant ses yeux. Elizabeth était morte. Sherlock ne voulait pas l'admettre, il ne voulait pas se souvenir. C'était bien souvent le cas lorsque quelque chose de déplaisant ou de vraiment douloureux lui arrivait. Il centralisait toutes les informations dans un coin de sa tête, les emballait bien soigneusement avant de les balancer avec rage dans un tiroir dont il ne tirait jamais la poignée. Il y entassait tout ce dont il rêvait de voir disparaître, toutes les informations qu'il considerait inutiles ou trop douloureuses. Et celle ci, cette idée, cette réalité, c'était retrouvée dans ce tiroir, bien enfouit, en dessous de toutes les autres pour sassurer que - si un jour il devait ouvrir ce tiroir - jamais elle ne referait surface. Pourtant, il devait s'y faire, il devait l'accepter, Elizabeth ne reviendrait pas...

4 mois plus tôt : 10 décembre 2018,

Elle était revenue, collée contre Sherlock, elle se sentait finalement chez elle. Elizabeth avait bravé le froid dans son grand manteau et avait monté les marches de cet appartement. John les observait, un sourire aux lèvres. Il était heureux, heureux de voir son meilleur ami et la fille qu'il considerait comme la sienne, lui aussi. Cela faisait trois mois qu'elle n'avait pas mis les pieds ici, trois mois qu'elle tentait d'échapper à ce lieu sans vraiment savoir pourquoi. Sherlock n'en savait rien non plus. Et s'il était heureux de la voir, il était aussi mécontent de ne pas l'avoir vue pendant tout ce temps. Il n'avait pas trop su comment répondre à son étreinte et s'était contenté de tapoter son dos, tendrement, mais tout de même maladroitement. Après tant d'année, il ne savait toujours pas comment réagir, pas même avec sa fille, mais elle s'en fichait bien. Elle aimait sa façon d'être, sa façon de la rassurer, sa manière de la câliner. Ce n'était peut être pas très attendrissant, mais elle savait, elle ressentait tout l'amour qu'il éprouvait et tout ce qu'il souhaitait lui dire.

John les observait, un sourire collé aux lèvres. Il savait lui aussi que Sherlock n'était pas très expressif, pourtant il voyait bien - dans les yeux du brun - la lueur d'affection qui était apparue à l'instant même où il avait vu Elizabeth. La jeune femme s'était alors écartée de son père, s'était dirigé vers l'ancien médecin militaire et l'avait à son tour pris dans ses bras une seconde.

- C'est un plaisir de te revoir, déclara John de manière presque trop solennelle.

Elizabeth sourit pour seule réponse et prit place sans un mot sur le sofa de l'appartement. Le temps d'un clignement de cil, John avait revu le jour de leur rencontre. Sherlock avait fermé la porte et la vision du médecin avait disparu.

- Qu'est ce qui t'emmène ? demanda simplement le détective de manière détachée, en s'asseyant dans son fauteuil.

John fronça les sourcils à l'entente de ce ton presque moralisateur. Sherlock n'adressa aucun regard à la femme assise sur le canapé. Au fond de lui, il était heureux de la revoir, mais comment pouvait-il lui montrer ? Comment pouvait-il pardonner les trois mois de silence radio ?
Il détestait ce trait de caractère, il détestait le caractère qu'elle avait pris de Sherlock. Cette fausse indifférence, ce manque de relationnel, cette manie de réapparaître comme une fleur sans même prévenir ni même avoir pris de nouvelles au préalable.
Il détestait ce qu'il voyait de lui, à travers sa fille adoptive.

La fille du 221b Baker Street (vol. 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant